Pénurie de l’eau au Maghreb : appel à Tunis pour des solutions alternatives

Les participants à un séminaire international, dont les travaux se sont ouverts lundi à Tunis avec la participation du Maroc, ont plaidé pour des solutions alternatives permettant de faire face à la pénurie de l’eau dans la région du Maghreb qui souffre de sécheresses chroniques au cours des deux dernières décennies.

Lors de cette rencontre organisée par l’Observatoire du Sahara et du Sahel (OSS) sous le thème "L’eau et le changement climatique au Maghreb : défis et opportunités", le président du conseil mondial de l’eau, Loïc Fauchon, a indiqué que la région MENA vit une situation de stress hydrique à cause de la surexploitation et le gaspillage des ressources en eau.

Tout en mettant l’accent sur les crises dans lesquelles pâtit cette région, il a fait savoir que les changements climatiques ne constituent pas la première menace, mais il existe également la pression démographique et urbanistique galopante qui influe sur décisions politiques. Dans ce sens, il a insisté sur la nécessité de s’assurer des ressources en eau pour l’avenir en multipliant les solutions technologiques, les forages, les transferts, le dessalement et la réutilisation des eaux usées. "Quand la terre a soif, on a faim", a-t-il dit, notant que la préservation de l’eau d’aujourd’hui est de nature à permettre de garantir cette denrée aux prochaines générations. M. Fouchon a souligné l’impératif de rationaliser l’utilisation des ressources en eau en donnant la priorité aux financements pour l’eau.

De son côté, le secrétaire général de l’Union du Maghreb Arabe, Taïeb Baccouche, a indiqué que dans cette région, les ressources en eau mobilisables s’élèvent à 46 milliards de m3 dont 50 % sont considérés comme exploitables. Il a rappelé qu’à l’instar de certains pays africains situés particulièrement en Afrique Centrale et en Afrique australe, le Maghreb est considéré comme une région à pénurie d’eau qui connait aujourd’hui une situation de stress hydrique, relevant que le capital annuel en eau par habitant est estimé à 700 M3 et devrait diminuer à 500 M3 environ après les années 2025, sans prendre en considération l’effet probable des changements climatiques.

"Les sécheresses chroniques connues ces deux dernières décennies ont provoqué des déficits importants en eau de surface, aggravés par la croissance démographique. A cela, s’ajoute la forte demande en eau pour assurer un développement durable de la région, dont le secteur agricole utilise à lui seul les 80 % des ressources en eau disponibles", a-t-il fait savoir.

M. Baccouche a indiqué qu’après huit ans, le fond vert pour le climat est encore loin d’être considéré comme le principal mécanisme financier multilatéral destiné à soutenir les mesures en faveur du climat dans les pays en développement.

"Une prise de conscience des aspects environnementaux est constatée au niveau du secteur privé dans la région notamment les banques et ceci est matérialisé particulièrement, à travers l’intégration des risques environnementaux et de durabilité dans les processus d’octroi des crédits, l’accompagnement des projets nationaux visant la lutte contre les changements climatiques et le développement des produits financiers verts ainsi que la maîtrise des impacts directs sur l’environnement", a-t-il dit.

De son côté, Khatim Kehrraz, secrétaire exécutif de l’OSS a préconisé l’augmentation du prix de l’eau pour faire pression et changer les comportements afin d’améliorer la gestion de ces ressources. Kherraz a précisé que ceux qui utilisent l’eau pour faire des profits, doivent payer pour ceux qui n’ont pas les moyens de payer leur propre eau, pour garantir de cette manière l’équité en eau et laisser un peu de marge pour les plus démunis.

Tout en qualifiant la situation de "très difficile" puisque l’organisation mondiale de la santé a défini la pénurie comme étant un seuil qui est en-dessous de 1000 m3 par habitant et par an,alors qu’au niveau du Maghreb Arabe, on oscille entre 800 m3 et 100 m3. Dans ce sens, il a appelé au recours à des solutions alternatives telles que le dessalement de l’eau de mer et la réutilisation des eaux usées traitées pour l’agriculture.

Pour le ministre tunisien de l’Agriculture, des ressources hydrauliques et de la pêche, la Tunisie devra subir d’ici 2050, une élévation de la température moyenne de 1°C à 3°C, une diminution de la moyenne pluviométrique de 10 à 20% et une accentuation de la variabilité climatique dont particulièrement la durée de la sécheresse et l’ampleur des inondations.

"La Tunisie a réservé des investissements importants (environ 65% du total des investissements programmés pour l’ensemble du secteur agricole pour la période 2016-2020) pour la mobilisation des ressources en eau, le développement des zones irriguées et la rationalisation de l’économie de l’eau", a-t-il dit.

Pour sa part, Mokhtar Hammami, ministre tunisien des affaires locales et de l’environnement a souligné qu’il est temps de réfléchir à un plan d’adaptation régional que l’UMA est bien positionnée pour l’abriter et le piloter. Ainsi, la réutilisation des eaux usées, le dessalement des eaux et autres techniques sont aujourd’hui inévitables mais nécessitent beaucoup de financements, a-t-il expliqué.

Les travaux du séminaire de deux jours porteront à la fois sur le contexte général de la gestion de l’eau et les approches innovantes développées en matière d’adaptation aux changements climatiques dans le secteur de l’eau, incluant les opportunités offertes par la finance climat au service de l’eau.

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite