Guerre de succession sur les murs cairotes (Libération)
L’après-Hosni Moubarak est lancée. Des affiches présentant le chef des services secrets en rival du fils du raïs troublent le jeu.
Ce discret militaire de 74 ans est souvent présenté par les analystes comme un successeur possible du président égyptien, âgé de 82 ans et dont la santé inspire de grandes inquiétudes depuis son hospitalisation surprise, au printemps, en Allemagne, pour l’ablation de la vésicule biliaire et d’un polype à l’intestin. Selon les rumeurs, le raïs égyptien pourrait être atteint d’un cancer.
Mais ce battage médiatique n’est pas du goût de certains caciques du parti, qui ont rappelé que le candidat de ce dernier pour la présidentielle de 2011 restait Hosni Moubarak. L’apparition surprise, jeudi, des affiches en faveur d’Omar Suleiman a visiblement semé confusion et fureur au sommet de l’Etat. Suite à des pressions, le quotidien indépendant al-Masry al-Youm, qui avait publié un article à ce sujet sur son site internet, l’a retiré, et ses exemplaires déjà imprimés ont été saisis.
Selon l’agence Reuters, les initiateurs de la campagne pro-Suleiman, qui restent anonymes, souhaitaient ainsi demander à l’armée de sauver le pays «de la honte d’une succession souhaitée par le fils du Président». Mettant en rivalité deux membres du premier cercle du raïs, son fils et son bras droit, ces affiches rappellent au passage le poids de l’armée en Egypte, dont tous les présidents sont issus, et dont nul ne sait si elle approuverait une succession dynastique. Un scénario qui semble se mettre en place depuis la révision de la Constitution en 2007, taillée sur mesure pour ouvrir le chemin à Gamal Moubarak. Régulièrement interpellé, ce dernier a toujours nié avoir des ambitions présidentielles.
Quant à Hosni Moubarak, il s’est tenu avec constance à distance de ce débat, certains bons connaisseurs de la politique égyptienne affirmant même qu’il ne serait pas personnellement favorable à cette hypothèse. Mais la présence à ses côtés de Gamal, cette semaine, à l’Elysée, puis à la Maison Blanche, lors de la relance du processus de paix israélo-palestinien, est perçue en Egypte comme un signal fort en faveur d’un passage de bâton du père au fils. Le quotidien israélien Haaretz assure que le fils d’Hosni Moubarak devait également s’y entretenir avec les responsables israéliens présents. Une forme «d’adoubement international», craint l’opposition égyptienne. Cette guerre des affiches montre néanmoins que la question n’est peut-être pas tranchée, et qu’elle pourrait diviser jusqu’à la garde rapprochée du raïs.