Mike Pompeo en Israël pour discuter « annexion » et Iran
Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo est arrivé mercredi en Israël afin de discuter du projet d’annexion de pans de la Cisjordanie occupée par le nouveau gouvernement israélien, son premier déplacement à l’étranger en près de deux mois.
Outre ce dossier sensible, M. Pompeo doit discuter de l’Iran, ennemi N.1 de l’Etat hébreu qui est soupçonné d’avoir multiplié les frappes contre des positions iraniennes en Syrie voisine ces dernières semaines.
Le secrétaire d’Etat américain est arrivé à l’aéroport Ben Gourion près de Tel-Aviv et est sorti de l’appareil en portant un masque sanitaire aux couleurs du drapeau américain, avant de prendre la route pour Jérusalem où il doit s’entretenir avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu et son ex-rival électoral Benny Gantz.
De manière « préventive », M. Pompeo ne pourra pas rencontrer son ambassadeur David Friedman car ce dernier ressent des « symptômes respiratoires » malgré un test négatif au Covid-19, a précisé à l’AFP un porte-parole de l’ambassade.
Peu avant l’arrivée de M. Pompeo, un adolescent palestinien a été tué par un tir d’un soldat israélien lors de heurts dans le sud de la Cisjordanie, selon le ministère palestinien de la Santé. La veille, un soldat israélien a été tué par le jet de pierre d’un Palestinien dans le nord de ce territoire occupé depuis 1967 par Israël, au coeur des priorités du prochain gouvernement israélien.
Après 17 mois d’une saga politique ponctuée de trois élections, le gouvernement d’union de MM. Netanyahu et Gantz doit prêter serment jeudi devant la Knesset (Parlement) à Jérusalem.
Leur accord de partage du pouvoir prévoit le dévoilement à partir du 1er juillet d’une stratégie pour mettre en oeuvre le projet américain, présenté en janvier à Washington par le président américain Donald Trump dans le but de débloquer le conflit israélo-palestinien.
Le projet, rejeté par les Palestiniens, prévoit de faire de Jérusalem la capitale « indivisible » de « l’Etat juif » d’Israël et l’annexion de la vallée du Jourdain et des plus de 130 colonies israéliennes en Cisjordanie occupée. Le plan prévoit aussi la création d’un Etat palestinien sur un territoire réduit.
« Menace » pour la paix
« La décision sera prise par Israël et je veux savoir ce que le nouveau gouvernement pense à ce sujet », a déclaré Mike Pompeo dans un entretien avec le quotidien Israel Hayom diffusé mardi.
« Les Etats-Unis sont parties prenantes de ce plan », a riposté le négociateur en chef des Palestiniens, Saëb Erakat, soutenant auprès de l’AFP que Washington ne les avait pas contactés pour préparer cette visite.
« Dans nos différents échanges, des dirigeants internationaux nous ont clairement signifié que l’annexion représentait une menace non seulement pour la paix au Moyen-Orient mais pour l’ensemble du système international », a-t-il ajouté.
Au cours de la dernière décennie, sous l’égide de Benjamin Netanyahu, la population dans les colonies israéliennes en Cisjordanie a bondi de 50% pour dépasser les 450.000 personnes, vivant souvent sous tensions avec plus de 2,7 millions de Palestiniens.
Si Benjamin Netanyahu a promis d’appliquer la « souveraineté » d’Israël sur les colonies et la vallée du Jourdain, bande de terre qui compte pour près de 30% de la Cisjordanie, il a désormais devant lui une fenêtre stratégique d’environ quatre mois, entre le 1er juillet et la présidentielle américaine de novembre.
Lorsque M. Pompeo assure que toute décision serait uniquement israélienne, ses commentaires sont « fallacieux » car « l’administration Trump veut vraiment que l’annexion se concrétise », insiste Daniel Shapiro, ambassadeur américain en Israël sous l’ancien président américain Barack Obama.
« Grand Israël » ?
La question des colonies est une question de politique intérieure aux Etats-Unis, où des mouvements évangéliques, soutiens des Républicains de Donald Trump, défendent mordicus le projet d’un « grand Israël » incluant dans ses frontières des territoires en Cisjordanie.
« L’administration Trump est probablement peu préoccupée par les délimitations précises, mais cherche à obtenir un accomplissement (…) à présenter à la base évangélique de M. Trump et aux électeurs juifs de droite, afin de les galvaniser pour l’élection de novembre », assure à l’AFP M. Shapiro.
En Israël, les sondages suggèrent un soutien élevé à l’annexion chez les électeurs de droite, mais pas chez ceux du centre et de la gauche, des tendances représentées dans le gouvernement d’union, notamment par Benny Gantz qui a émis des doutes sur une annexion rapide.
Dans ce contexte, des analystes israéliens s’attendent à des mesures limitées du gouvernement d’union, comme le rattachement à Israël de colonies près de Jérusalem, à moins, selon M. Shapiro, qu’il ne passe son tour pour attendre le nom du prochain locataire de la Maison Blanche.