La France achète des masques et réfléchit à la suite du confinement

Le gouvernement, après avoir donné un tour de vis aux mesures de confinement face à l’épidémie de coronavirus, a demandé l’avis de son conseil scientifique sur la suite à donner à cette mesure drastique et passé commande de plus de 250 millions de masques, dont la pénurie pèse sur les soignants.

Confronté à un respect très inégal des mesures destinées à limiter la propagation de l’épidémie qui a déjà tué plus de 560 personnes dans le pays, le gouvernement avait annoncé la multiplication de contrôles et de nombreux lieux publics ont été interdits pour éviter les sorties intempestives à l’occasion du premier week-end d’un confinement totalement inédit.

Alors que nombre de voix, notamment dans le corps médical, réclament une mise sous cloche plus stricte, le ministre de la Santé Olivier Véran a annoncé samedi avoir saisi le conseil scientifique créé sur le Covid-19 pour se prononcer sur « la durée » et « l’étendue » nécessaires du confinement, pour l’instant décrété jusqu’à fin mars au moins.

L’avis du conseil est attendu pour lundi. Mais tout laisse penser que le confinement sera prolongé, comme en Italie, qui enregistre le plus de décès au monde (près de 5.000, devant la Chine d’où est partie l’épidémie).

Face au manque criant de masques, dont se plaignent les soignants et qui créé une polémique sur la gestion des dernières années, M. Véran a indiqué que la France en a commandé « plus de 250 millions ». Le « stock d’État » n’est actuellement que de 86 millions de masques, pour une consommation prévue de « 24 millions de masques par semaine », a-t-il précisé.

Couvre-feux

Pour les deux semaines à venir, a-t-il dit, priorité sera donnée aux personnels de santé en ville comme à l’hôpital et aux personnes intervenant auprès des personnes âgées, avec notamment 500.000 masques par jour pour les personnels des Ehpad.

Le ministre, refusant d’entrer dans une « polémique », a rappelé que ces stocks stratégiques « se sont réduits année après année » depuis dix ans, avec en début d’épidémie un total de « 117 millions de masques ». Le gouvernement avait conscience que cette situation « allait être une difficulté », a-t-il reconnu.

Il a toutefois redit ne pas envisager l’usage généralisé du masque dans la population, rappelant notamment que l’OMS ne le recommande pas. Quant aux professions au contact du public qui en réclament (forces de l’ordre, distribution…), là encore le gouvernement va consulter son conseil scientifique.

En de nombreuses parties du territoire, des élus locaux ont imposé des mesures pour durcir le confinement, avec notamment des couvre-feux décrétés à Béziers (Hérault), Vallauris, Menton (Alpes-Maritimes) et Roquebrune-sur-Argens (Var), de 22h à 5h du matin, ainsi qu’à Charleville-Mézières (Ardennes) et Perpignan (de 20h à 6h).

Le maire de Montpellier a aussi instauré ce couvre-feu, accompagné de la fermeture des marchés alimentaires. Les transports publics y sont désormais réservés aux usagers qui travaillent, et un gymnase a été mis à disposition pour l’aide alimentaire.

Le gouvernement a aussi renforcé les contrôles, notamment dans les gares (seulement 15 % des trains grandes lignes circulent) et les aéroports. Avec amendes forfaitaires de 135 euros en cas de sorties non justifiées.

« La crise va s’intensifier »

« La situation va continuer à s’aggraver avant que les effets du confinement fassent leur effet », a rappelé M. Véran, estimant le nombre de personnes infectées en France à une large fourchette, « entre 30.000 et 90.000 », en raison des nombreuses personnes présentant peu ou pas de symptômes.

Concernant l’utilisation de tests, qui ont peu à peu été réservés à certaines catégories de populations (fragiles, âgées, femmes enceintes, etc.), le ministre a assuré que les autorités se préparaient à pouvoir « les multiplier au moment ou nous lèverons le confinement ». Avec notamment « l’espoir » de voir se développer « une nouvelle méthode diagnostique plus simple et plus rapide ».

Selon les derniers chiffres du ministère, l’épidémie a causé la mort de 562 patients à l’hôpital, soit 112 de plus pour la journée de samedi, et entraîné l’hospitalisation de 6.172 malades, dont 1.525 en réanimation (pour la moitié âgés de moins de 60 ans).

Les sept régions les plus touchées sont le Grand Est, la Corse, l’Ile-de-France, les Hauts-de-France, la Bourgogne-Franche-Comté, Auvergne-Rhône Alpes et désormais la Nouvelle-Aquitaine.

Une nouvelle évacuation par avion militaire de six patients a eu lieu entre Mulhouse, épicentre de l’épidémie en France, et l’Aquitaine, où ils se trouvaient dans un état « grave et stable ». A Mulhouse, où l’hôpital est totalement saturé, un hôpital militaire de campagne de 30 lits, en cours d’installation, devrait entrer en opération en « tout début de semaine », a indiqué la ministre des Armées, Florence Parly.

De son côté, le porte-hélicoptères amphibie Tonnerre de la Marine nationale est parti de Toulon à destination de la Corse, d’où il doit évacuer des patients atteints du nouveau coronavirus vers des hôpitaux marseillais, selon la préfecture maritime de Méditerranée. L’arrivée du bâtiment est prévue tôt dimanche matin.

Carence suspendue

« Face à l’urgence et à l’ampleur de l’épidémie », notamment en Ile-de-France, les hôpitaux de Paris (AP-HP) en appellent aux « professionnels médicaux et paramédicaux disponibles dans les semaines à venir » pour renforcer les équipes de ses 39 hôpitaux.

L’Assemblée nationale a voté samedi l’article du projet de loi face au coronavirus permettant l’instauration d’un « état d’urgence sanitaire », au terme d’un âpre débat sur l’encadrement de ce régime d’exception, et l’ajout de sanctions pour non-respect du confinement. Les députés doivent venir à bout dans la nuit des quelque 240 amendements déposés sur ce texte.

Le Sénat se réunira dimanche après-midi, lui aussi en formation serrée, pour le ré-examiner.

Le Parlement avait adopté définitivement vendredi le volet financier des mesures d’urgence face au coronavirus. Combiné au projet de loi d’urgence voté en première lecture au Sénat, le texte prévoit 45 milliards d’euros pour aider les entreprises en difficulté et financer le chômage partiel des salariés.

Le Premier ministre Edouard Philippe a annoncé samedi la suspension générale du jour de carence en cas d’arrêt maladie pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire qui doit être prochainement déclaré.

La France, où des applaudissements résonnent désormais chaque soir vers 20H00 pour les soignants, s’emploie par ailleurs toujours à organiser le retour d’environ 130.000 ressortissants bloqués à l’étranger.

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