La force française Barkhane plante le drapeau à Gossi, un carrefour du centre du Mali

Pelleteuses, foreuse, forêt de tentes et containers: à quelques kilomètres de la ville malienne de Gossi (centre), la force française Barkhane fait sortir de terre une nouvelle base pour permettre à ses soldats de prendre pied dans la zone aride du Gourma.

"Ce sera la base d’assaut pour les opérations dans le Gourma, où la menace est présente localement", explique le capitaine François, le commandant de la nouvelle emprise française, posée au beau milieu d’une savane chauffée à blanc.

"Avant, on a mis les pieds dans la région et on est ressortis. Là, on plante le drapeau et on y reste", renchérit un haut gradé français.

Localisée à 150 km à l’ouest de Gao (nord), où se situe le QG de Barkhane au Mali, cette ancienne base de la Mission de l’ONU, la Minusma, est idéalement placée pour rayonner dans la région, font valoir les militaires. Située sur la RN 16, l’axe routier Bamako-Gao, la ville est un carrefour économique qui accueille chaque semaine un grand marché au bétail.

Depuis mi-janvier, les équipes de Barkhane s’emploient à aménager le terrain de latérite, qui devra pouvoir accueillir jusqu’à plusieurs centaines de soldats.

Dans des nuages de poussière rouge vif, les engins de chantier s’activent, chauffeurs au volant équipés de pare-balle sous une température frôlant les 50 degrés.

Un forage est en cours au milieu du camp dans l’espoir d’établir l’eau courante. Pour l’heure, le ravitaillement se fait par la route depuis Gao. Et quand les citernes sont vides, les bouteilles d’eau tiennent lieu de douche.

A quelques centaines de mètres de l’enceinte, l’arrivée d’un hélicoptère Chinook soulève une déferlante de sable. La plateforme hélicoptère sera bientôt prête. En attendant, il faut atterrir dans le désert environnant.

La force française a d’ores et déjà commencé à s’afficher dans la ville de 45.000 habitants bordée par un lac aux eaux beiges, afin d’acclimater les habitants à sa présence.

"L’objectif, c’est de permettre à la population de circuler normalement tout en poursuivant notre lutte antiterroriste, et empêcher les groupes armés terroristes de se ravitailler", explique le lieutenant Gauthier en remontant à pied, avec ses hommes, la rue commerçante de Gossi bordée de petits étals faits de bois et de paille.

"Avant c’était infesté de coupeurs de route, fait valoir le jeune officier. Les pilleurs se postaient à une vingtaine de km de la ville et rackettaient. Mais depuis quelques semaines, la population a plus de facilités à circuler, l’activité est relancée. Depuis que Barkhane est là, les FAMa (forces armées maliennes) reprennent confiance et retournent sur le terrain".

"Avec l’insécurité, les clients ont peur d’avoir des sommes d’argent sur eux", explique Alassane Maïga, cordonnier désoeuvré dans sa modeste échoppe. "La présence de Barkhane nous soulage".

Assis sur le pas d’une porte, un homme observe du coin de l’oeil les soldats français: "Barkhane vient et repart", lâche-t-il dans une moue sceptique. Sa voisine, parée d’un boubou jaune, est plus enthousiaste: "Depuis que Barkhane est là, on peut faire ce qu’on veut: on était partis à Bamako, on est revenus".

Pour faire accepter les militaires français dans le paysage et gagner la confiance, Barkhane a lancé des opérations civilo-militaires (CIMIC) d’aide à la population dans plusieurs quartiers de Gossi.

"Depuis notre arrivée on a mis l’accent sur l’eau, l’éducation et l’emploi. Le désoeuvrement est un terrain fertile pour le banditisime", souligne l’adjudant Pierre, chef CIMIC de Barkhane à Gossi.

Ses équipes ont récemment remis en service un puits, où des enfants se relaient pour remplir des bidons jaunes accrochés à une corde.

"Le puits était bouché, des serpents y avaient élu domicile. On l’a curé, nettoyé et réhabilité pour fournir de l’eau potable gratuite", détaille le soldat, regard bleu et barbe de hipster.

Mais gagner les coeurs et les esprits risque de prendre du temps. "A Gossi on sent les connivences de la population", voire des complicités, avec des groupes armés, qui se nourrissent de "liens familiaux importants", prévient un haut responsable de Barkhane.

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