Christine Lagarde: une ascension météorique assombrie par les affaires
Première femme à diriger le FMI, Christine Lagarde a connu une ascension météorique jusqu’au gotha des leaders mondiaux en se forgeant l’image d’une dirigeante insondable à l’épaisse carapace.
Son nom a même été récemment avancé pour prendre la présidence de la Commission européenne, voire pour concourir à l’Elysée en 2017. Mais son CV immaculé risque désormais d’être terni par sa mise en examen pour "négligence" dans l’affaire de l’arbitrage Tapie-Crédit Lyonnais, qui remonte à l’époque où elle était en France ministre de l’Economie.
"C’est une péripétie dont elle se serait bien passée (…) mais c’est une battante", confie un membre de son entourage.
Ce ne sera pas son premier défi. Propulsée en juillet 2011 à la tête du Fonds monétaire international par Nicolas Sarkozy, l’ex-ministre âgée de 58 ans s’est efforcée de redorer le blason d’une institution traumatisée par la démission de Dominique Strauss-Kahn sur fond de scandale sexuel.
Offrant au FMI le visage plus consensuel d’une femme végétarienne à l’allure sportive et à la chevelure argentée, elle a également soigné son aura internationale en professant, dans un anglais parfait, la bonne parole de l’institution aux quatre coins du globe (Chine, Egypte, Côte d’Ivoire…) tout en gardant un oeil sur la crise de la zone euro.
Franc-parler
Les États-Unis occupent une place à part dans sa carrière. C’est là qu’elle part étudier pendant un an et c’est également outre-Atlantique, des années plus tard, qu’elle prendra la présidence du cabinet d’avocats Baker & McKenzie avant d’être remarquée par la droite française.
Débauchée en 2005, elle deviendra en 2007 la première femme à diriger le ministère de l’Économie en France où elle signera un record de longévité en y restant jusqu’en 2011.
Son adaptation n’a pas été sans heurts. En 2005, pour sa première entrée dans un gouvernement au portefeuille du Commerce extérieur, elle juge le code du travail français "compliqué" et "lourd".
A la tête de l’Economie deux ans plus tard, en pleine flambée des prix des carburants, elle appelle les Français à "utiliser leur bicyclette", contribuant à forger d’elle l’image d’une femme parfois en décalage avec la réalité.
Son arrivée à la tête du FMI n’aura pas totalement raison de son franc-parler. Elle provoquera ainsi un tollé en appelant au printemps 2012 les Grecs, essorés par les plans d’austérité, à payer tous "leurs impôts".
Mme Lagarde n’a pas non plus hésité à froisser ses anciens partenaires européens, malmenés par la crise de la dette, en appelant à recapitaliser leurs banques "d’urgence" ou en réclamant des solutions "durables" aux problèmes de la dette grecque.
Elle s’est récemment chamaillée avec la Banque centrale européenne (BCE), en répétant qu’il existait un risque de déflation en Europe, alors que la BCE ne partageait pas cette analyse.
Mais même certains pays émergents, pourtant très remontés contre la surreprésentation des Occidentaux au sein du FMI, lui rendent hommage.
Sous sa direction, le FMI n’a par ailleurs pas hésité à se porter au secours de l’Ukraine alors même que le pays reste en proie à une insurrection pro-russe dans l’est du pays.
"Mme Lagarde a été plutôt efficace dans sa conduite du FMI", assure à l’AFP un ancien responsable du Fonds, Desmond Lachman.
Le fond de sa pensée économique reste toutefois difficile à cerner, d’autant qu’elle a dû accompagner le lent et tortueux aggiornamento du FMI sur l’austérité.
Du temps où elle était ministre, ses détracteurs assuraient que la politique économique de la France était bien davantage façonnée à la présidence qu’à son ministère.
Discrète sur sa vie privée, Mme Lagarde s’est toutefois autorisée quelques détours vers les pages "people" des magazines en s’affichant avec son compagnon, Xavier Giocanti, un entrepreneur de Marseille (sud).