A voir l’agenda médiatique et politique du Premier ministre François Fillon, le doute est levé. L’homme semble entrer dans une nouvelle séquence, celle de devoir défendre le bilan de la gouvernance de Nicolas Sarkozy, de jouer le communicateur à sa place. Tout cela intervient à un moment crucial où malgré toutes ses tentatives de séduction et ses exploitations de tout ce qui bouge, le président de la République peine à conjurer la malédiction des mauvais sondages. En plus de nombreuses interventions médiatiques, François Fillon devra présider un séminaire gouvernemental pour dresser le bilan des réformes et tenter d’impulser un nouveau souffle. Non content d’avoir commenté la mort d’Oussama Ben Laden bien avant Nicolas Sarkozy, une politesse grillée par les circonstances et les agendas, François Fillon devra beaucoup parler et se rendre visible les prochaines semaines. De la part de Nicolas Sarkozy qui n’a jamais su céder la moindre parcelle de communication, cela sent la stratégie imposée par les conseillers, le chemin emprunté par nécessité impérieuse. Le Premier ministre est là pour jouer les fusibles et les attrape-colères. Il est anormal qu’il demeure dans l’ombre à jouir d’une insolente popularité au point de commencer à constituer, au sein de la famille de la droite, une possible alternance au président. Au crédit de François Fillon, ses multiples complaintes exprimées entre deux murs capitonnés d’être en permanence empêché d’exercer sa fonction de Premier ministre, de pouvoir monter au créneau chaque fois que l’actualité politique ou sociale l’exige. La boulimie et l’hyperactivité de Nicolas Sarkozy le devançaient toujours et le ramenaient au stade de figuration. Ce fut le grand malentendu entre les deux hommes dont la gravité, au lieu de les séparer, a servi comme ciment, pour les lier durant tout le quinquennat. Lorsque la météo politique était à la déprime, Nicolas Sarkozy ne se gênait pas pour rappeler au Premier ministre que la popularité est le lot de consolations des planqués et des inactifs. Ce à quoi François Fillon se contentait de répondre par un silence lourd qui augmente son bonus sagesse et modération. Cette période semble révolue. François Fillon sort du bois pour défendre le bilan de Sarkozy. Pour réussir cette opération, il doit non seulement endosser tous les choix de Nicolas Sarkozy même ceux auxquels il n’était pas associé et qui avaient suscité chez lui une sourde opposition, mais il doit aussi fumer le calumet de la paix avec des personnalités de la majorité comme Jean-François Copé ou le ministre de l’Intérieur Claude Guéant qui ont fait du démontage de sa stature leur passe-temps préféré. Opération extrêmement délicate au regard des tensions et des rancunes accumulées. Resté longtemps en retrait, François Fillon monte sur le perron pour faire entendre sa voix. Si grâce à ses interventions, il parvient à renverser la tendance qui entoure Nicolas Sarkozy, il prouve à quel point il demeure incontournable pour l’actuel président de la République. Dans le cas contraire, François Fillon projette son propre agenda : que Nicolas Sarkozy le garde jusqu’à la fin du quinquennat ou le remercie avant, le Premier ministre semble se préparer pour deux échéances importantes : la mairie de Paris en 2014 et la présidentielle de 2017.
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