Pedro Sanchez, le funambule qui veut se stabiliser au pouvoir

Il est devenu chef de gouvernement sur un coup d’éclat et a résisté des mois sans majorité. Mais le socialiste Pedro Sanchez espère désormais rester au pouvoir en Espagne avec les coudées plus franches, après les élections de dimanche.

Donné pour politiquement mort après avoir perdu les législatives de 2015 et 2016, l’économiste de formation de 47 ans avait réussi à se hisser au pouvoir en juin à la surprise générale après une motion de censure couronnée de succès contre le conservateur Mariano Rajoy, coulé par un scandale de corruption.

Mais avec seulement 84 députés sur 350, il a dû ensuite gouverner sur le fil du rasoir, cherchant des accords avec Podemos (gauche radicale) et les indépendantistes catalans qui avaient voté la motion le propulsant au palais de la Moncloa.

Fragile, cette alliance a fini par se briser en février quand les séparatistes ont rejeté son budget, l’obligeant à convoquer des législatives anticipées.

Un nouveau soubresaut dans la carrière politique tourmentée du socialiste qui veut désormais capitaliser sur son expérience de chef du gouvernement, ce qu’aucun de ses rivaux n’a été, pour incarner la stabilité alors que le pays retourne aux urnes pour la troisième fois en près de quatre ans.

– Image de présidentiable –

"Il adopte une position de président et de présidentiable, en exploitant l’image de celui qui gouverne et doit avoir une posture de modération, de solidité, de sérieux" dans une campagne très agressive, estime Cristina Monge, politologue à l’université de Saragosse.

M. Sanchez bénéficie aussi, selon elle, du fait d’être "très bien installé à gauche" où il tire profit des divisions internes de Podemos et de son bilan social avec notamment une augmentation de 22% du salaire minimum.

Attaqué frontalement par la droite et l’extrême droite, qui l’accusent de "trahison" pour avoir dialogué avec les séparatistes catalans, Sanchez a contre-attaqué en agitant le chiffon rouge d’une éventuelle majorité comprenant le parti d’extrême droite Vox.

"Il est très important de concentrer tous les votes possibles sur le parti qui peut vaincre les deux droites (Parti populaire et Ciudadanos) et l’extrême droite et qui est le Parti socialiste", a-t-il encore dit mardi dans un appel au "vote utile".

Sa stratégie semble payer, les sondages le donnant largement en tête.

Ils ne le créditent toutefois pas d’une majorité absolue, ce qui l’obligera à nouer des alliances. Avec la gauche radicale, les nationalistes basques et, a priori, les séparatistes catalans. Voire avec Ciudadanos, ce qu’il n’a pas écarté malgré le refus affiché de ce parti libéral et anti-indépendantiste.

– Montagnes russes –

Né le 29 février 1972 à Madrid dans une famille aisée, père chef d’entreprise et mère fonctionnaire, Pedro Sanchez est marié et père de deux filles.

Il a étudié l’économie dans la capitale espagnole et à l’Université libre de Bruxelles, avant d’obtenir un doctorat dans une université privée assombri par des soupçons de plagiat dans sa thèse.

Joueur de basket dans sa jeunesse -il mesure 1 mètre 90-, il a pris très jeune sa carte au PSOE, a été conseiller municipal de Madrid de 2004 à 2009 puis député.

Parfait inconnu jusqu’en 2014, il crée la surprise cette année-là en se faisant élire secrétaire général du parti lors de primaires face à des politiciens chevronnés.

A la tête du PSOE, dont plusieurs poids lourds se méfient ouvertement de lui, il vit une trajectoire en forme de montagnes russes. Après les défaites aux législatives de 2015 et 2016, l’appareil se rebelle et le force à démissionner.

Mais avec une poignée de fidèles, devenus ministres pour certains, il repart à la conquête des militants et se fait réélire, en mai 2017, à la tête de la formation face à l’Andalouse Susana Diaz, sa grande rivale, soutenue par tout l’establishment socialiste.

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