Retraites/France : des centaines de milliers de personnes dans la rue à l’appel de tous les syndicats

Des centaines de milliers de personnes manifestaient mardi contre la réforme des retraites, pour la première fois à l’appel de l’ensemble des syndicats, d’ores et déjà invités à Matignon mercredi pour des discussions afin de trouver le chemin d’une sortie de crise avant Noël.

Plus de 250.000 manifestants étaient comptabilisés en milieu d’après-midi dans une cinquantaine de villes, selon des chiffres de la police et des préfectures comptabilisés par l’AFP.

Cheminots, enseignants, fonctionnaires, avocats, magistrats en grève, mais aussi des soignants mobilisés qui réclament davantage de moyens pour l’hôpital: salariés du public et du privé gonflaient les cortèges en cette nouvelle journée interprofessionnelle de protestation contre l’instauration d’un système universel de retraites par points.

"Ma détermination, celle du gouvernement, celle de l’ensemble de la majorité est totale" à mener à bien la réforme et à instaurer un système universel, a rappelé devant les députés le Premier ministre, Édouard Philippe.

A Paris, la manifestation s’est ébranlée vers 14H00 de République vers Nation mais, en raison de l’affluence, beaucoup n’avaient toujours pas quitté la place de la République près de deux heures après. "Services publics à l’agonie, Retraitez nous bien", ou "On révolte ceux que l’on saigne", pouvait-on lire sur les pancartes.

La journée est "un franc succès", s’est réjoui le leader de la CGT, Philippe Martinez, estimant que "malgré les tentatives de division du gouvernement, la population reste mobilisée".

La CGT, FO, la CFE-CGC, Solidaires et la FSU marchent pour réclamer le retrait pur et simple du projet. Ces organisations se réuniront dans la soirée pour décider de la suite du mouvement.

Dans les mêmes cortèges mais derrière leurs propres banderoles, la CFDT, la CFTC et l’Unsa défilent pour améliorer le contenu du projet de fusion des 42 régimes existants en un système universel. Et surtout pour refuser l’introduction dès 2022 d’un "âge d’équilibre" qui doit atteindre 64 ans en 2027 afin de favoriser l’équilibre des comptes grâce à un dispositif de bonus-malus.

"Il faut que tous ceux qui portent une réforme juste et équitable soient dans la rue pour montrer que nous ne voulons pas de cet âge d’équilibre qui est terriblement injuste, qui va concerner d’abord ceux qui ont commencé à travailler tôt", a déclaré à Paris le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger.

– "Faire bouger le gouvernement" –

Les cortèges étaient également nombreux en province, avec par exemple 17.000 manifestants à Lyon, selon la préfecture, 40.000 selon les organisateurs. A Brest, la préfecture a compté 10.000 manifestants, les syndicats 20.000. Ils étaient aussi entre 14.000 et 30.000 à Nantes.

Le 5 décembre, au premier jour du conflit, 806.000 manifestants ont battu le pavé, selon le ministère de l’Intérieur, puis 339.000 il y a une semaine.

"J’exige ma retraite, ni à point, ni saignante" ou "La retraite pour les travailleurs, pas pour les assureurs", pouvait-on lire sur les pancartes dans la manifestation strasbourgeoise.

"Je ne sais pas si on va arriver à faire bouger le gouvernement, mais ce qui est sûr, c’est que si on n’est pas là il ne bougera pas", estime dans le défilé toulousain Aurélie, une auteure en arts visuels de 25 ans qui pointe les problèmes spécifiques liés au statut d’artistes: "on cotise pour tout mais sans ouverture de droits en dessous de 9.000 euros par an, ce qui fait que la retraite, je ne suis même pas sûre d’en avoir une".

Au treizième jour de mobilisation, il restait très difficile de se déplacer mardi, avec un trafic SNCF et RATP très perturbé, des bouchons sur les routes, des barrages filtrants, des raffineries perturbées.

Un tiers des cheminots (32,8%) étaient en grève, et 75,8% des conducteurs de trains, selon la direction de la SNCF, soit une forte hausse par rapport à lundi.

Pour le premier weekend des vacances, la SNCF a assuré mardi qu’elle serait en mesure de transporter tous les passagers ayant déjà réservé leur billet de TGV, avec des changements d’horaires dans la moitié des cas.

Une majorité de Français (62%) soutiennent le mouvement de grève selon un sondage Harris Interactive, mais 69% souhaiteraient une "trêve de Noël".

"Cette trêve est indispensable, les Français ont besoin de se reposer", a relevé sur France Inter Agnès Buzyn, la ministre de la Santé, seule en charge du dossier après la démission lundi du haut-commissaire aux Retraites, Jean-Paul Delevoye.

Présent dans la manifestation parisienne, le leader de la France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon, a renvoyé la balle au gouvernement, estimant que c’était à lui de "faire une trêve pour Noël": "il retirerait son projet" et "les gens raisonnables discuteraient".

– Coupures d’électricité –

Des concertations doivent s’ouvrir dès mercredi à Matignon, où Édouard Philippe reçoit les organisations syndicales et patronales représentatives en bilatérales, avant une "multilatérale" jeudi.

Mardi, les actions prenaient aussi la forme de barrages filtrants, ports bloqués, tout comme les expéditions au départ de certaines raffineries, rassemblements de surveillants devant plusieurs prisons…

Près de 50.000 foyers ont par ailleurs été privés d’électricité en Gironde dans la nuit et 40.000 à Lyon dans la matinée, des actions revendiquées par la CGT du gestionnaire du réseau RTE.

Le mouvement touche également les établissements scolaires, avec 25,05% de grévistes dans le primaire et 23,32% dans le secondaire, selon le ministère (50% et 60% respectivement selon les syndicats).

La journée était aussi marquée par un mouvement des personnels hospitaliers. A Paris, une manifestation a eu lieu en fin de matinée pour "sauver l’hôpital", avant qu’une partie des blouses blanches ne rejoignent le cortège de la mobilisation contre les retraites.

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