"J’ai longuement hésité avant de prendre la parole (…) Depuis deux ans, je me suis tenu à la décision de silence et de retrait que j’avais annoncée au soir du second tour de l’élection présidentielle de 2012 (…) Et pourtant je crois qu’il est aujourd’hui de mon devoir de rompre ce silence. Si je le fais, c’est parce que des principes sacrés de notre République sont foulés aux pieds avec une violence inédite et une absence de scrupule sans précédent", écrit l’ancien chef de l’Etat.
"Qui aurait pu imaginer que, dans la France de 2014, le droit au respect de la vie privée serait bafoué par des écoutes téléphoniques ? Le droit au secret des conversations entre un avocat et son client volontairement ignoré ? (…) La présomption d’innocence désacralisée ? (…) La justice de la République instrumentalisée par des fuites opportunément manipulées ?", s’interroge Nicolas Sarkozy. Plus loin, l’ancien président écrit : "j’apprends par la presse que tous mes téléphones sont écoutés depuis maintenant huit mois. Les policiers n’ignorent donc rien de mes conversations intimes avec ma femme, mes enfants, mes proches. Les juges entendent les discussions que j’ai avec les responsables politiques français et étrangers. (…) Qui a donné ces documents alors même qu’aucun avocat n’a accès à la procédure ? Les seuls détenteurs en sont les juges ou les policiers…" Nicolas Sarkozy n’hésite d’ailleurs pas à faire un parallèle avec le "merveilleux film La Vie des autres sur l’Allemagne de l’Est et les activités de la Stasi".
"Je sais, la ministre de la Justice n’était pas au courant, malgré tous les rapports qu’elle a demandés et reçus. Le ministre de l’Intérieur n’était pas au courant, malgré les dizaines de policiers affectés à ma seule situation. De qui se moque-t-on?", poursuit encore l’ancien chef de l’Etat.
Nicolas Sarkozy vient également au secours de son avocat, Me Thierry Herzog, mis à mal après la publication des extraits d’écoutes. "Mon propre avocat se trouve accusé d’avoir abusé de son influence auprès de notre juridiction suprême. Cette fois, fini de rire, car c’est à pleurer d’indignation. Son ‘crime’ : être l’ami depuis trente ans d’un avocat général à la Cour de cassation, un des plus fameux juristes de France, à qui il a demandé des avis sur la meilleure stratégie de défense pour son client. Le problème, c’est que le client, c’est moi", s’indigne-t-il.
Le chef de l’Etat s’en prend encore au Syndicat de la Magistrature, "ce syndicat désormais célèbre pour avoir affiché dans ses locaux le tristement fameux ‘mur des cons’, où j’occupe une place de choix !", rappelle-t-il. "Au moins dois-je être tranquillisé sur la clarté des opinions politiques d’un magistrat dont le devoir est pourtant d’enquêter à charge et à décharge. Pour la charge, je crois que l’on peut être confiant, mais pour la décharge…", écrit-il.
Pour conclure, Nicolas Sarkozy assure néanmoins qu’il "garde confiance dans l’institution judiciaire, dans l’impartialité de l’immense majorité des juges, dans la capacité de la justice à ne pas se laisser instrumentaliser."