L’islam de France retrouve ses démons

Alors que les musulmans de France étaient à quelques jours d’installer leur Conseil National des Imams doté d’une « charte des valeurs républicaines », censée les protéger de toute dérive extrémistes, une des composantes du Conseil français du culte musulman (CFCM), la grande mosquée de Paris que dirige le franco-algérien Chemseddine Hafiz se rétracte à la dernière minute et refuse d’opposer sa signature et son  engagement à ce grand projet voulu par le président Emmanuel Macron.

Même si ce retrait ne remet pas en cause l’ensemble du nouvel échafaudage organisationnel pensé par le CFCM, il interpelle sur ses vraies motivations et ses agendas. La mosquée de Paris avait participé depuis le 3 novembre dernier à tout le processus d’élaboration de cette charte jusqu’à sa finalisation vers la mi-décembre. Pendant toute cette période de débats et d’échanges, sa direction n’avait rien trouvé à redire sur la portée des décisions ainsi validées.

Et brusquement sans crier gare et sans même alerter ses propres représentants qui participent le 28 décembre à la validation finale de la charte, la grande mosquée de Paris annonce son retrait de ce processus sous le fallacieux prétexte que cette charte ferait la part belle aux forces de l’islamisme et à la radicalité religieuse qui seraient, selon elle, incompatibles avec les valeurs de la république.

Outre que ces remarques et positions auraient pu être débattues avec les fédérations que le recteur Hafiz pointent du doigt dans le cadre du processus d’élaboration du projet, l’actuelle direction de la GMP a préféré bruyamment claquer la porte. Une posture qui s’assimile ouvertement à un sabordage de ce projet, loin du vivre ensemble républicain et proche des intérêts égocentriques.

En effet, la certification des imams de France s’est avérée être un grand défi politique et économique, dont la GMP voudrait obtenir le monopole au nom d’un magistère imaginaire qu’elle exercerait sur l’ensemble des musulmans de France. Et pour cela le but est de faire avorter toutes les initiatives qui pourraient l’empêcher de réaliser ses objectifs. Et si cela doit passer par le démantèlement du CFCM, la GMP n’y voit aucun inconvénient. Bien au contraire ! Sa Direction s’est jusqu’à présent avancée masquée jusqu’à son retrait fracassant, accusant et les autres composantes du CFCM et les choix du président Macron de pactiser avec l’islamisme radical.

Le ministère de l’intérieur, chargé des cultes, se doit de regarder avec clairvoyance les postures des uns et des autres qui, sous prétexte de surfer sur des peurs et des angoisses légitimes, tentent de faire avancer parfois en douce, parfois fois avec fracas leurs propres agendas. L’enjeu aujourd’hui est de confier la gestion de l’islam de France à des personnalités et des structures ayant des emprises et des profondeurs d’attache avec les musulmans de France plutôt que de miser sur des approches hasardeuses  et des profils d’aventuriers qui vendent des chimères.

A cause des attitudes erratiques de la direction de la mosquée de Paris, l’islam de France retrouve ses démons qui l’empêchent de fournir une réponse logique et rationnelle aux demandes des pouvoirs publics à la recherche d’un interlocuteur crédible pour organiser dans les meilleures conditions l’exercice du culte musulman en France.

 

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