Marine Le Pen icône triomphante
Lorsque Marine Le Pen avait succédé à son père, il y avait une grande unanimité à considérer que le style de l’héritière, sa force de séduction, son bagout naturel, son charisme de dauphine élevée au lait du calembour gras allaient garantir au Front National une pérennité sur la scène politique Française. Mais rares étaient ceux qui lui prédisaient de pouvoir un jour jouer les premiers rôles. Aujourd’hui les sondages d’opinion la placent en haut de l’échelle des responsables politiques que les Français voudraient un jour jouer un rôle. Un bénédiction pour le Front National d’autant que Marine Le Pen semble plus fructifier sur les erreurs des autres qu’investir sur son propre programme.
Nicolas Sarkozy avait fait un rêve éveillé, maintes fois théorisé par son stratège politique Patrick Buisson, celui de pouvoir capter cette manne électorale dédiée au FN simplement en lui empruntant sa sémantique, sa logorrhée et ses fantasmes. Il perdit cette bataille en perdant les élections. Il laissa, certes un parti, l’UMP, en jachères idéologiques, comme en témoignent aujourd’hui les tensions entre Jean-François Copé et François Fillon, mais aussi un Front National "anobli" cette belle déclaration d’amour de la droite à son égard.
La seconde raison qui fait étinceler l’étoile de Marine Le Pen dans le grand astre de la politique est le récent positionnent du ministre socialiste de l’Intérieur Manuel Valls sur la question des Roms. En voulant parler comme Nicolas Sarkozy, avec l’arrière idée de transmettre à une opinion française dubitative la capacité de la gauche à être aussi intraitable sur la sécurité que la droite, Manuel Valls a déclenché une grande polémique qui risque d’ouvrir la boîte de Pandore à gauche. La violence des critiques qu’il a reçues de la part de ses détracteurs à gauche montre l’ampleur du divorce qui est en train d’être consommé entre gauche de gouvernement et gauche de protestation. Il est vrai qu’enfermé dans la redoutable logique de devoir soutenir son ministre ou de devoir le désavouer avec les césures que cela entraîne, François Hollande à choisi de conforter Manuel Valls.
Là ou pour beaucoup d’analystes, Manuel Valls a commis une erreur stratégique, c’est quand il pense fermement que sa démarche allait affaiblir la droite et l’extrême droite et ne plus leur laisser le monopole de "la virilité" sécuritaire qui fait les beaux scores électoraux. Le résultat de cette posture du ministre le plus emblématique du gouvernement est que l’opinion française a pu faire le constat qu’en l’espace de quelques courtes années, droite Sarkozyste et gauche "hollandaise" ne lésinent pas sur les effets de manches pour attirer dans leurs filets le chaland du FN.
Du haut des son siège nouvellement octroyé par un paternel à l’œil toujours brillant et au jeux de mots faciles, Marine Le Pen voit s’agiter autour de ses idées les grands barons du landerneau. La récente posture de Manuels Valls est comparable à une décision stratégique prise par la gauche au gouvernement d’injecter des jetons de crédibilité, de popularité au corpus idéologique du Front National. Quand Nicolas Sarkozy le faisait, il était possible dans le pire des cas d’y voir un cousinage politique à l’œuvre. Mais quand c’est la gauche qui lui prête le flanc, il s’agit d’une véritable reconnaissance qui aura un impact majeur sur les séquences politiques françaises à venir.
C’est le secret de la flambée de popularité de Marine Le Pen qui voit sa côté flirter avec des cimes inégalés et qui ouvre l’appétit aux ambitions les plus folles. Et s’il faut ajouter à ce tableau l’image d’une droite en charpie et d’une gauche qui a fait de l’hésitation un style de gouvernement, Marine Le Pen pourra laisser gambader son imagination dans les rêves les plus fous y compris celui de réitérer l’incroyable exploit de son père un 21 avril. Le rêve de réaliser des exploits lors des prochaines municipales et d’installer le Front national comme une vraie force politique locale semble pour beaucoup à portée de vote.