France: la justice ordonne un procès pour l’oncle de Bachar al-Assad
Rifaat al-Assad, l’oncle du président syrien Bachar, devra comparaître devant un tribunal en France, cinq ans après le début d’une enquête qui s’est attachée à remonter à l’origine douteuse de son vaste empire immobilier, au coeur d’une stratégie de « dissimulation » selon la justice.
Résident britannique, partageant sa vie entre la France et Londres, le frère de l’ex-président syrien Hafez al-Assad est soumis depuis sa mise en examen (inculpation) en juin 2016 à un contrôle judiciaire qui limite ses déplacements.
Depuis la première plainte de l’ONG Sherpa, qui avait déclenché l’ouverture d’une information judiciaire en avril 2014, la justice française cherchait à comprendre comment l’oncle de Bachar al-Assad, qui se disait sans "aucune fortune" en Syrie, avait pu amasser un vaste empire immobilier en Europe, évalué pour la France à 90 millions d’euros.
Le juge s’est notamment appuyé sur des témoignages évoquant des "détournements syriens (…) à l’époque où il occupait des fonctions officielles importantes", selon son ordonnance de renvoi signée le 15 avril, dont a eu connaissance l’AFP.
Rifaat al-Assad a toujours fermement contesté ces accusations "qui reposent sur des analyses parfaitement erronées, des raccourcis et des témoignages d’opposants politiques historiques qui se contredisent", avaient déclaré à l’AFP ses avocats Pierre Haïk, Pierre Cornut-Gentille, Julien Visconti et Benjamin Grundler, le mois dernier, après les réquisitions du parquet national financier.
Ancien pilier du régime, Rifaat al-Assad fut le chef des forces d’élite de la sécurité intérieure, les Brigades de défense, qui avaient durement réprimé en 1982 une insurrection islamiste à Hama ayant fait entre 10.000 et 40.000 morts, selon les estimations. Deux ans plus tard, il est contraint à l’exil, après un coup d’État manqué contre son frère, qui a tenu le pays d’une main de fer de 1971 à 2000.
A son arrivée en Europe, l’homme mène un train de vie fastueux avec ses quatre épouses, une dizaine d’enfants et 150 à 200 fidèles venus à sa suite. En France notamment, il amasse un patrimoine conséquent: deux hôtels particuliers, dont l’un sur la prestigieuse avenue Foch à Paris, une quarantaine d’appartements dans les beaux quartiers de la capitale française, un haras et un château au nord de Paris, 7.400 m2 de bureaux à Lyon (centre-est), des biens pour la plupart saisis.
Son empire immobilier rayonne aussi jusqu’en Grande-Bretagne et surtout en Espagne, où plus de 500 propriétés ont été saisies, évaluées à hauteur de 691 millions d’euros. Le tout acquis avec une "volonté de dissimulation", cingle le magistrat.