Nouveau modèle de développement et MRE: 5 questions au secrétaire général du CCME Abdellah Boussouf
Le secrétaire général du Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME), Abdellah Boussouf livre son décryptage et sa lecture du rapport sur le nouveau modèle de développement (NMD) et le rôle des MRE.
Dans le rapport général de la Commission spéciale sur le modèle de développement (CSMD), présenté la semaine dernière devant le roi Mohammed VI, les Marocains résidant à l’étranger (MRE) figurent parmi les cinq leviers importants pour l’amorçage du nouveau modèle de développement (NMD) et l’accompagnement de sa mise en œuvre.
1. La CSMD a appelé à des politiques adaptées aux attentes des Marocains du monde. Quelles seraient les réformes à déployer pour donner corps à cette vision ?
Abdellah Boussouf : En premier lieu, je tiens à remercier les membres de la Commission, dont plusieurs sont issus de la communauté marocaine à l’étranger, d’avoir rappelé la place centrale des Marocains du monde comme levier pour le développement humain et économique dans le Royaume.
Tenant compte de la transversalité des questions liées aux MRE, notre approche au CCME depuis sa création repose sur le plaidoyer pour une politique publique globale et intégrée qui implique la dimension migratoire dans tous les secteurs, pour répondre à leurs attentes, d’une part, et mobiliser leurs compétences dans tous les domaines, d’autre part.
Le rapport de la Commission spéciale sur le modèle de développement a souligné plusieurs sujets de grande importance dans lesquels les Marocains de monde peuvent apporter leur savoir-faire afin de participer au développement de la Nation.
La commission a formulé des propositions pertinentes en ce qui concerne la politique d’attrait envers les Marocains du monde hautement qualifiés opérant dans les secteurs de pointe, tels que les TIC, la biotechnologie ou les énergies renouvelables, ou encore la mise en place d’une agence marocaine de l’action culturelle à l’étranger.
La concrétisation de cette proposition passe avant tout par un cadre législatif qui facilite l’implication des compétences de retour et garantit le bien-être de leur famille, en tenant en compte de leur situation professionnelle dans les pays d’accueil.
Toutefois, les propositions de la Commission, ainsi que les propositions des autres acteurs institutionnels, ont besoin pour être concrétisées d’un engagement gouvernemental à travers des politiques et des décrets d’application de chaque projet proposé.
2. Comment peut-on attirer les profils hautement qualifiés ?
Dans une conjoncture marquée par une concurrence acharnée au niveau international en matière des compétences hautement qualifiées, le Maroc est invité à mobiliser non seulement les acquis économiques et institutionnels réalisés lors des deux décennies de règne de SM le Roi, mais aussi de renforcer les liens culturels et émotionnels qui lient fortement les Marocains du monde à la mère patrie.
Pays émergent et porte d’entrée en Afrique dotée d’infrastructures aux normes internationales, le Maroc est capable de présenter des offres concurrentielles pour attirer les compétences hautement qualifiées dans des domaines scientifiques de pointe.
Il convient, avant tout, d’entreprendre une stratégie en ce sens et de veiller à l’harmonisation du cadre juridique et institutionnel, de manière à répondre aux exigences en termes de développement de carrière et d’innovation similaires à celles proposées par d’autres pays, notamment les pays du Golfe, une destination de plus en plus prisée par les compétences issues de l’immigration marocaine en Europe.
3. La CSMD recommande la création d’une Agence marocaine de l’action culturelle à l’étranger. Quelles seraient ses principales missions ?
Sur ce point, la Commission et le CCME sont sur la même longueur d’onde. L’agence souhaitée, qui devrait englober et coordonner toutes les actions culturelles visant les Marocains du monde, veillera à encourager la réalisation de produits culturels à l’essence marocaine dans les langues d’accueil.
Ainsi, la production culturelle marocaine dans ses différentes formes sera destinée non seulement aux Marocains du monde, mais à travers eux au public international, ce qui va permettre à notre culture d’exister dans les estrades internationales.
Pour ce faire, la production culturelle nationale est invitée à mettre la lumière sur la diversité de notre culture empreinte des valeurs de diversité, de pluralisme et de l’acceptation de l’autre.
4. De quelle manière la diaspora peut-elle contribuer encore plus à l’essor économique et social du Maroc ?
Le contexte de la pandémie a montré à quel point les MRE sont disposés à soutenir leur pays d’origine dans les moments les plus difficiles. Contrairement à toutes les prévisions financières, leurs transferts ont atteint un record, comme le souligne un rapport de l’Office des changes.
Tous les secteurs d’activités témoignent que les transferts financiers de nos compatriotes à l’étranger contribuent à l’équilibre de la balance des paiements, mais il faudra que les décideurs se rendent compte que pour réaliser le développement de notre pays, le rôle des expatriés ne se résume pas uniquement aux transferts.
Grâce à leur présence dans plus de 50 pays dans le monde, notre diaspora fait connaître les produits marocains auprès du public international. Ils œuvrent, d’autre part, à rapprocher leurs région d’origine et les régions dans lesquelles ils résident à travers des conventions de partenariat dans le domaine social et solidaire, ainsi que les accords de jumelages entre des villes marocaines et d’autres dans les pays de résidence.
De plus, leurs activités professionnelles offrent la possibilité de conclure des partenariats entre les entités économiques et commerciales dans les pays d’accueil et les entreprises marocaine, ce qui fait des Marocains du monde un pont entre le Royaume et le reste du monde.
5. Enfin, quel sera le rôle du CCME dans la prochaine étape ?
La Commission spéciale sur le modèle de développement réitère dans son rapport l’importance de la mise en œuvre des dispositions constitutionnelles, pour une meilleure représentation de notre diaspora, plus particulièrement à travers le renforcement du CCME.
En ce sens, le CCME a développé un savoir-faire scientifique sur l’ensemble des questions liées à la diaspora dans sa diversité. Ce savoir-faire, le Conseil le met à la disposition de tous les acteurs publics pour la mise en œuvre d’une politique publique rationnelle et efficace à l’adresse des Marocains du monde.
Le CCME a construit au fil des années une expérience considérable qui lui permet d’être le lien entre les compétences issues de l’immigration marocaine et les différentes institutions intéressées par leur apport, qu’elles soient du secteur public ou privé.
A titre de rappel, le CCME a signé récemment une convention de coopération avec la CGEM, en vue de mobiliser les compétences et entrepreneurs marocains à l’étranger pour investir dans leur pays d’origine.