Les douze enfants, dont le plus âgé a 10 ans, "orphelins, isolés" ou "particulièrement vulnérables", certains "malades et dénutris", selon le MAE, avaient été remis dimanche par les Kurdes à une délégation française venue les chercher sur place.
Deux orphelins de parents néerlandais, pris en charge par la délégation française, ont aussi été rapatriés dans l’avion militaire français puis remis à des représentants des Pays-Bas à Paris, a précisé la même source.
Les enfants français vivaient dans deux camps tenus par les forces kurdes, où ont été accueillies des dizaines de milliers de personnes capturées ou ayant fui les offensives contre le dernier bastion du groupe jihadiste État islamique (EI).
Dix d’entre eux sont des orphelins qui étaient non accompagnés dans les camps, selon une source proche du dossier. Les deux autres vivaient avec leur mère, Saïda El Ghaza, qui a accepté d’être séparée d’eux, la France s’opposant au retour des mères parties rejoindre l’EI.
Originaire de l’Hérault (sud de la France), cette Franco-Marocaine de 32 ans était partie en Syrie avec sa fille, née d’un premier mariage, pour rejoindre Yassine Sakkam, un Français condamné à mort le 29 mai en Irak.
Elle avait été arrêté en juillet 2017 avec sa fille, aujourd’hui âgée de 10 ans, et leur fils de 3 ans, né sur place.
Près de la frontière turque
Selon la procédure mise en place pour le retour d’un premier contingent de cinq enfants de jihadistes le 15 mars, les 12 mineurs ont été remis dans la matinée aux services de protection à l’enfance. Ils vont d’abord faire l’objet d’un examen médical approfondi puis seront pris en charge par les services sociaux, a précisé le MAE.
Au Kurdistan syrien, Abdel Karim Omar, haut responsable des Affaires étrangères de l’administration autonome kurde, non reconnue par la communauté internationale, avait auparavant indiqué que "12 orphelins français issus de familles de l’EI" avaient été remis "à une délégation du ministère français des Affaires étrangères".
L’opération s’est déroulée dimanche dans la localité d’Aïn Issa, près de la frontière turque, selon lui. Un responsable kurde demandant l’anonymat a précisé que les orphelins français se trouvaient dans les camps d’al-Hol et Roj, et les Néerlandais dans celui d’Aïn Issa.
Les autorités kurdes estiment qu’un autre groupe d’orphelins français pourrait être remis prochainement à la France.
Le MAE a également confirmé qu’il "n’était pas exclu qu’il y ait une troisième opération, si l’on identifie d’autres enfants répondant aux mêmes critères de vulnérabilité".
Pour l’instant, les autorités françaises ont rapatrié 17 orphelins français, cinq le 15 mars et 12 lundi.
Il y a 400 à 500 ressortissants français dans les camps gérés par les Kurdes dans le Nord-Est syrien, dont une grande majorité d’enfants, a précisé le MAE.
Après avoir conquis l’ultime fief des jihadistes dans l’Est syrien, au terme d’une offensive soutenue par une coalition internationale menée par Washington, les combattants kurdes et arabes des Forces démocratiques syriennes (FDS) ont proclamé le 23 mars la défaite du "califat" de l’EI.
Les autorités kurdes administrent aujourd’hui dans le nord-est de la Syrie plusieurs camps de déplacés surpeuplés où les conditions de vie sont très précaires.
"Au cas par cas"
Pour désengorger le camp d’Al-Hol, elles avaient, début juin, laissé rentrer dans leurs foyers quelque 800 femmes et enfants syriens. Parallèlement, elles réclament depuis plusieurs mois le rapatriement des femmes et enfants de jihadistes étrangers.
Deux Américaines et six enfants, issus de familles liées à l’EI en Syrie, ont été rapatriés la semaine dernière aux Etats-Unis.
En France, le gouvernement, soumis à la pression des familles, a été sommé fin mai par le Défenseur des droits de venir en aide aux enfants de jihadistes français retenus en Syrie, en faisant cesser dans un délai d’un mois les "traitements inhumains" qu’ils subissent dans les camps.
A ce sujet, la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye a réaffirmé la "position constante" de la France, qui étudie les situations "au cas par cas" et ne rapatrie que des orphelins ou des enfants avec l’accord de leur mère.
Samia Maktouf, avocate de familles françaises d’enfants retenus en Syrie, a salué "une étape très importante", car "il en va de la sécurité de ces enfants, qui étaient confrontés à un danger de mort imminent. Ils sont Français, ils ont leur place en France".
Mais une autre avocate de familles françaises, Marie Dosé, à l’origine de plusieurs recours pour tenter d’obtenir ces retours, a dénoncé des "rapatriements au compte-goutte" qui "conduisent à des discriminations inexplicables et injustifiées entre des enfants qui ne sont responsables de rien".
"J’ai une pensée pour les 200 enfants qui restent là-bas, dont le traumatisme et les dangers augmentent chaque jour", a-t-elle déclaré. "Laisser ces enfants et leurs mères dans ces camps gangrenés par l’idéologie de Daesh participe de la fabrication des attentats de demain".