«On en a marre d’attendre un Etat palestinien alors que l’on a rempli toutes les conditions»

Shaddad al-Attili, ministre de l’Eau de Mahmoud Abbas, «se félicite» de l’initiative française :

C’est pour défendre un projet de conférence de paix israélo-palestinienne, qui se tiendrait d’ici à juillet à Paris sur la base des paramètres énoncés par Barack Obama, qu’Alain Juppé s’est rendu jeudi en Israël, puis hier à Washington. La préoccupation de la France est d’éviter une conflagration diplomatique aux Nations unies en septembre, où les Palestiniens ont en vue l’adhésion de leur Etat à l’ONU sur les lignes de 1967, faute de perspective d’accord avec le gouvernement israélien. De passage à Paris, Shaddad al-Attili, le ministre de l’Eau palestinien, a évoqué vendredi l’impasse actuelle.

Que pensez-vous de l’initiative française ?

Nous nous en félicitons. Vous savez, on en a marre d’attendre un Etat palestinien. On a tout fait pour cela, on a rempli toutes les conditions. On a même accepté un échange de territoires. Maintenant, on nous demande de reconnaître le caractère juif de l’Etat d’Israël, mais Israël a été reconnu par la communauté internationale comme Israël, pas comme un Etat juif. Regardez, nous nous sommes réconciliés avec le Hamas. Pourtant, pas plus les Israéliens que les Américains ne l’acceptent. Mais ce sont ces mêmes Israéliens qui se plaignaient [faute d’unité chez les Palestiniens, ndlr] de ne pas avoir de partenaire pour négocier. C’est un prétexte pour ne pas accepter la solution de deux Etats [israélien et palestinien]. D’ailleurs, dans le discours que Nétanyahou a tenu au Congrès, celui qui a été applaudi à 29 reprises par les parlementaires américains, il a tué cette solution des deux Etats. Or, ce sont les Palestiniens qui font l’objet de pressions de toute part pour que l’on retourne à la table des négociations. Mais c’est Israël qui est à la fois un Etat d’exception et au-dessus des lois.

Dans ce contexte, la question de l’eau est-elle fondamentale ?

L’Etat palestinien n’est pas viable s’il n’a pas d’eau. C’est le secteur agricole qui sera le support de cet Etat. Les seules activités que nous pouvons avoir nécessitent de l’eau. Mais dans la vallée du Jourdain, qui est notre grenier, il y a plus de 9 000 colons [juifs] qui ont pris le contrôle de 77,5 % des parcelles et ont obtenu un tiers des ressources en eau attribuées aux 2,5 millions de Palestiniens habitant la région. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est un rapport de B’Tselem, une ONG israélienne. Or, les accords d’Oslo ont reconnu que l’accès à l’eau pour les Palestiniens est un droit, pas seulement un besoin. En 1995, les Palestiniens recevaient 110 litres par personne et par jour contre 70 aujourd’hui. Les colons, eux, en reçoivent 300 litres. C’est inacceptable ! Chaque personne doit pouvoir boire la même quantité d’eau. Comment voulez-vous qu’Abou Mazen [Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne], qui est l’homme le plus pacifique qui soit, puisse convaincre la population des vertus du processus de paix si chaque Palestinien reçoit un tiers d’eau en moins et si, en plus, elle est polluée ? Israël n’assume pas son devoir de puissance occupante en matière de services. A Gaza, la situation est catastrophique car la nappe phréatique est polluée. Il y a donc 1,6 million d’habitants qui boivent cette eau polluée. Il faut que la question de l’eau soit dépolitisée.

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