Maroc-France : trois questions à Quiterie Pincent, directrice de l’AFD au Maroc
Un des leviers de promotion de la coopération pour le développement, l’Agence française de développement (AFD) s’est rapidement mise au diapason de la nouvelle dynamique des relations maroco-françaises, en étendant ses actions aux provinces du sud du Royaume.
Dans un entretien à la MAP, la directrice de l’AFD au Maroc, Mme Quiterie Pincent, revient sur les réalisations de l’AFD au Maroc au titre de l’année 2024, les secteurs bénéficiaires ainsi que les actions futures à entreprendre cette année, en consécration du nouveau cap franchi à l’occasion de la récente visite au Royaume du Président français, Emmanuel Macron.
1- Pouvez-vous présenter le bilan de l’AFD pour l’année 2024 ? Quels secteurs clés ont bénéficié de vos interventions ?
L’année 2024 a marqué en effet une nouvelle étape pour l’AFD au Maroc, avec un engagement financier de 536 millions d’euros dans différents secteurs au cœur du partenariat France–Maroc et l’annonce par le Président de la République de l’extension du mandat de l’AFD au sein des régions du sud du Maroc.
Les opérations financées en 2024 reflètent l’engagement de l’Agence pour accompagner le Maroc dans sa transformation, tout en traduisant les aspirations de nos deux pays à bâtir un partenariat qui dépasse les dimensions traditionnelles de la coopération.
Sur le plan économique et environnemental, notre engagement s’est accéléré dans le cadre de partenariats stratégiques tels que celui avec le Groupe OCP. En 2024, l’AFD a ainsi approuvé un financement de 350 millions d’euros, jalon significatif vers un modèle industriel plus durable qui reflète l’ambition du Maroc dans les industries durables et l’innovation climatique au service de la sécurité alimentaire du continent. L’AFD accompagne également la plateforme Agrifinance portée par InnovX afin d’appuyer le renforcement des filières agricoles en Afrique.
De même, l’AFD a mobilisé une subvention de 0,8 millions d’euros pour le développement de l’innovation dans le domaine de l’hydrogène décarboné en accompagnant l’Institut de Recherche en énergie solaire et énergies nouvelles (IRESEN). L’année 2024 a également été celle du premier prêt direct de l’AFD à une région au Maroc, avec l’octroi d’un financement de 26 millions d’euros (25 M€ en prêt et 1 M€ en subvention) à la région de Guelmim-Oued Noun en accompagnement de son programme de développement régional durable et inclusif tout en promouvant l’attractivité du territoire. En matière sociale, nous avons renforcé notre soutien à des réformes majeures, notamment l’élargissement de la couverture de l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO), avec un financement qui s’élève à 102,6 millions d’euros.
Par ailleurs, nous poursuivons notre soutien d’un montant de 51,5 millions d’euros à la budgétisation sensible au genre (BSG) pour permettre d’inscrire plus durablement encore l’égalité entre les femmes et les hommes au cœur des politiques publiques.
2- L’AFD est un partenaire stratégique pour de nombreux acteurs publics et privés au Maroc. Quels moyens déployez-vous pour renforcer ces partenariats ?
Le dialogue permanent que nous entretenons avec les institutions et entreprises publiques marocaines, notamment dans les secteurs de l’énergie, de l’agriculture, de l’eau et de l’éducation permet d’ancrer nos interventions dans une logique de long terme.
Notre approche partenariale repose également sur une synergie entre les différentes entités du groupe AFD (AFD, Proparco et Expertise France). Aujourd’hui, 80 personnes du Groupe AFD sont présentes au Maroc pour travailler avec nos partenaires publics et privés à la construction de solutions de développement durables.
En 2024, le Groupe AFD a ainsi soutenu des initiatives stratégiques comme « l’Accélérateur d’Investissements Maroc-France », une collaboration entre le Fonds Mohammed VI pour l’investissement, l’AFD, Proparco, Expertise France, STOA et BPI France, qui soutient l’écosystème des PME marocaines et stimule les investissements durables.
Nous intervenons également avec une vision de long terme dans l’appui à la structuration des écosystèmes industriels à fort impact. Ainsi, nous poursuivons notre partenariat de long terme dans des projets innovants, tels que l’appui au plan Maroc Rail 2040 à travers la préparation de nouvelles opérations visant à accompagner la formation professionnelle dans le domaine du ferroviaire ainsi que le financement de l’extension de la LGV dont nous avons d’ores et déjà financé la première phase.
Enfin, l’AFD soutient à hauteur de 30 millions d’euros les organisations de la société civile (OSC) marocaine et internationale pour renforcer leur contribution au développement inclusif du pays.
3- Quelles actions futures envisagez-vous d’entreprendre au cours de l’année 2025 ?
L’année 2025 s’inscrit dans la continuité des avancées réalisées en 2024. Nous souhaitons cependant ouvrir de nouvelles perspectives pour accompagner le Maroc dans la réalisation de ses ambitions stratégiques, notamment en étendant l’action de l’AFD aux régions de Laâyoune-Sakia El Hamra et de Dakhla-Oued Eddahab.
En 2025, nous concentrerons nos efforts sur trois axes stratégiques majeurs à savoir, la gestion durable des ressources naturelles, le développement durable des territoires et le verdissement des infrastructures, ainsi que le renforcement des compétences, du capital humain et de la cohésion sociale.
Nos interventions continueront également de promouvoir l’éducation et la formation professionnelle pour répondre à la nécessité de doter les jeunes générations des compétences nécessaires à un marché du travail en mutation et de soutenir l’autonomisation économique des femmes et des jeunes.
Ces actions traduisent notre vision d’un partenariat résolument tourné vers l’avenir, où l’AFD joue un rôle central en soutenant des initiatives à la fois inclusives et innovantes, en phase avec les priorités du Maroc et les aspirations de sa population.
Nous poursuivrons enfin le dialogue avec les partenaires marocains publics et privés sur la construction de solutions de développement durables en Afrique avec nos partenaires dans différents pays du continent, valorisant ainsi nos expertises communes dans le cadre d’un dialogue élargi.