"Nous sommes très inquiets de voir qu’un seul pays menace de bloquer l’adoption du rapport spécial du Giec si des conclusions scientifiques ne sont pas modifiées ou supprimées comme il le demande", a indiqué à l’AFP un observateur sous couvert de l’anonymat.
Selon plusieurs participants, il s’agit de l’Arabie saoudite, premier exportateur mondial de pétrole, qui a dans le passé été régulièrement à l’offensive pour freiner l’action onusienne contre le réchauffement, qu’il s’agisse de rapports du Giec ou des négociations pour trouver un accord sur les réductions d’émissions de gaz à effet de serre.
La réunion à huis clos entre scientifiques et représentants de 126 gouvernements, qui devait s’achever vendredi soir à Incheon, avait déjà pris du retard, se prolongeant toute la nuit, avant que la délégation saoudienne conteste dans la matinée le maintien d’un chapitre entier du dernier bilan scientifique en date sur le réchauffement, selon les mêmes sources.
Dans son rapport, dont le résumé est soumis à l’approbation des Etats, le Giec décrit, sur la base de 6.000 études, les forts impacts d’un réchauffement de +1,5°C, un niveau que la Terre pourrait atteindre dès 2030 (2030-2052) faute de réduction massive des émissions de GES (dont les trois quarts sont aujourd’hui générés par la combustion des énergies fossiles).
La délégation saoudienne conteste un chapitre qui fait référence aux engagements pris à Paris par les Etats pour réduire leurs émissions et qui souligne leur insuffisance globale si le monde veut rester à 1,5°C.
"Le rapport est en jeu", a prévenu samedi en plénière le président des débats, avant de convoquer une réunion`restreinte pour tenter de résoudre le problème, a relaté un témoin.
Les représentants des Etats sont réunis en Corée du Sud depuis lundi, en vue d’une adoption de ce texte, par consensus.
En cas d’impasse, si la contestation vient d’un seul pays, la procédure permet aux chercheurs présidant les discussions de passer outre, en prenant simplement note de l’objection en bas de page.
"C’est assez rare qu’un gouvernement accepte d’avoir son nom au bas de la page, parce que c’est un peu gênant pour lui également. On fait tout pour éviter ça", expliquait il y a quelques semaines le responsable de la communication du Giec, Jonathan Lynn.
Fin 2015 à Paris, Ryad avait adopté, avec le reste du monde, l’accord visant à agir pour garder la planète "bien en-deça de +2°C" et si possible 1,5°, mais s’était tout au long de la négociation fortement opposée à l’ajout du 1,5°, réclamé par les Etats les plus vulnérables.