Dialogue national de l’urbanisme et de l’habitat : les explications de la ministre Fatima Ezzahra El Mansouri
Mme Fatima Ezzahra El Mansouri, ministre de l’Aménagement du territoire national, de l’urbanisme, de l’habitat et de la politique de la ville, explique dans une interview à la MAP les objectifs et les ambitions liées à ce Dialogue ainsi que l’importance des activités et ateliers devant être organisés à cette occasion.
1- Dans quel contexte s’organise le Dialogue national de l’urbanisme et de l’habitat ?
J’aimerais tout d’abord faire part de mon bonheur après que le Dialogue national de l’urbanisme et de l’habitat ait été honoré par le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI.
Les travaux de ce Dialogue national ont été lancés le 16 septembre, sous la présidence du Chef du gouvernement , en présence des ministres concernés, ainsi que des représentants de nombreuses institutions constitutionnelles, instances publiques et organisations professionnelles.
L’organisation de ce Dialogue intervient en application des orientations royales appelant à la nécessité de lancer une réflexion et un débat publics sur l’importance de la coordination dans l’élaboration des politiques publiques, et de favoriser la convergence entre les différentes interventions sectorielles, en vue de réaliser le développement, tous domaines confondus, et réduire les disparités spatiales, économiques et sociales.
De même, l’organisation de ce Dialogue national s’inscrit dans le cadre de la philosophie du Nouveau modèle de développement, qui recommandait une approche de construction commune et l’adoption d’une nouvelle vision de l’urbanisme et de l’habitat qui prend en compte les interactions sociales et fonctionnelles des espaces et leur gestion durable.
Ce dialogue se veut également une illustration de la méthodologie du gouvernement dans la mise en œuvre de son programme, qui repose sur trois axes, à savoir le renforcement des piliers sociaux de l’État, l’accompagnement de la transformation de l’économie nationale pour encourager l’investissement et la création de l’emploi en sus du renforcement de la gouvernance.
L’initiative du ministère de lancer un Dialogue national de l’urbanisme et de l’habitat vient créer une rupture avec des approches qui ont fait preuve de leurs manques, au niveau du paysage général et de qualité architecturale de nos espaces ou encore au niveau de la gestion, notamment en ce qui concerne les contraintes liées à la bureaucratie, la multiplicité des intervenants et la désuétude des textes juridiques.
2- Quels sont les objectifs du Dialogue national de l’urbanisme et de l’habitat ?
Le secteur de l’urbanisme et de l’habitat a fait un saut qualitatif au cours des deux dernières décennies et a réalisé de grands acquis, mais il fait encore face à de nombreuses contraintes. Il ne faut pas le percevoir sous un angle uniquement technique, mais plutôt comme un secteur multidimensionnel économiquement, socialement et culturellement, en ce sens qu’il constitue une locomotive pour stimuler l’économie, relancer l’investissement et créer de l’emploi. Ce secteur contribue également à l’amélioration des conditions de vie des citoyennes et des citoyens.
Ainsi, l’objectif principal du Dialogue national réside dans l’élaboration d’une nouvelle feuille de route dans les domaines de l’urbanisme et de l’habitat, à la lumière des recommandations et propositions formulées par les différents forums de consultation nationales et régionales. Cette feuille de route vise à contribuer à la mise en œuvre du Nouveau modèle de développement et à l’établissement d’un cadre de référence national pour un développement urbain juste et durable.
La feuille de route prévoit également de proposer une offre de logements prenant en compte les exigences sociales, économiques et spatiales, ainsi que de préparer un programme renouvelé d’appui dans le but de développer des espaces ruraux urbains inclusifs et résilients.
3- Quid de l’approche adoptée pour organiser ce Dialogue national ?
Soucieux d’impliquer toutes les parties et de mettre en œuvre les dispositions du Nouveau modèle de développement et de la régionalisation avancée, en application des Hautes instructions royales, nous avons adopté une approche participative pour organiser les activités de ce Dialogue national basée sur des consultations avec tous les acteurs du domaine de l’urbanisme et de l’habitat notamment les départements ministériels, les institutions publiques, les instances élues et professionnelles, la société civile et les experts spécialisés, aussi bien au niveau national que régional.
A cet effet, une commission nationale a été créée en tant que cadre institutionnel regroupant les différents acteurs concernés issus de l’ensemble des intervenants, afin de proposer une feuille de route à la lumière des recommandations qui seront formulées à l’issue de toutes les étapes de concertation nationales et régionales.
Pour rappel, ces consultations régionales seront organisées le même jour au niveau de toutes les régions du Maroc, le 21 septembre.
4- Quelles sont les stratégies et les principaux axes abordés et quelles sont les attentes portées sur ce Dialogue ?
Le Dialogue national de l’urbanisme et du logement abordera quatre grands axes : la planification et la gouvernance, l’offre de logements, l’accompagnement du monde rural et la réduction des disparités spatiales, ainsi que l’amélioration du paysage urbain et du cadre bâti.
– Atelier thématique sur la planification et la gouvernance :
En fait, le secteur de l’urbanisme et les mécanismes d’aménagement du territoire reposent sur des textes juridiques désuets. Malgré cela, le système de planification actuelle a permis de réaliser un ensemble d’acquis importants, d’accompagner la mise en œuvre des programmes sectoriels et la réalisation des projets structurants du pays.
Cependant, le système de planification territoriale et les mécanismes de gouvernance ont révélé leurs limites et généré un certain nombre de problèmes liés aux délais de production des documents de l’urbanisme, à la multiplicité des intervenants, à la justice immobilière, en plus de la gouvernance et des problèmes liés aux permis de construire.
Nous souhaitons aujourd’hui engager dans une action commune avec l’ensemble des acteurs, partenaires, élus, professionnels et société civile afin de formuler des recommandations et de mettre en œuvre des politiques publiques qui devraient améliorer les conditions de vie de la population, encourager les investissements, créer des opportunités d’emploi et rapprocher l’administration des citoyens.
– Atelier d’amélioration du paysage urbain et du cadre bâti :
L’atelier thématique « Amélioration du paysage urbain et du cadre bâti » sera l’occasion d’approfondir la réflexion sur les réformes vers une nouvelle vision liée au cadre bâti portant notamment sur la prise en charge de l’habitat insalubre, la politique de la ville en tant que contenant pour le cadre bâti, la préservation et la valorisation et du cadre bâti patrimonial, ainsi que l’examen des questions de qualité et de durabilité.
Les différentes discussions qui seront engagées lors de cet atelier devraient déboucher sur des réponses adéquates concernant les nouvelles orientations, les approches préventives et correctives à adopter pour renforcer la valorisation du patrimoine national, assurer la qualité, la durabilité et l’attractivité des territoires et améliorer les conditions de vie des citoyens.
– Atelier de l’offre de logement :
Pour ce qui est de l’offre de logement, marqué par un nouveau contexte lié à l’achèvement du contrat des programmes de logements sociaux, outre la hausse des prix des matériaux de construction et les attentes renouvelées des ménages, il y a lieu de répondre aux besoins exprimés en la matière et présenter des prix de vente adaptés au pouvoir d’achat des familles. A cet effet, nous avons lancé une discussion sur la problématique de l’accès au logement, et nous espérons que ce Dialogue sera une étape à même de définir les contours de nouveaux programmes de logements et d’afficher les besoins régionaux en la matière.
– Soutien du monde rural et réduction des disparités spatiales :
Les zones urbaines sont aujourd’hui des espaces de vie pour près des deux tiers de la population dans 365 villes et centres urbains. Ce taux devrait atteindre environ 75% d’ici 2030 et contribuera à 75% du Produit intérieur brut et 70% des investissements et employer 43% de la population active dans un territoire qui ne dépasse pas 2% du total de la superficie du pays.
Dans ce contexte, l’État œuvre à renforcer les villes intermédiaires, qui regroupent 5,7 millions de personnes dans une soixantaine de villes, pour gagner le pari de redistribuer les systèmes économiques formés par les grandes villes, et alléger les charges qui pèsent sur elles. S’agissant des petites villes de moins de 50.000 habitants, et regroupant ensemble près de 4 millions d’habitants, elles sont présentées comme un élément d’équilibre pour réduire les écarts entre les zones rurales et urbaines.
Notre objectif actuellement est de trouver des solutions pour réduire les disparités spatiales et surmonter les contraintes du développement structurel du système urbain.
5- Comment les citoyens peuvent-ils réellement participer à ce Dialogue national ?
Notre objectif est d’impliquer tous les citoyens dans ce Dialogue national de l’urbanisme et de l’habitat. A cet effet, une plateforme numérique a été lancée au profit de tous les citoyens, afin d’assurer une large participation à ce Dialogue qui connaitra la tenue de réunions consultatives, le mercredi 21 septembre au niveau de toutes les régions du Royaume.
Cette plateforme numérique vise à ouvrir la voie à tous les citoyens et forces vives de notre pays, pour apporter leurs avis et propositions, enrichir ce Dialogue national et aboutir à des recommandations à même d’élaborer une nouvelle politique en matière de l’urbanisme et de l’habitat.