Subventions Airbus : Washington va appliquer contre l’UE les sanctions maximales autorisées par l’OMC
Les taxes douanières seront imposées à partir du 18 octobre: 10% sur les avions importés de l’Union européenne et 25% sur d’autres produits, dont le vin, le fromage, le café et les olives, selon une liste publiée par les services du représentant américain au Commerce (USTR).
La majeure partie des sanctions sera appliquée aux importations en provenance de la France, de l’Allemagne, de l’Espagne et du Royaume-Uni, "les quatre pays à l’origine des subventions illégales" accordées à l’avionneur européen, a précisé l’USTR, douchant les espoirs de Londres d’être épargné dans la perspective du Brexit.
"Nous espérons entamer des négociations avec l’Union européenne afin de résoudre ce conflit au bénéfice des travailleurs américains", a toutefois commenté Robert Lighthizer, l’USTR.
Pour l’heure, ces droits de douane renforcés risquent d’accroître les tensions commerciales entre Bruxelles et Washington.
Avant même la décision américaine, la commissaire européenne au Commerce, Cecilia Malmström, avait affirmé qu’en cas de nouveaux droits de douane américains, "l’UE n’aura pas d’autre option que de faire la même chose". Elle avait toutefois réitéré sa "volonté de trouver un règlement équitable".
Mais Donald Trump, qui veut arracher un accord bilatéral pour obtenir un plus grand accès au marché européen, doit de son côté décider d’ici le 13 novembre d’imposer ou non des tarifs douaniers supplémentaires sur les voitures importées de l’UE, une menace particulièrement redoutée par Berlin.
Delta Air Lines, compagnie américaine cliente d’Airbus, a déploré ces sanctions, estimant que les tarifs douaniers allaient causer de "graves préjudices aux compagnies aériennes américaines, aux millions d’Américains qu’elles emploient et aux voyageurs".
Mercredi, après 15 ans de bataille judiciaire, l’Organisation mondiale du commerce avait autorisé Washington à prendre des sanctions record, jugeant que le constructeur aéronautique européen avait bien bénéficié de subventions indues.
Les tarifs douaniers épargneront toutefois les pièces d’avion, a souligné un responsable américain.
Plus tôt, Donald Trump avait qualifié la décision de "grande victoire pour les Etats-Unis" lors d’une conférence de presse commune avec son homologue finlandais Sauli Niinisto, dont le pays préside l’Union européenne actuellement.
A Paris, le ministre français de l’Economie Bruno Le Maire avait lui estimé que les Etats-Unis feraient "une erreur économique et politique" s’ils décidaient d’imposer des sanctions tarifaires, et avait appelé à une "résolution à l’amiable", surtout "au moment où la Chine renforce son industrie aéronautique".
Le PDG d’Airbus Guillaume Faury a également appelé à une "solution négociée" dans ce conflit vieux de 15 ans qui oppose Airbus à Boeing par le biais de leurs Etats.
Le constructeur américain Boeing a déclaré qu’"Airbus peut aujourd’hui encore éviter entièrement ces mesures tarifaires en se conformant pleinement à ses obligations". "Nous espérons que ce sera enfin le cas", a-t-il ajouté.
Dans une procédure miroir, l’OMC devrait au printemps autoriser l’UE à imposer elle aussi des droits de douane en réaction à des subventions indues versées par le gouvernement américain à Boeing.
– Décision à venir –
La décision annoncée mercredi par l’OMC s’inscrit dans le cadre d’un litige sur des aides versées à l’avionneur européen, par la France, l’Allemagne, l’Espagne et le Royaume-Uni. L’OMC a jugé illégales certaines de ces aides.
Depuis, l’UE estime avoir mis ses aides en conformité avec les règles du commerce international, et a obtenu auprès de l’OMC qu’un nouveau groupe d’experts se penche sur la question. Aucune décision n’est attendue avant la fin de l’année.
Les Etats-Unis ont jugé de leur côté que l’UE ne s’était pas mise en conformité et avait réclamé à l’OMC de fixer un montant de sanctions.
La bataille juridique entre Airbus et Boeing devant l’OMC a débuté il y a 15 ans, lorsque Washington a déclaré caduc un accord américano-européen de 1992 régissant les subventions dans le secteur aéronautique.
Les Etats-Unis ont tiré les premiers en 2004, accusant le Royaume-Uni, la France, l’Allemagne et l’Espagne d’accorder des subventions illégales pour soutenir la production d’une série de produits Airbus.
Un an plus tard, l’UE affirmait que Boeing avait aussi reçu des milliards de dollars de subventions interdites de la part de diverses branches du gouvernement américain.
Les deux affaires se sont ensuite enfoncées dans un bourbier juridique, chaque partie ayant partiellement obtenu gain de cause après une longue série d’appels et de contre-appels.