L’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE), chargée de l’organisation du scrutin, continue de compiler et de vérifier les résultats remontés des circonscriptions.
Une annonce pourrait intervenir dans la journée, dit-on de sources proches de la commission électorale.
Selon ses propres chiffres, Ennahda revendique plus de 40% des 217 sièges de l’Assemblée constituante, qui sera chargée de former un nouveau gouvernement provisoire et de rédiger la nouvelle Constitution du pays avant des élections législatives et présidentielle qui devraient intervenir dans un délai d’un an environ.
Ses principaux adversaires ont reconnu la victoire de la formation islamiste, et les résultats partiels déjà disponibles semblent confirmer l’avance prise par les listes du parti de Rachid Ghannouchi.
A ce stade, Ennahda serait assuré d’obtenir 68 sièges. Le Congrès pour la république de Moncef Marzouki, qui arrive en deuxième position, en aurait 23. Ces résultats ne prennent pas en compte les circonscriptions électorales de la capitale, Tunis.
Ennahda a tendu la main aux partis laïques de centre-gauche arrivés derrière lui mais pas à l’homme surprise du premier tour, Hachmi Hamdi.
La "Pétition populaire" de cet homme de médias vivant à Londres et propriétaire d’une chaÂŒne privée – Al Mostakilla – a obtenu d’excellents scores.
Il a notamment battu Ennahda dans la région de Sidi Bouzid, berceau de la révolution tunisienne, dont il est originaire.
"La liste a gagné dans les urnes et nous demandons que le choix du peuple soit respecté. Sinon, les choses vont empirer ici", a dit à Reuters un manifestant de Sidi Bouzid, Mehdi Horchani, évoquant un rassemblement de plusieurs centaines de personnes.
Les islamistes d’Ennahda refusent de former une coalition avec Hamdi, lui reprochant d’être soutenu par des nostalgiques du RCD (Rassemblement constitutionnel démocratique), le parti de l’ancien dirigeant Zine Ben Ali. Al Mostakilla a adopté ces dernières années une ligne éditoriale favorable à l’ancien autocrate.
Face aux inquiétudes que suscite sa probable arrivée au pouvoir parmi la société laïque et les milieux d’affaires, Ennahda, qui se revendique d’un islam modéré, s’efforce depuis dimanche de rassurer sur son programme politique, affirmant notamment qu’il n’envisage pas de revenir sur les droits des femmes, un des acquis de l’indépendance tunisienne.
Mercredi, un de ses principaux dirigeants, Hamadi Jbeli, secrétaire général candidat au poste de Premier ministre, a annoncé qu’il n’était pas question d’imposer un code vestimentaire sur les plages, prises d’assaut par les touristes étrangers.
L’actuel Premier ministre, Beji Caïd Essebsi, affirme jeudi qu’il n’a aucune raison de douter des engagements d’Ennahda en faveur d’un Etat civil et démocratique.
"Il ne m’appartient pas de juger des intentions, c’est à Allah de le faire. Je peux simplement juger ce qui a été rendu public et à ce stade, c’est positif. Au final, nul ne peut arriver et changer totalement les choses", dit-il dans les colonnes du quotidien égyptien Al Ahram.
"Je pense, ajoute-t-il, qu'(Ennahda) gouvernera avec intelligence et fera face à la réalité. Ce n’est pas nécessairement une force obscure. La Tunisie continuera d’aller de l’avant, et non pas à rebours de son histoire."
Les élections tunisiennes, les premières organisées depuis le début du "printemps arabe", et leurs répercussions sont suivies de près à l’étranger, où l’on cherche des indications sur les bouleversements en cours dans cette partie du monde.