C’est l’histoire d’une ministre qui vient d’annoncer un étrange programme, visant à préparer et accompagner les futurs mariés. L’idée est inattendue. D’autres diront saugrenue. En tout cas, la petite histoire gouvernementale retiendra que la ministre de la solidarité, de l’inclusion sociale et de la famille est toute à la préparation, avec ses services, d’un programme « visant à réduire les cas de divorce » au Maroc. Ce n’est pas une plaisanterie, ni une mauvaise blague. C’est même un programme très sérieux qui se décline en plusieurs axes et ce pour soutenir des jeunes couples qui veulent convoler en justes noces : « facilitation à l’accès au logement, à l’emploi et aux opportunités économiques ». Un monument de bonnes intentions et les futurs jeunes mariés doivent savoir en rendre grâce à la ministre Naïma Ben Yahia.
Cette « s’en va –t-en guerre » contre les divorces n’entend pas s’arrêter en si bon chemin. Dans son programme anti-divorce et mariage pour la vie, elle a inclus des modules « en présentiel et en ligne » destinés « à la formation et la sensibilisation » de ceux et celles qui s’apprêtent à se dire oui. Ça ne s’invente pas !
Formation et sensibilisation au mariage, le module laisse songeur et pousse à la réflexion les plus philosophes. Les temps ont bien changé. Se marier est désormais un module qui s’enseigne en présentiel ou à distance. C’est un cours qui est dispensé. Il a ses théorèmes, ses règles, ses principes. Peut-être même ses algorithmes.
« Ils se rencontrèrent, se marièrent et eurent des enfants », c’est juste dans les contes de fées. Dans les faits, il y a aussi « ils divorcèrent ». Et ça, la ministre de la famille n’en veut pas du tout. Cela sonne comme un aveu d’échec surtout quand on est ministre de la famille, et que la famille se disloque pour cause de divorce. D’où les modules pour remettre de l’ordre dans ces structures familiales en devenir et avant même contraction du mariage.
L’ambitieux programme de la ministre issue des rangs de l’Istiqlal, le parti fondé par Allal Al Fassi et qui assume son étiquette de formation politique conservatrice, ne dit pas si un diplôme « apte au mariage » est remis à l’issue de la formation qu’elle soit en présentiel ou ligne.
On ne saura pas non plus quel sera le sort de ceux et celles qui n’auront pas réussi ladite formation. Seront-ils interdits de mariage, histoire de ne pas faire grossir les statistiques du divorce en terre marocaine ? Les futurs couples, mauvais élèves de la formation de la ministre, auront-ils droit à une deuxième chance au grattage, après avoir perdu au tirage ?
Mme Naima Ben Yahia est ministre de la famille. Ce qui ne l’empêche pas de prendre très au sérieux la mission de marieuse qu’elle s’est attribuée. Elle compte lancer, annonce-t-elle, un débat national pour « élaborer une vision commune d’une politique publique de préparation au mariage ».
Une politique publique relative à toutes les formes de violences (sexuelles, numériques, économiques, sociales…) à l’encontre des Marocaines ne fait visiblement pas partie des urgences de la marieuse de l’Exécutif. Aux larmes citoyennes !
