L’UE rejette « l’ultimatum » de Téhéran mais ne veut pas enterrer l’accord nucléaire

Les Européens ont rejeté jeudi l' »ultimatum » de Téhéran sur son programme nucléaire, tout en réaffirmant leur espoir de sauver l’accord international de 2015 malgré les coups de boutoir répétés des Etats-Unis de Donald Trump.

Le dossier iranien s’est invité à un sommet sur l’avenir de l’UE post-Brexit, réuni à Sibiu en Roumanie. Il fournit un délicat cas pratique aux Européens, qui avaient prévu d’y débattre, sans la Première ministre britannique Theresa May, de leur rôle sur la scène mondiale.

"Nous rejetons tout ultimatum et nous évaluerons le respect par l’Iran de ses engagements en matière nucléaire", ont prévenu dans un communiqué commun, avant le début de la rencontre, les pays européens impliqués dans le dossier (Allemagne, France et Royaume-Uni), ainsi que la cheffe de la diplomatie européenne Federica Mogherini.

La veille, l’Iran leur avait donné deux mois pour sortir réellement les secteurs pétrolier et bancaire iraniens de leur isolement provoqué par les sanctions américaines, faute de quoi la République islamique renoncerait à des engagements pris dans l’accord international de 2015.

Dans un climat de tension exacerbée avec les Etats-Unis, Téhéran a déjà décidé mercredi de s’affranchir de deux des engagements de cet accord qui limite drastiquement le programme nucléaire iranien pour empêcher l’Iran de se doter de la bombe atomique et dont le président américain Donald Trump a claqué la porte il y a un an.

L’Iran a ainsi fait savoir qu’il cessait de limiter ses réserves d’eau lourde et d’uranium enrichi, revenant sur des restrictions consenties par l’accord conclu à Vienne en juillet 2015. Les Européens ont exprimé jeudi leur "vive préoccupation" après ces décisions, appelant l’Iran à "s’abstenir de toute escalade".

"Approche totalement différente"

"Nous demeurons pleinement attachés à la préservation et à la mise en oeuvre intégrale de l’accord sur le nucléaire, une réalisation essentielle dans l’architecture mondiale de non-prolifération nucléaire, qui est dans l’intérêt de la sécurité de tous", ont-ils souligné.

S’ils ont rejeté les menaces iraniennes, les Européens ont toutefois réaffirmé leurs "engagements fermes" pour "la levée des sanctions au profit du peuple iranien". Et ils ont déploré "que les États-Unis aient à nouveau imposé des sanctions après leur retrait de l’accord" en 2018.

Washington a en effet encore durci mercredi ses sanctions économiques contre l’Iran, en ajoutant l’acier, le fer l’aluminium et le cuivre aux secteurs visés par des mesures punitives.

Les trois pays et l’UE se disent malgré ce regain de tension "déterminés à poursuivre (leurs) efforts pour permettre la poursuite du commerce légitime avec l’Iran", en particulier via le système de troc, dit de l’Instex, mis sur pied par Paris, Berlin et Londres fin janvier.

"Nous réalisons et nous voyons que les Etats-Unis ont une approche totalement différente et c’est pour ça que cela restera un sujet difficile", a souligné le chancelier autrichien Sebastian Kurz qui rencontrait des responsables de sa famille politique, le PPE (conservateurs), avant le coup d’envoi formel du sommet prévu en début d’après-midi.

Sommet sans Brexit

Le dossier iranien risque d’occulter les autres débats que les Européens ont prévu d’avoir dans la petite ville de Sibiu, en Transylvanie.

Les dirigeants des pays européens ont prévu d’y afficher une image d’unité au cours de ce sommet consacré à l’avenir post-Brexit de l’Europe, où il devraient aussi ouvrir la course aux postes clés des institutions de l’UE.

Les chefs d’Etat et de gouvernement, réunis sans Theresa May, ont convenu d’éviter de parler du Brexit, qui a dominé bon nombre de leurs dernières rencontres. Et de plancher sur leur "agenda stratégique" interne des cinq prochaines années.

"C’est un sommet sans Brexit et tout le monde en est soulagé", a souligné un haut responsable européen, même si la date limite du divorce avec les Britanniques, prévu initialement pour le 29 mars, a une nouvelle fois été repoussée, cette fois au 31 octobre.

La date choisie du 9 mai correspond à l’anniversaire de la déclaration prononcée par le Français Robert Schuman en 1950, où il proposa la création d’une Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA), l’ancêtre de l’UE.

A Sibiu, les 27 devraient se contenter plus modestement d’approuver dans une courte déclaration "10 engagements", dont la promesse de défendre une Europe unie, "de l’Est à l’Ouest, du Nord au Sud", dont les membres seront toujours "solidaires entre eux en cas de besoin".

Le sommet devrait aussi permettre de poser les premiers jalons de la course aux présidences des grandes institutions européennes, qui va commencer avec celle du Parlement européen à l’issue des élections prévues du 23 au 26 mai.

C’est surtout la succession du président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, dont le mandat s’achève fin octobre, qui occupe les esprits.

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