Algérie : Louisa Hanoune (PT) en détention provisoire

La secrétaire générale du Parti des Travailleurs (PT) algérien a été écrouée jeudi, à l’issue de son audition par la justice militaire, dans une enquête pour complots contre l’Etat et l’armée visant le frère du chef de l’Etat déchu, selon un responsable du PT.

Louisa Hanoune "a été placée en détention provisoire", a déclaré à l’AFP le député Ramdane Youssef Tazibt, membre du bureau politique du PT, précisant ne pas connaître les chefs d’inculpation qui lui ont été signifiés.

"Elle a été convoquée comme témoin en lien avec les responsables arrêtés ces derniers jours" –Saïd Bouteflika, frère du président déchu Abdelaziz Bouteflika, et deux anciens puissants patrons des services de renseignements– "et elle se retrouve à son tour arrêtée", a-t-il ajouté.

Mme Hanoune est "le premier responsable politique à subir une telle dérive" de la justice algérienne, a-t-il dénoncé.

Celle qui avait comparé la démarche d’Ahmed Gaïd Salah, le chef d’état-major, à celle du président égyptien Sissi, avait été entendue par le tribunal militaire de Blida (sud d’Alger) dans le cadre de l’enquête pour «atteinte à l’autorité de l’armée» et «complot contre l’autorité de l’État».

Cette enquête a déjà valu, le week-end dernier, à Saïd Bouteflika, le frère du président, ainsi qu’à Mohamed Médiène (le général Toufik) et Bachir Tartag, les deux ex-patrons des services de renseignement, de passer directement du bureau du procureur à la cellule.

La télévision nationale avait montré à la mi-journée Louisa Hanoune, candidate aux trois derniers scrutins présidentiels, arrivant seule au tribunal militaire de Blida (40 km au sud d’Alger), où elle avait été convoquée par un juge d’instruction militaire.

La télévision n’avait pas précisé sous quel statut elle était convoquée, mais son parti avait affirmé qu’elle l’était en tant que "témoin".

Pour le PT, parti d’inspiration trotskiste fondé en 1990 lors de l’ouverture au multipartisme, cette incarcération est "une dérive gravissime, un acte de criminalisation de l’action politique indépendante et l’expression d’une volonté de mise au pas des militants et activistes par le pouvoir de fait"

"Il s’agit là d’une mesure contre le peuple algérien et sa mobilisation révolutionnaire entamée depuis le 22 février 2019", a ajouté le parti de Louisa dans un communiqué publié dans la soirée sur sa page Facebook.

Le tribunal militaire de Blida a déjà placé le 5 mai en détention provisoire Saïd Bouteflika ainsi que les généraux Mohamed Mediene dit "Toufik" et Athmane Tartag dit "Bachir", après les avoir tous trois inculpés d’"atteinte à l’autorité de l’armée" et de "complot contre l’autorité de l’Etat", sans rendre public les faits qui leur sont reprochés.

Saïd Bouteflika a été longtemps vu comme un "président-bis", accusé depuis des années d’avoir accaparé le pouvoir à mesure que déclinait la santé de son frère.

Considéré durant sa carrière comme un des hommes les plus puissants d’Algérie, "Toufik" a été durant 25 ans le chef du Département du Renseignement et de la Sécurité (DRS), jusqu’à sa mise à la retraite en 2015. "Bachir", son adjoint, lui avait succédé à la tête d’une nouvelle structure issue du DRS démantelé.

Députée depuis 1997 et décrite comme une pasionaria, Mme Hanoune a été candidate aux élections présidentielles de 2004, 2009 et 2014, toute remportées au 1er tour avec plus de 80% des votes par Abdelaziz Bouteflika.

Elle a obtenu son meilleur score en 2009, en arrivant en 2e position avec 4,22% des voix et n’a rassemblé que 1% puis 1,37% des suffrages en 2004 et 2014.

Sous couvert d’opposition virulente, Mme Hanoune a été accusée par ses détracteurs, dont une partie du mouvement actuel de contestation populaire contre le régime, de faire le jeu du "système" en participant aux élections, jugées largement frauduleuses, et en ménageant ses critiques contre le président Bouteflika.

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