L’armée irakienne cherche à isoler l’EI avant de donner l’assaut à Ramadi
Les forces irakiennes aidées des milices chiites ont lancé mardi une opération destinée à isoler les jihadistes du groupe Etat islamique (EI) dans la province stratégique d’Al-Anbar avant de tenter de reprendre sa capitale Ramadi. L’annonce de l’opération a été faite 24 heures après les tentatives de la Maison Blanche d’apaiser les tensions avec Bagdad dont l’armée a été accusée d’un « manque de volonté » face à l’EI par le secrétaire à la Défense Ashton Carter.
Le Premier ministre irakien Haider Al-Abadi a promis de reprendre cette région à l’EI, qui contrôle la majorité de la province d’Al-Anbar (ouest) s’étendant des limites de la région de Bagdad aux frontières syrienne, saoudienne et jordanienne.
Pour ce faire, il a fait appel aux Unités de mobilisation populaires (Hachd al-Chaabi en arabe), force paramilitaire à majorité chiite qui a déjà aidé l’armée.
Le but de l’opération lancée mardi est d’isoler les jihadistes et de préparer l’offensive pour reprendre la capitale provinciale – quelque 4.000 hommes avancent vers les limites nord de Ramadi, selon les Unités de mobilisation populaire.
– "A tes ordres Hussein" –
L’objectif de l’opération "A tes ordres Hussein" est "de libérer les régions entre les provinces de Salaheddine et d’Al-Anbar et d’essayer d’isoler celle-ci", a déclaré à l’AFP Ahmed Al-Assadi, un porte-parole des Unités de mobilisation populaires.
Hussein est l’un des imams les plus vénérés par la communauté musulmane chiite, majoritaire en Irak – mais minoritaire à Al-Anbar, région sunnite. Le choix de ce nom a grandement irrité le Pentagone.
"Je pense que cela n’aide pas", a commenté le colonel Steven Warren, porte-parole du Pentagone, interrogé sur le choix du nom.
"Nous avons toujours dit que la clef pour la victoire, la clef pour expulser l’EI de l’Irak est un Irak unifié, qui se débarrasse de ses divisions communautaires, se mobilise contre la menace commune", a-t-il dit.
S’exprimant sur le conflit irakien, le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a aussi appelé à une politique plus inclusive.
"C’est ce contrat qui avait justifié notre engagement militaire. Je dis clairement ici qu’il doit être désormais mieux respecté", a ajouté M. Fabius, dont le pays participe à la coalition internationale antijihadistes.
Les forces armées, les miliciens chiites et les tribus sunnites, sont parvenues ces derniers jours à reprendre une partie du territoire à l’est de Ramadi et à avancer au sud et à l’ouest de la ville.
Les forces pro-gouvernementales "ont désormais coupé toutes les routes d’approvisionnement de l’EI pour Ramadi", selon un membre du conseil provincial, Arkan Khalaf al-Tarmuz.
Mais l’EI s’est probablement préparé à une attaque en disposant des explosifs un peu partout à Ramadi, comme il le fait dans chaque ville conquise.
La perte de cette capitale provinciale a constitué un revers pour Bagdad et son allié américain engagé depuis plus de neuf mois avec d’autres pays arabes et occidentaux dans une campagne aérienne contre l’EI en Irak et en Syrie voisine, où les jihadistes occupent la moitié du territoire.
– Questions –
La chute de Ramadi a soulevé des questions sur la stratégie non seulement du gouvernement Abadi mais aussi des Etats-Unis, puisque plus de 3.000 raids n’ont pas empêché l’EI d’étendre son "califat" proclamé en juin 2014 sur les régions conquises à cheval entre l’Irak et la Syrie.
Fort de dizaines de milliers d’hommes et responsable d’atrocités, l’EI a réussi en janvier 2014 à prendre des secteurs d’Al-Anbar, avant de lancer le 9 juin son offensive fulgurante en Irak qui lui a permis de s’emparer de régions au nord et à l’est de Bagdad.
Il a profité de la guerre civile en Syrie pour prendre le contrôle en 2013 de vastes régions et s’est encore emparé le 21 mai de la cité antique Palmyre dans le d
ésert syrien frontalier de l’Irak, d’où il pourrait menacer Homs et Damas, des bastions du régime.
Une vidéo diffusée mardi par une chaîne travaillant uniquement dans les zones contrôlées par l’EI, et dont la date de tournage n’a pu être déterminée, montre des plans de la cité antique de Palmyre, dont la citadelle, les colonnes torsadées romaines ou un amphithéâtre.
Aucune voix off ne commente les images, sur lesquelles n’apparaît pas de drapeau de l’EI, et aucun bruit de combats n’est entendu. Sur un plan, on peut apercevoir une fumée noire derrière des ruines.