Liliane Bettencourt, questions à domicile
La police a entendu, lundi à Neuilly, la milliardaire sur les soupçons de fraude fiscale.
L’audition «s’est passée très courtoisement, s’agissant de souvenirs qui sont parfois très anciens et que ma cliente n’a pas forcément gardés à l’esprit avec détails», a commenté Me Georges Kiejman, son avocat. Pouvait-elle répondre ? Sur une durée d’un an, les écoutes ont montré sa méconnaissance de la plupart des sujets financiers qui lui étaient exposés. «Je n’y connais rien», avait-elle lâché alors qu’on tentait de lui expliquer les jeux financiers concernant l’île d’Arros, acquise en 1999. Et à propos de comptes en Suisse : «Vous savez combien j’ai là-bas ?» La milliardaire a été questionnée, hier, sur l’île d’Arros, et ses collaborateurs ont prévu de remettre ultérieurement à la police «une note» complémentaire sur «le statut juridique de l’île». Liliane Bettencourt a botté en touche sur la question des fonds versés aux politiques. «Sur le financement des partis politiques, elle a confirmé que ça n’a jamais été son centre d’intérêt, a indiqué Me Kiejman, c’était plutôt celui de son mari», l’ancien ministre et sénateur André Bettencourt.
oublis. Les témoignages recueillis depuis dix jours par la juge Isabelle Prévost-Desprez, qui instruit un «supplément d’information» sur un autre volet de l’affaire, «l’abus de faiblesse» reproché au photographe François-Marie Banier, décrivent une milliardaire alternant «des moments de lucidité et des moments de faiblesse», contrainte de s’entourer de pense-bêtes. «Dans ces moments-là, elle n’est plus du tout sûre de ce qu’elle fait, et ne sait même plus ce qu’elle a signé dans les quinze jours qui précèdent», a indiqué l’ex-comptable Claire Thibout. Les écoutes confirment très largement ces oublis. Lorsque le notaire évoque sa succession, Liliane Bettencourt s’étonne : «J’avais laissé à François-Marie combien ? Quelle proportion ? – Légataire universel, répond le notaire. – C’est-à-dire ? – Tout. – Ah non… – Et si ! C’est vous qui me l’avez dit. – Non allons, il ne faut pas, il faut régler ça tout de suite.»
Parallèlement à sa plainte, Françoise Meyers- Bettencourt a demandé la saisine du juge des tutelles au parquet de Nanterre, qui a jugé cette demande irrecevable, jeudi, faute de certificat médical de sa mère. En réalité, un certain nombre d’attestations figurent au dossier d’abus de faiblesse qui évoquent une leucoaraïose – un processus de raréfaction de la substance blanche du cerveau – provoquant des troubles neurologiques épisodiques et des pertes de mémoire. Vendredi, la milliardaire s’était déclarée «soulagée» du rejet de la demande de sa fille. Et son avocat a évoqué la possibilité d’une révocation d’une partie des donations effectuées par Liliane Bettencourt au bénéfice de Françoise Meyers.