Jean-François Ricard promis à la tête du nouveau parquet national antiterroriste

Il devrait incarner le nouveau visage de l’antiterrorisme en France: Jean-François Ricard, conseiller à la Cour de cassation, a été « proposé au poste de procureur national antiterroriste » par la garde des Sceaux, a annoncé vendredi la chancellerie.

Le magistrat de 62 ans devrait donc bientôt prendre la tête du tout nouveau parquet national antiterroriste (PNAT), créé par la récente réforme de la justice dans le but affiché de mieux répondre à la "menace" dans un pays meurtri par des vagues d’attentats jihadistes depuis 2015.

Son nom a été proposé par la garde des Sceaux Nicole Belloubet au Conseil supérieur de la magistrature (CSM), qui rendra ensuite un avis non contraignant.

Sa nomination en Conseil des ministres devrait intervenir d’ici la fin juin. Le PNAT, composé d’une trentaine de magistrats qui seront en charge de l’antiterrorisme et des crimes contre l’humanité, doit être installé "avant l’été", après avoir été entériné par décret, selon le ministère.

Jean-François Ricard faisait partie des favoris, avec l’ex-cheffe de la section antiterroriste du parquet de Paris Anne Kostomaroff, pour ce poste exposé.

Il a été juge antiterroriste à Paris de 1995 à 2007. Il n’avait pas 40 ans quand il a hérité, avec son aîné Jean-Louis Bruguière, de l’enquête sur l’attentat à la station du RER Saint-Michel revendiqué par le GIA algérien.

Juge d’instruction, il avait fait ses armes dans le Pas-de-Calais et en région parisienne, se taillant une réputation d’intransigeant et de gros travailleur. Il ira ensuite au ministère de la Défense puis au parquet général. Il a été l’un des promoteurs de ce nouveau parquet antiterroriste.

Superparquet

Le PNAT sera comme le parquet national financier – né en 2013 du scandale Cahuzac – un "superparquet". Celui-ci, l’une des mesures phares de la loi de réforme pour la justice promulguée le 23 mars, est érigé en "véritable force de frappe judiciaire antiterroriste" face à une menace toujours présente.

Annoncé en décembre 2017, le PNAT avait immédiatement suscité de vives critiques parmi les magistrats. Certains avaient relevé, comme le Conseil d’Etat dans un avis, le grand risque de perdre de vue les liens entre petite délinquance et terrorisme. Le Sénat s’était par la suite opposé à sa création lors de l’examen à l’automne du projet de loi justice.

Le PNAT doit se substituer à la section antiterroriste du parquet de Paris, dite C1, créée en 1986 après une vague d’attentats revendiqués par un groupe proche du Hezbollah. Chargée de la lutte contre le terrorisme et des atteintes à la sûreté de l’Etat au niveau national, elle a vu le nombre de ses dossiers doubler à partir de 2012.

Mais depuis trois ans, cela décroît: la section a été saisie de 308 affaires nouvelles tous contentieux confondus en 2016, puis de 230 en 2017 et 171 en 2018, selon le parquet de Paris. Une décrue qui a fait dire aux principaux syndicats de magistrats que la création du PNAT relevait essentiellement de "l’annonce politique" et du "gadget" alors même que l’efficacité de la section antiterroriste du parquet dirigé à l’époque par François Molins avait été saluée par la ministre.

A ces dossiers, il faudra ajouter les 146 – 60 informations judiciaires et 86 enquêtes préliminaires – traités par le pôle crimes contre l’humanité et crimes de guerre concernant une vingtaine de zones géographiques (Syrie, Sri Lanka, République démocratique du Congo…).

Les effectifs dédiés aux crimes contre l’humanité devraient doubler, passant de trois à six parquetiers au sein du nouveau PNAT, selon une source proche du dossier. Ceux de l’antiterrorisme, actuellement de quatorze magistrats, devraient aussi augmenter. Certains redoutent que ces nouveaux effectifs soient pris au sein d’autres sections du parquet de Paris, sans être remplacés.

Après la tête du PNAT, il faudra pourvoir un autre poste-clé, celui de procureur national financier, en remplacement d’Eliane Houlette, qui doit prendre sa retraite le 30 juin.

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