Au coeur de cette bataille de leadership entre les différentes sensibilités qui composent l’Islam de France, la grande problématique du mode de scrutin Mohamed Moussaoui lui même reconnait la nécessité d’y apporter une grande reformes. Sauf que contrairement aux thuriféraires du boycott et de report des ces élections, il avait proposé d’en faire un grand chantier de travail, de réflexion et de reformes du prochain mandat du CFCM et non une condition de son renouvellement.
Même si certains observateurs du fait religieux musulman français soulignent la séquences de crise que traverse une organisation comme le CFCM, ils sont très peu nombreux à remettre en cause la personnalité même de son President, Mohamed Moussaoui. En l’espace d’une courte période, cet universitaire provincial aura réussi à donner à organisation ses lettres de noblesse.
Ni trop spectaculaire pour créer des jaloux et des envieux, ni trop discret pour tomber dans l’oubli et l’inefficacité, Mohamed Moussaoui a réussi à trouver son rythme et à celui de l’expression de son organisation. Sur le débat sur la laïcité organisé par le patron de l’UMP Jean Francois Copé, lui même poussé dans son inspiration de la dénonciation spectaculaire de Marine Le Pen des prières de rue, Mohamed Moussaoui avait forcé l’admiration de ses détracteurs en résistant aux sourdes pressions pour venir cautionner ce débat à forte tonalité politicienne. Ce qui avait fait qu’en l’absence de cette élite musulmane française, le débat sur la laïcité tournait à la polémique confidentielle.
Mohamed Moussaoui a une explication intéressante pour éclairer la phase de tension que traverse le CFCM. Il refuse de parler de crise de fonctionnement ou d’identité mais plutôt de crise de croissance d’une organisation représentative qui doit dérouler son rythme et ses ambitions. Pour lui, ce qui explique ses tensions, au delà de la compétition des égos qui est normale dans toute entreprise de représentation, c’est que les structures compostantes de l’islam de France avaient trop longtemps l’habitude de fonctionner en autonomie, d’avoir leurs propres agendas et leur propre logique interne. Avec une organisation comme le CFCM, certains ont du se sentir bridés par la discipline, le processus de décision qu’impose une organisation à vocation nationale et dont l’ultime raison d’être est celui d’incarner le rôle d’unique interlocuteur de l’Etat pour tout ce qui touche le culte musulman. Mohamed Moussaoui résume cette situation par cette phrase: "Cette instance, comme toutes les structures en phase de construction, nécessitera encore du temps pour permettre à chaque composante de s’y retrouver".
La réaction de la Mosquee de Paris dont le recteur Dalil Boubaker ne s’est jamais remis de la perte de la présidence du CFCM en 2008 fut révélatrice de cette posture de rupture et de défi à l’encontre de la nouvelle physionomie du conseil :" La Grande Mosquée de Paris prend acte de ces élections tout en contestant la légitimité que souhaitent s’arroger les initiateurs de ce scrutin. En effet, une seule équipe a eu le « terrain électoral » à elle seule. Et comme dit le Cid de Corneille : « A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. »
Mohamed Moussaoui ne semble pas être atteint par une telle charge. Pour lui, les grands chantiers à venir pour le CFCM méritent tous les investissements. Parmi ses dossiers urgents à traiter, la reforme du mode de scrutin pour préparer les échéances à venir, la problématique des filières de Halal pour clarifier et moraliser un secteur en grande croissance, la construction des lieux de cultes pour garantir une dignité à l’acte de prier et le travail sur une base de données statistiques spécifiques des actes anti musulmans pour convaincre les pouvoirs publiques de prendre des mesures spécifiques comme ils l’avaient fait pour la communauté juive lorsque la recrudescence d’acteur anti-sémites a été constaté et vérifier statistiquement.