Islam en France: Macron va-t-il dissoudre le CFCM ?

Le président français, Emmanuel Macron, n’en démord pas. il ne veut plus entendre parler du Conseil français du culte musulman (CFCM), lancé en 2003 par Nicolas Sarkozy. Pour lui, seuls les membres du Forum de l’islam de France (FORIF) compteront comme « les éclaireurs de millions de Français musulmans qui veulent croire en l’Islam et porter les valeurs de notre pays ».

Devant les 60 membres du FORIF, reçus jeudi à l’Elysée, le président français a annoncé « mettre fin au CFCM de manière très claire. Et à son activité ». L’annonce n’a surpris personne. Elle a déjà été formulée par son ministre de l’intérieur, chargé des cultes, Gérarld Darmanin. Mais la parole d’un président a son poids.

L’annonce suscite toutefois des interrogations: l’Etat va-t-il dissoudre le CFCM ? ou somme-t-il le CFCM de s’auto-dissoudre ? A en croire son co-président par intérim, Ibrahim Alci, « le CFCM, ça ne se dissout pas comme ça ». Le conseil d’administration « va se réunir et s’il veut dissoudre, ça se dissoudra », a-t-il dit, précisant que cela serait alors un processus « démocratique ».

Interrogé par Atlasinfo, un juriste nous explique, sous couvert d’anonymat, que l’annonce du président français de « mettre fin au CFCM » est « une formulation pas heureuse ». « Si c’est l’Exécutif qui veut dissoudre le CFCM,  comment compte-t-il s’y prendre ? Toute dissolution repose sur le droit », relève-t-il.

« On ne peut pas dissoudre une association juste comme ça. Le CFCM est une association régie par la loi 1901. Soit il décide de s’auto-dissoudre dans le respect de ses statuts, soit on décide de le dissoudre. Auquel cas, il faut lui notifier officiellement la décision et l’annoncer en Conseil des ministres », a-t-il indiqué.

Invité du Grand Jury LCI/RTL/Le Figaro, le dimanche 12 décembre 2021, Gérald Darmanin avait déclaré sans préavis « la mort » du CFCM, précisant qu’il n’était plus l’interlocuteur des pouvoirs publics. Le FORIF, une instance composée d’acteurs du terrain désignés par les préfets, était sur les rails.

Pour le CFCM, cette déclaration « surprenante » n’était pas « acceptable ni sur la forme ni sur le fond », estimant qu’elle n’était pas justifiée et qu’elle était « en rupture totale avec les règles et usages en vigueur dans un Etat de Droit comme le nôtre”.

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Pour le président Macron, « c’est une vraie démarche fédérative qui est conduite avec le FORIF, avec une unité de base qu’est le département (…) Il s’agit donc de réunir les forces vives de la foi musulmane et de trouver un système où les acteurs du terrain parlent des sujets du terrain ».

« les précédentes instances présentaient des limites que j’ai déjà eu l’occasion de nommer. Il y avait un dialogue qui existait, il y a eu des vraies avancées. Je ne veux pas sous-estimer ce qui avait été fait, par exemple, avec le CFCM », a-t-il dit.

« Mais, a-t-il poursuivi, l’Etat discutait bien souvent aussi avec d’autres Etats dans le cadre d’une forme de rémanence, pas simplement diplomatique, mais qui embarquait aussi toute une histoire dont il fallait progressivement sortir ».

« C’est pourquoi nous avons décidé de mettre fin au CFCM de manière très claire, et à son activité », a-t-il décrété.

Et de poursuivre: « notre conviction était que pour parler de l’Islam en France, il fallait s’appuyer sur les musulmans qui vivent en France, parce que sinon, on retombe dans cette logique, en quelque sorte d’extraterritorialité, de jeux d’influence et de propagande ».

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Le CFCM a souffert d’une série de couacs et de tensions internes. Trois fédérations, dont la mosquée de Paris, avaient bloqué la réforme du CFCM et suspendu leur participation.

Cette instance organise dimanche une assemblée générale, dont les travaux devraient être consacrés à une modification de ses statuts, notamment la suppression du quota des désignés, point d’achoppement entre les fédérations, ainsi qu’à la départementalisation déjà lancée avec la création de conseils départementaux du culte musulman afin de débarrasser le CFCM de toute référence aux pays d’origine.

Cette AG de dimanche est très attendue. La question que les observateurs se posent: quelle sera la réponse du CFCM au discours du président Macron devant le FORIF ?

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