Une Génération bien identifiée par la police

Une Génération bien identifiée par la police
Enquête Selon une note du Sdig révélée par «Libération», les militants identitaires qui ont occupé le chantier de la mosquée de Poitiers samedi étaient fichés pour activisme d’extrême droite.

Agés de 20 à 26 ans, venus de Lyon, de Nice, Toulon, Toulouse, Rouen ou encore Paris, les 73 extrémistes de Génération identitaire venus occuper le chantier de la grande mosquée de Poitiers (Vienne), samedi, avec des banderoles telles que «732, souviens-toi de Charles Martel» (qui a stoppé les Sarrazins à Poitiers), ont pour la plupart des profils de têtes brûlées. Révélée par Libération, une «note» de neuf pages sur «l’identification des auteurs de l’envahissement» du service de l’information générale (Sdig)composé d’anciens agents des Renseignements généraux, démontre que bon nombre de ces jeunes étaient «connus» de la police pour dégradations, violences, atteinte à la dignité de la personne, tags et port d’arme.

Parmi eux, ils sont même 20 à faire l’objet d’une fiche «S» (pour Sûreté de l’Etat) à la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) pour activisme d’extrême droite et hooliganisme. C’est le cas des quatre militants mis en examen lundi à Poitiers pour «provocation publique à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe» à cause de leur religion, «vols et dégradations» de tapis de prières et «organisation d’une manifestation sans autorisation préalable».

«Premier buzz». Benoît Vardon, 23 ans,fait figure de chef de file. Selon la note d’information du Sdig, ce Niçois dit avoir fondé Génération identitaire avec quatre personnes à Lyon, en juin 2012, «pour la défense de l’identité propre à chaque peuple». Et dénombre «200 membres». Il a repris le flambeau de son frère Philippe, qui avait créé voilà dix ans les Jeunesses identitaires (lire ci-contre).

C’est Benoît Vardon qui a téléphoné au «17» samedi pour avertir la police de la manifestation de son groupe à Poitiers. Et qui, d’après le parquet, a ensuite «fait le lien» entre les activistes et les autorités. Cette occupation sauvage, il la revendique comme «notre premier buzz, notre première action», et précise à la police : «On cherchait quelque chose de fort pour lancer le mouvement. Nous nous sommes arrêtés sur le cas de la mosquée de Poitiers, pour la symbolique de cette mosquée et l’histoire qu’elle représente.»

Son pote de Toulon, Julien Langella, 25 ans, aurait été identifié comme celui qui, selon le parquet, tenait le mégaphone pour lancer les slogans «proférés et repris par les 73 manifestants», comme «à Poitiers, ni kebab, ni mosquée», ou encore «Gaulois, réveille-toi, pas de mosquée chez toi». Les deux autres, Maxime Frier, 23 ans, de Saint-Fons à côté de Lyon, et Alban Ferrari, 26 ans, de Paris, qui étaient sur la terrasse de la mosquée samedi, sont suspectés d’avoir joué «un rôle actif» dans les négociations engagées avec les autorités pour évacuer les lieux.

D’après sa fiche «S», Maxime Frier aurait pratiqué le «hooliganisme» à l’Olympique lyonnais et fait le coup de poing contre l’extrême gauche autour du film anti-islam Innoncence of Muslims. De son côté, Alban Ferrari, bien que titulaire d’une fiche «S», est surtout connu de la police pour des délits de droit commun, tel qu’un «port illégal d’arme de 6e catégorie en 2005» et des «violences volontaires en 2010». Les quatre jeunes hommes ont été placés sous strict contrôle judiciaire, avec interdiction de participer à une activité en lien avec la mouvance identitaire, de sortir de leur département et de communiquer avec les autres manifestants. Le listing des 73 participants au coup d’éclat des identitaires de samedi trahit la présence massive d’activistes fichés «S» venus de Lyon.

Manuel Valls a annoncé mercredi à l’Assemblée nationale que «la dissolution de ce groupe est étudiée». Le ministre de l’Intérieur a toutefois expliqué qu’une telle interdiction «devra se faire sur des fondements juridiques solides». Pour sa défense, Génération identitaire souligne que l’occupation sauvage a été «non violente» et «calme» et a réitéré mardi sa «revendication» dans une lettre ouverte au Premier ministre, à savoir la tenue d’un référendum sur l’immigration et sur la construction de mosquées en France. Pour Manuel Valls, «ces personnes doivent s’attendre à la plus grande fermeté de la République» à cause de leur «diffusion d’un message de haine et d’intolérance».

«Réactions». La quasi-totalité de la classe politique a condamné cette action. Certains, comme Jean-Luc Mélenchon (Parti de gauche), le Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap), SOS Racisme et le Rassemblement des musulmans de France avaient appelé dès samedi dernier à la dissolution de Génération identitaire. Le Mrap et le Parti communiste du Vaucluse ont également demandé l’interdiction de la convention du Bloc identitaire, qui doit se tenir les 3 et 4 novembre à Orange.

De son côté, Marine Le Pen, s’est dite «atterrée par les réactions d’hystérie de la classe politique». Favorable aux revendications du groupuscule, la patronne frontiste dit «comprendre les craintes et les préoccupations» face à la construction de ces «gigantesques mosquées», mais «ne partage pas ce mode d’action». «J’aurais bien aimé qu’il y ait les mêmes réactions d’hystérie quand il y a eu des multiples occupations d’églises», a-t-elle lancé, en référence aux sans-papiers dans l’église Saint-Bernard à Paris, en 1996, et dans la basilique de Saint-Denis, en 2002.

Fabrice Robert, président du Bloc identitaire, a quant à lui expliqué à Minute que «cette action montre l’avancée de l’islamisation». «Toute la classe politique est prête à collaborer. Sinon, pourquoi une telle hystérie ?» feint-il de demander. Et d’ajouter :«Il y a une volonté de criminaliser le mouvement identitaire et ceux qui dénoncent l’immigration, ainsi que d’interdire tout discours contestataire.» Ou plutôt islamophobe, le Bloc identitaire s’opposant aux «mosquées cathédrales» et multipliant les actions «apéro saucisson pinard».

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite