Compagnies aériennes : lesquelles vont survivre ? (Capital)

Les compagnies aériennes n’avaient pas besoin du nuage de cendres. Entre la crise, la hausse du pétrole et l’offensive des low-cost, le ciel mondial s’apprête à vivre un boulever­sement. En voici les clés.

Ah, quel panache, ce Jeff Smisek ! A peine arrivé à la tête de Continental Airlines, il a récemment annoncé à ses employés qu’il ne toucherait ni salaire ni prime tant que l’entreprise ne renouerait pas avec les bénéfices. Pas même un rognon de stock-option, a-t-il juré. Il est vrai que la sixième compagnie aérienne américaine a du plomb dans l’aile.

Affaiblie par des pertes colossales (250 millions d’euros au premier semestre 2009), elle a dû se résoudre à programmer 1 700 suppressions d’emplois, soit 4% de ses effectifs. «Nous sommes en train de vivre l’un des pires hivers de la décennie», s’est justifié le boss, qui va désormais se nourrir de racines.

La plupart des patrons de compagnie devraient en faire autant : presque tous affichent des comptes dans le rouge. Selon l’Association internationale du transport aérien (Iata), les pertes cumulées du secteur ont atteint l’année dernière 2 milliards d’euros aux Etats-Unis, 2,4 en Europe (dont 814 millions pour Air France-KLM), 2,3 en Asie et 1,5 au Moyen-Orient. Et les faillites se multiplient à la vitesse du Concorde.

Après celles de la compagnie chinoise East Star Airlines, du low-cost slovaque SkyEurope et de l’italien Myair cet été, l’espagnol Air Comet et l’écossais Flyglobespan ont cessé leur activité juste avant Noël, portant à près d’une centaine en deux ans les actes de décès dans le ciel mondial. Et la liste est loin d’être close, car les prévisions de l’Iata ne sont pas fameuses : en 2010, l’ardoise des transporteurs devrait avoisiner 3 milliards d’euros en Europe et aux Etats-Unis. «Les grandes compagnies occiden­tales elles-mêmes ne sont pas à l’abri d’une faillite», prévient Olivier Fainsilber, du cabinet Olivier Wyman.

Il faut dire que la récession ne leur a pas fait de cadeau. Non seulement elle a chassé les passagers de leurs carlingues – le trafic mondial a chuté de 6,7% en 2009 et la reprise actuelle est très molle – mais elle a poussé nombre d’hommes d’affaires à délaisser les sièges business au profit de la classe éco.

En un an, la clientèle haut de gamme, de loin la plus rentable (elle génère 30% du chiffre d’affaires avec 10% des billets), a fondu de presque un quart, laminant au passage la recette moyenne par passager (– 12%). Pour ne rien arranger, les cours du pétrole, qui étaient retombés à 40 dollars le baril, se sont remis à flamber comme un réacteur. Ils flirtent aujourd’hui avec les 80 dollars et tous les observateurs s’attendent à une nouvelle poussée.

La situation est d’autant plus désastreuse pour les opérateurs traditionnels que la concurrence des low-cost est en train de tourner au jeu de massacre. Qui l’aurait imaginé ? Cette ­année, les sièges spartiates des Boeing 737-800 de Ryanair ­devraient accueillir plus de passagers que tous les avions d’Air France-KLM réunis, à la grande joie de Michael O’Leary, le turbulent patron du soldeur irlandais.

Et ce n’est sans doute qu’un début. Selon Eurocontrol, les sociétés à bas prix, qui tiennent déjà près d’un tiers du marché mondial (et 80% du trafic intra-européen hors correspondances), assureront 50% des vols d’ici 2013.

Sur les long-courriers, où ces flibustiers du ciel n’ont jamais pu prendre pied, ce sont les nouveaux tigres du Moyen-Orient qui viennent bousculer les grandes compagnies. Avec leurs montagnes de pétrodollars (en dépit des difficultés de Dubaï), leurs flottes ultramodernes et leurs hubs idéalement situés à mi-chemin entre l’Europe et l’extrême Asie, Emirates (Dubaï), Etihad (Abu Dhabi) ou Qatar Airways n’ont aucune difficulté à attirer la clientèle en proposant des billets moins chers.

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