Le Parlement tunisien examine vendredi une motion de défiance contre son président, Rached Ghannouchi, également chef du parti d’inspiration islamiste Ennahdha, après une série de virulentes controverses sur sa diplomatie parallèle.
C’est la première fois que le Parlement est amené à se prononcer sur son président, dix ans après la révolution qui a chassé du pouvoir Znie el Abidine Ben Ali, et lancé la démocratisation du pays.
Rached Ghannouchi, 78 ans, qui règne sur Ennahdha depuis sa création il y a quatre décennies, a brigué pour la première fois un mandat électoral lors des législatives d’octobre 2019.
Il a été élu député puis président du Parlement, et s’est retrouvé face à une forte hostilité au sein d’un hémicycle fragmenté, dont les débats ont été régulièrement paralysés.
Il a notamment été critiqué pour avoir eu des échanges au plus haut niveau avec des dirigeants étrangers, alors que la diplomatie est une prérogative du président de la République, et accusé de mener une diplomatie parallèle alignée sur la Turquie.
Le vote est organisé à bulletins secrets et sans débat préalable, ce qui a été critiqué par plusieurs députés ainsi que l’observatoire indépendant du Parlement, Al Bawsala, qui a appelé à une procédure plus « transparente ».
Ce vote pourrait fragiliser la position de M. Ghannouchi au sein d’Ennahdha, alors que son mandat de chef du parti arrive à échéance dans les mois à venir. Le parti, en perte de vitesse, est divisé, et peine à achever sa mue entamée en 2016, après avoir abandonné la prédication religieuse pour devenir une formation civile se voulant « démocrate musulmane », consacrée à la politique uniquement.
Au Parlement, M. Ghannouchi et Ennahdha sont sous le feu du Parti destourien libre (PDL) de l’avocate Abir Moussi, ex-proche du régime de Ben Ali, qui l’accuse quotidiennement d’avoir encouragé la mouvance jihadiste et le terrorisme en Tunisie.
Le président tunisien, Kais Saied, très critique de la démocratie parlementaire et en froid avec Ennahdha, a mis en garde contre un état de « chaos » au sein du Parlement qui « ne fonctionne pas de façon normale », a-t-il déclaré lors d’une rencontre récente avec M. Ghannouchi.