Espagne: le chef du PS démissionne, déblocage politique possible

Le chef du Parti socialiste espagnol Pedro Sanchez a démissionné samedi soir après avoir été désavoué par les siens, rendant possible une sortie de crise de l’Espagne, dans une impasse politique depuis neuf mois.

Il a été poussé vers la sortie par une partie de son équipe s’opposant à sa stratégie de blocage à l’encontre du chef du gouvernement conservateur sortant Mariano Rajoy. En l’absence de majorité au parlement, Rajoy tente en vain de former un nouveau gouvernement. Il a été bloqué jusqu’à maintenant par le veto des 85 élus socialistes à la Chambre des députés.

"J’ai annoncé au comité fédéral, la démission… de ma personne en tant que secrétaire général", a déclaré peu après 21h00 (19h00 GMT) Pedro Sanchez après une journée houleuse de débats au sein de cette instance, sorte de parlement du parti.

Aux commandes depuis 2014, Pedro Sanchez, premier secrétaire général élu par les militants, était le grand adversaire de Mariano Rajoy, qui a confié qu’il avait rarement eu des rapports aussi tendus avec un autre homme politique.

Grand brun élancé, orateur doué, Sanchez répétait depuis presque un an "non c’est non", au patron du Parti populaire, qu’il avait même qualifié d’"indécent" pendant un débat.

"L’Espagne ne mérite pas quatre ans de plus d’un président du gouvernement qui a systématiquement menti à la société espagnole", a-t-il encore dit vendredi soir en évoquant les affaires de corruption, les coupes claires, la misère et les inégalités ayant selon lui marqué le mandat de Rajoy.

Mais Pedro Sanchez s’est vu fragilisé en interne au fil des mois par les défaites électorales sans précédent de son parti, mis en difficulté par l’émergence de Podemos (gauche radicale).

Mercredi, il a été visé par un coup de force d’une partie de son équipe de direction qui a démissionné en bloc pour le faire tomber.

– Jouer la base –

Samedi soir, ces dissidents l’ont désavoué en refusant de convoquer un congrès extraordinaire du parti comme il le souhaitait pour mettre fin aux divisions. Ils l’ont emporté par 133 voix contre 107.

Ils devaient mettre en place dans la soirée une direction intérimaire en remplacement de M. Sanchez qui devra annoncer sa position sur la crise politique du pays.

L’Espagne est sans nouveau gouvernement depuis neuf mois après deux élections législatives, en décembre 2015 et en juin, qui ont débouché sur un Parlement fragmenté entre quatre formations: le PP de Mariano Rajoy, le PSOE, Podemos (gauche radicale) et Ciudadanos (centre libéral).

Or les partis n’ont plus que quelques semaines, jusqu’au 31 octobre pour parvenir à un compromis et investir un nouveau cabinet. S’ils échouent, le roi devra convoquer un nouveau scrutin pour décembre, les troisièmes législatives en un an.

Les opposants de M. Sanchez craignaient que le parti ne perde encore du terrain lors de ces élections après deux défaites historiques l’ayant mené à son pire score en 137 ans d’histoire. Ils préféreraient se refaire une santé dans l’opposition et laisser gouverner M. Rajoy.

Les proches de Sanchez estiment au contraire qu’en permettant à la droite de gouverner, les socialistes feraient le lit de Podemos qui rêve de détrôner le PSOE comme Syriza l’a fait avec les socialistes du Pasok en Grèce.

"Les partisans d’un gouvernement du Parti populaire s’imposent au sein du PSOE", a immédiatement réagi sur son compte Twitter le chef de Podemos Pablo Iglesias.

Pedro Sanchez voulait jouer la base contre l’appareil du parti, non sans rappeler la stratégie du travailliste britannique Jeremy Corbyn, adoubé le 24 septembre par les militants après une guerre avec l’appareil de son parti, le Labour.

"Le parti ne leur appartient pas (aux dirigeants) il appartient aux militants, à ceux qui travaillent dans les rues et dans les villages", disait Laura Martínez, une militante de Loeches, à une vingtaine de kilomètres de Madrid, venue soutenir Sanchez devant le siège du PSOE.

AFP

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