En effet, les défis communs de nature socio-économique, et parfois en rapport avec les droits de l’Homme, appellent une approche globale et concertée entre les deux parties en vue de les atténuer. La prise d’assaut de la clôture métallique au niveau de la province de Nador par des immigrés clandestins a mis en lumière une nouvelle forme de défis relatifs au phénomène d’immigration clandestine, devenue de plus en plus complexe car menée par des réseaux organisés qui servent, parfois, les agendas de parties étrangères. Lors de ces événements tragiques, plusieurs cas de décès ont été enregistrés à cause des bousculades survenues aux rangs des immigrés, dont certains se sont jetés du haut de la clôture métallique. Ces événements ont davantage souligné le besoin impérieux de coopération entre les pays concernés par la problématique de l’immigration clandestine.
Ce sont ces nouveaux défis qui ont amené le Maroc et l’UE à lancer, vendredi à Rabat, un partenariat rénové en matière de migration et de lutte contre les réseaux de trafic de personnes, lors d’une rencontre entre le ministre de l’Intérieur Abdelouafi Laftit, la Commissaire européenne chargée des affaires intérieures Ylva Johansson, et le ministre espagnol de l’Intérieur Fernando Grande-Marlaska, dans le cadre du dialogue politique régulier Maroc-UE.
Ainsi, le nouveau partenariat opérationnel en matière de lutte contre le trafic de personnes entre la Commission et le Maroc couvrira notamment le soutien à la gestion des frontières, le renforcement de la coopération policière, y compris les enquêtes conjointes, la sensibilisation aux dangers de la migration irrégulière, ainsi que le renforcement de la coopération avec les agences de l’Union européenne chargées des affaires intérieures.
Contacté par la MAP, le président du Centre Atlas d’analyse des indicateurs politiques et institutionnels, Mohamed Bouden, a souligné que l’immigration clandestine constitue une importante menace pour la coopération régionale et internationale, notant que ce dangereux phénomène « dépasse les capacités individuelles des États ».
Dans ce sens, M. Bouden a relevé que cette crise de l’immigration illégale se trouve aujourd’hui accentuée par un pays du voisinage du Maroc, qui dispose d’un agenda géopolitique propre à lui et ne partage pas les mêmes préoccupations ni la même vision que les pays de l’espace euro-méditerranéen.
Certains migrants, fuyant des conditions politiques, climatiques et sécuritaires désastreuses dans leurs pays d’origine dans l’espoir d’obtenir une vie meilleure, sont victimes des réseaux de traite des êtres humains qui exploitent leur vulnérabilité pour jouer la carte du chantage, sans prendre en considération leur sécurité.
Le politologue a noté que le problème actuel n’est pas lié à la gestion des flux migratoires spontanés, mais plutôt aux modèles opérationnels et brutaux de migration, favorisés par un certain laisser-aller qui permet aux réseaux de trafic de migrants de fonctionner librement et impunément.
M. Bouden n’a pas manqué de mettre en relief l’existence de « données objectives concernant les réseaux de passeurs et les réseaux de traite des êtres humains qui traversent facilement les frontières désertiques de l’Algérie », soulignant que ce pays accueille sur son sol des milices séparatistes qui menacent la paix et la sécurité dans la région.
Le Royaume du Maroc, en raison de sa situation géographique stratégique, et étant un pays de transit et de destination, « est conscient des défis liés aux flux migratoires, et s’attaque à la question de l’immigration clandestine en se concentrant principalement sur la prévention des pertes de vies au niveau de la Méditerranée et de l’Atlantique », a-t-il fait observer.
De ce fait, le bilan de la gestion migratoire au Maroc est plein d’efforts pour sauver la vie de ressortissants subsahariens de différentes nationalités et leur apporter des secours en mer, note-t-il, saluant la rapidité et l’efficacité des initiatives marocaines tant sur les plans humain, logistique et technique que sur le plan financier.
Par ailleurs, l’expert a rappelé l’importante opération de régularisation de la situation des migrants, lancée en 2013, saluant l’intégration des ressortissants africains dans la société marocaine et leur importante contribution dans divers secteurs vitaux tels que l’éducation, la santé, l’ingénierie, l’art et le sport.
A cet égard, M. Bouden a passé en revue les efforts humanitaires, juridiques et de développement déployés par le Maroc, sous les directives éclairées de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, évoquant les investissements du Royaume dans plusieurs pays africains, en guise de contribution à la dynamique socio-économique sur le continent, ainsi que la mise en place de l’Observatoire Africain des Migrations, basé à Rabat. De plus, le Royaume engage régulièrement avec ses partenaires européens des discussions axées sur les réalités culturelles, économiques et sociales de la migration et l’actualisation des méthodes et approches adoptées en vue de s’adapter aux mutations de ce phénomène à l’avenir, a-t-il relevé.
Enfin, l’expert a abordé la difficulté de prédire les conséquences de l’afflux des migrants irréguliers, au vu de la conjoncture régionale actuelle et en l’absence d’un effort international unifié pour s’attaquer aux causes de l’immigration illégale et construire un terrain d’entente.