Professeur décapité en France: le rôle de l’islamiste radical Abdelhakim Sefrioui en ligne de mire
Abdelhakim Sefrioui a participé à la mobilisation locale contre le professeur Samuel Paty, assassiné et décapité. L’islamiste radical est Fiché S et bien connu des services de renseignement français.
La présence du militant islamiste radical Abdelhakim Sefrioui parmi les onze personnes gardées à vue dans le cadre de l’enquête ouverte sur l’assassinat de Samuel Paty est venue samedi renforcer les soupçons d’une éventuelle implication de mouvements islamistes radicaux notamment actifs sur les réseaux sociaux dans la décapitation du professeur d’histoire par un jeune Russe tchétchène de 18 ans.
Imam autoproclamé, libraire, soutien de Dieudonné, prédicateur, pro-Hamas et militant antisioniste virulent, Abdelhakim Sefriouia a été interpellé avec sa compagne à Évry et placé en garde à vue, samedi 17 octobre. Les enquêteurs tentent de déterminer le rôle de ce Franco-Marocain dans l’attentat de Conflans-Sainte-Honorine.
Ces mouvements islamistes « minoritaires, cherchent à convaincre les musulmans que la France serait un pays islamophobe. Ils cherchent à les instrumentaliser, à créer un conglomérat », affirme à l’AFP Laurent Nuñez, le coordonnateur national du renseignement et de la lutte antiterroriste. « Et au moindre incident, ils se mettent à l’oeuvre ».
Connu des services, M. Sefrioui est le fondateur du collectif Cheikh Yassine (du nom du fondateur du Hamas, tué par l’armée israélienne en 2004). Début octobre, il avait accompagné au collège où exerçait M. Paty le père d’une élève pour demander le renvoi de l’enseignant qui avait montré des caricatures du prophète Mahomet à ses élèves.
Se présentant comme « membre du Conseil des imams de France », il avait aussi diffusé il y a quelques jours sur Youtube une vidéo dans laquelle il dénonçait le professeur, en le qualifiant de « voyou ».
C’est également lui qui avait interrogé, dans une autre vidéo diffusée sur la même plateforme, la fille du parent de l’élève, qui ne suivait pas en réalité les cours de l’enseignant décapité, et appelé à la mobilisation.
A l’origine d’une longue série d’interventions, toujours menées de façon à agiter les foules, à attiser l’opinion pour attirer l’attention sur sa vision radicale de l’islam, le fait qu’il se soit joint à l’initiative du père de la jeune fille n’est donc ni un hasard ni une première. Cela correspond à sa manière de se servir d’un cas particulier pour relayer sa propagande.
Selon Marianne, Il se fait repérer par les renseignements au début des années 2000, en tant que président de l’association culturelle des musulmans des Ulis, où il devient le leader d’une contestation communautaire qui cherche la modification d’un projet de mosquée entrepris par la commune. Ses méthodes sont celles de « l’agit-prop » : il multiplie les appels à manifester et harcèle la municipalité.
Une atmosphère haineuse sur les RS
Une atmosphère haineuse sur les réseaux accompagnée d’une résurgence des mouvements islamistes radicaux, selon Laurent Nuñez qui pointe le contexte: « le procès Charlie, la republication des caricatures et le discours du président Macron sur une prochaine loi destinée à renforcer la laïcité et à lutter contre le séparatisme islamiste ».
Le procès est celui des complices des assaillants des attentats de janvier 2015 contre Charlie Hebdo, qui avaient tué 12 personnes, là encore en représailles après la publication de ces mêmes caricatures.
Après l’attaque au hachoir perpétrée fin septembre devant les anciens locaux de Charlie Hebdo par un jeune Pakistanais, une source sécuritaire avait expliqué à l’AFP que c’était « la republication des caricatures plutôt que le procès qui avait joué dans l’aggravation des menaces ».
« La volonté de frapper l’Occident est intacte » mais « entre ceux qui sont décédés et ceux qui sont incarcérés », la capacité d’action des groupes terroristes est « très réduite », avait-elle ajouté en insistant sur la menace endogène venue d’individus agissant seuls.
Contrôler l’islamosphère
« Depuis un mois particulièrement, il y a convergence et mobilisation de trois courants d’islamistes: +Les musulmans+ dirigé par Marwan Muhammad, ancien porte-parole du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), le CCIF, et +Baraka City+ », a confirmé à l’AFP une source proche du gouvernement.
Le président de cette association caritative musulmane, Driss Yemmou, a été placé plutôt cette semaine sous contrôle judiciaire avant d’être jugé pour harcèlement sur les réseaux sociaux contre une journaliste.
« Depuis deux semaines », a commenté la source proche du gouvernement, le « taux de pénétration » des trois courants sur les réseaux sociaux est « particulièrement important ».
Ces mouvements « ont pris aujourd’hui le lead de l’islamosphère, avec une démarche politique, religieuse, radicale, de haine contre la France », ajoute cette même source.
« Pour eux, la France est un Etat raciste, islamophobe, le pays impie et mécréant absolu », insiste-t-elle, « ils veulent le chaos et la guerre civile pour élaborer un nouvel ordre autour de la charia. Ils s’inscrivent dans une démarche violente ».
Selon cette même source, le discours récent d’Emmanuel Macron sur le séparatisme islamiste a accentué leur colère.
« Le passage à l’acte de ce jeune (le tueur de Conflans, ndlr) s’inscrit dans ce sillon-là », estime-t-elle.