Nicolas Sarkozy, station terminus?
Même si elle était attendue par son cercle intime, la garde à vue de Nicolas Sarkozy dans un dossier de trafic d’influence présumé et de violation du secret de l’instruction a fait l’effet d’une bombe au sein de la classe politique française. En plus d’être une première dans l’histoire de la Ve république, cette mesure inédite pour un ancien président de la république a secoué l’opinion française. C’est que l’homme se préparait à un grand retour politique digne des hommes providentiels.
Par Mustapha Tossa
Plus que quiconque Nicolas Sarkozy et ses amis savaient que seules ses déboires juridiques pouvaient constituer un frein à son retour. Mais ils étaient loin de se douter que la tournure des événements pouvait prendre un tour aussi dramatique et aussi spectaculaire. Le héros de la droite que s’apprêtait à aduler le noyau dur de l’UMP comme leur porte étendard pour les victoires à venir est en train de subir la discréditante garde à vue.
Les connaisseurs de Nicolas Sarkozy ont toujours relevé que l’homme est un animal politique au cuire dur. Son parcours en dents de scie, ses multiples renaissances et sa capacité à se relancer ont installé la conviction que quoi qu’il subisse, il trouvera toujours en lui et en sa bonne étoile la force de rebondir et de revenir. Sauf qu’aujourd’hui, cette étrange baraka qui l’a porté depuis le début de sa carrière semble l’abandonner de manière brutale.
Nombreux sont ceux qui se réjouissent ouvertement ou en silence des malheurs judiciaires de Nicolas Sarkozy. D’abord les socialistes au gouvernement. Même s’ils ne crient pas leur joie de voir un grand challenger morde la poussière avec autant de violence Ils se sont contentés de servir à la presse des éléments de langage anesthésiants sur la nécessité pour la justice de servir dans le calme et dans la sérénité. Mais au fond de leurs convictions, de voir le joker du camp d’en face se prendre les pieds dans le tapis judiciaire est certainement la plus douce des revanches.
Mais les détracteurs de Nicolas Sarkozy ne sont pas forcément là où la logique politique voudrait les voir. Dans l’élaboration de sa grande stratégie de retour qui se voulait aussi subtile dans son timing que diabolique dans sa confection, Nicolas Sarkozy semble avoir minimisé les résistances de sa propre famille. Aujourd’hui le plus grand obstacle à son retour se niche au sein du leadership de l’UMP dont la majorité n’est pas convaincue de la pertinence de confier à nouveau le flambeau à un homme poursuivi avec autant de hargne par la machine judiciaire.
Et parce que justement les casseroles juridiques tintent bruyamment autour de Nicolas Sarkozy depuis sa défaite aux présidentielles que de nombreuses ambitions ont vu le jour au sein l’UMP. Des hommes prêts à se jeter dans la bataille et à renvoyer l’icône Sarkozy à sa retraite. Entre ceux qui ont un compte historique à régler avec Nicolas Sarkozy comme l’ancien Premier ministre Alain Juppé, et ceux qui veulent prendre une revanche personnelle comme Jean Pierre Raffarin ou François Fillon, même s’ils enrobent leur démarche dans une froideur distanciée.
Nicolas Sarkozy traverse actuellement une dure épreuve, les optimistes diront de celles qui forment les hommes et les caractères, les réalistes de celle qui stoppe un destin et verrouille une carrière. Cette garde à vue a éclairé l’opinion sur les véritables soutiens et sympathies de Nicolas Sarkozy. Signe des temps qui ne trompent pas, seuls les seconds couteaux sont montés au créneau pour défendre Nicolas Sarkozy, dans son nouveau rôle de "repris de justice». Les grandes pointures sont restées tapies dans un silence gêné. Car enfin de compte, l’enjeu de cette garde n’est pas négligeable. Pour beaucoup, son impact politique semble avoir déjà configuré le casting du prochain progrès et pourquoi pas la physionomie des prochaines primaires. Il y a certainement un avant et après garde à vue.