La société française, Eutelsat, qui se plaint de la censure de télés en Iran, a coupé le signal de Radio Kalima sur son satellite Hotbird.

C’est l’histoire du censuré devenu censeur. Mercredi, on apprenait par le quai d’Orsay que l’opérateur de satellites Eutelsat avait saisi l’Union internationale des télécommunications pour protester contre une censure dont sont victimes certaines chaînes qu’il diffuse en Iran.

La société française, Eutelsat, qui se plaint de la censure de télés en Iran, a coupé le signal de Radio Kalima sur son satellite Hotbird.
Ce jeudi, Eutelsat coupait la diffusion de la radio Kalima, une double antenne d’opposition en Algérie et en Tunisie.

En Algérie, l’audiovisuel est régi par un monopole d’Etat depuis l’indépendance, en 1962. Le 25 janvier, la radio Kalima est venue bouleverser cette situation, depuis l’étranger, grâce au satellite Hotbird. Deux jours auparavant, le site Internet était mis en ligne.

Selon le responsable de cette radio Yahia Bounouar, « entre 15 000 et 20 000 connexions quotidiennes » parvenaient sur le site, « avec des pics à 50 000 ». Notamment quand la radio et le site ont couvert l’assassinat du directeur général de la sûreté algérienne [4], Ali Tounsi, fin février. Yahia Bounouar raconte :

« Au début, les autorités ont parlé d’une crise de démence en pleine réunion. Puis nous avons révélé [5] qu’il avait été assassiné, et nos informations ont été reprises sans nous citer par plusieurs journaux algériens, dont El Watan [principal quotidien francophone en Algérie, ndlr].

Ensuite, même la famille de Tounsi a contesté la version officielle. Aujourd’hui, les autorités reconnaissent qu’il a été assassiné. »

Dans un communiqué, Reporters sans frontières a fait part de son inquiètude du blocage du site web de la radio d’informations indépendante Radio Kalima-Algérie, www.kalimadz.com, et de sa diffusion par satellite.

« Nous craignons que cet acte de censure n’inaugure le début d’un contrôle d’Internet dans le pays. Nous demandons aux autorités algériennes de fournir des explications et d’ordonner le déblocage immédiat du site, effectué de manière arbitraire. Il ne faudrait pas que l’Algérie fasse son entrée dans la liste des pays qui censurent la Toile, sans quoi le droit à la liberté d’expression des Algériens en pâtirait », a déclaré l’organisation.

Et d’ajouter : « cette affaire soulève également le problème du monopole de l’audiovisuel dans le pays. Nous demandons aux autorités de libéraliser le secteur dans un souci de respect du pluralisme de l’information. »

Le 16 mars 2010, le site de Radio Kalima-Algérie a été rendu progressivement inaccessible dans les différentes régions du pays, avant d’être complètement bloqué le 17 mars. Tout comme sa diffusion par le satellite Hotbird d’Eutelsat, le 18 mars. Reporters sans frontières a écrit à l’entreprise européenne, basée à Paris, le 19 mars, afin de lui demander des explications. Voir la lettre ci-jointe.

Radio Kalima-Algérie a été lancée le 25 janvier 2010, par un groupe de journalistes indépendants. Elle est la seule radio algérienne privée alors que le gouvernement contrôle tous les médias audiovisuels depuis l’indépendance du pays, en 1962.

Cette radio d’informations indépendante diffuse ses programmes en arabe, en français et en amazig. Ils abordent des questions liées à la culture, aux droits de l’homme et aux libertés publiques et atteignent une audience quotidienne de 15 000 à 20 000 personnes.

Radio Kalima-Algérie a déjà traité de sujets sensibles : elle a annoncé l’assassinat du directeur de la sûreté générale, en contradiction avec la version officielle, et dénoncé des affaires de corruption dans lesquelles des membres du gouvernement algérien seraient impliqués. Des sujets ensuite repris par certains médias algériens, au grand dam du gouvernement.

D’après le journaliste Yahia Bounouar, « les autorités algériennes ne peuvent pas admettre que les médias sont au service des citoyens, et non de leur propagande. C’est un rappel à l’ordre, un signal pour tous les autres ».

Il précise qu’il ne compte pas baisser les bras : « Nous allons continuer. Nous mettons à la disposition des internautes des serveurs proxies afin qu’ils puissent contourner la censure et accéder à www.kalimadz.com ».

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