La Chine s’empare du consulat des Etats-Unis à Chengdu après le départ des Américains
La Chine a pris possession lundi du consulat des Etats-Unis à Chengdu peu après le départ expéditif des derniers fonctionnaires américains, au terme d’un épisode diplomatique évocateur de la Guerre froide.
Chengdu contre Houston: les Américains ont eu trois jours pour évacuer leur consulat, de même qu’ils avaient donné trois jours la semaine dernière aux Chinois pour quitter leur mission diplomatique dans la métropole texane.
Symboliquement, la bannière étoilée a été descendue à l’aube à l’intérieur du complexe diplomatique de Chengdu, une cité géante de 16,5 millions d’habitants.
Dans un bref communiqué, le ministère chinois des Affaires étrangères a confirmé ensuite la fermeture du consulat et indiqué que la Chine avait « pris possession » du bâtiment à 10H00 (02H00 GMT).
Pékin avait pourtant protesté après l’entrée vendredi d’agents américains dans son consulat de Houston après le départ des fonctionnaires chinois.
Ce bâtiment est « une propriété nationale de la Chine », avait souligné le ministère chinois des Affaires étrangères, se référant au droit international.
Selon les images d’un média officiel, six fonctionnaires chinois sont arrivés lundi en minibus devant le consulat des Etats-Unis, puis sont entrés dans le bâtiment.
Ils ont été secondés par plusieurs employés visiblement chargés du nettoyage, en combinaison intégrale et le visage recouvert d’un masque de protection.
Une toile a été apposée sur un mur à l’extérieur de l’enceinte diplomatique pour cacher l’inscription « Consulat général des Etats-Unis d’Amérique ».
« Vous allez nous manquer »
Un peu plus tôt, des employés avaient quitté à pied l’enceinte diplomatique. Certains portaient un sac sur le dos tandis que d’autres poussaient leur vélo à la main.
La veille déjà, un autocar aux vitres teintées avait quitté les lieux, sous les huées d’une partie des badauds observant la scène.
« Aujourd’hui nous faisons nos adieux au consulat des Etats-Unis à Chengdu. Vous allez nous manquer à jamais », a commenté sur le réseau social Weibo l’ambassade américaine à Pékin.
Inauguré en 1985, le consulat américain de Chengdu est devenu vendredi le dernier sujet d’une longue liste de contentieux entre Pékin et Washington, lorsque la Chine a ordonné la fermeture de la mission.
Cette décision constitue la réponse du régime communiste à la fermeture forcée de son consulat de Houston par l’administration Trump, sur fond d’accusations d’espionnage.
Le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo a assuré jeudi que le consulat de Chine à Houston, quatrième ville des Etats-Unis, était une « plaque tournante de l’espionnage et du vol de propriété intellectuelle ».
« Certains employés du consulat des Etats-Unis à Chengdu se sont livrés à des activités sortant de leurs attributions, ils se sont ingérés dans les affaires intérieures de la Chine et ont mis en danger la sécurité et les intérêts chinois », a accusé en réponse la diplomatie chinoise.
Photos, drapeaux et noms d’oiseaux
Ces représailles mutuelles interviennent dans un contexte de dégradation des relations sino-américaines, les pommes de discorde s’étant multipliées ces derniers mois: répression à Hong Kong avec l’entrée en vigueur d’une loi controversée sur la sécurité, pandémie de Covid-19 et tensions en mer de Chine méridionale notamment.
A la veille de sa fermeture, le consulat de Chengdu était dimanche une attraction pour les habitants de la métropole du sud-ouest de la Chine.
Sous une chaleur étouffante, un flot ininterrompu de curieux est venu se faire photographier devant le bâtiment. Certains agitaient un drapeau chinois, ont constaté des journalistes de l’AFP.
Une certaine tension était palpable au sein des forces de sécurité, qui ne toléraient aucun geste provocateur ou signe de joie trop manifeste face au départ des Américains. Un jeune homme qui hurlait « Je suis Chinois! Allez la Chine! » a ainsi été évacué par deux policiers.
Des journalistes de l’AFP ont par ailleurs vu une banderole confisquée par la sécurité. Mais un riverain a toutefois pu déployer sur son balcon un imposant drapeau chinois et crier le nom de son pays.
Certains reporters étrangers ont de leur côté essuyé des noms d’oiseaux.
Outre leur ambassade à Pékin, les Etats-Unis comptent désormais quatre consulats en Chine continentale (Canton, Shanghai, Shenyang, Wuhan) ainsi qu’un à Hong Kong, territoire autonome secoué l’an dernier par des manifestations monstres contre le pouvoir central.
Pékin avait alors vu la main de Washington derrière ces troubles.
Des nationalistes chinois ont réclamé la semaine dernière la fermeture du consulat des Etats-Unis à Hong Kong.