Les plus sages et les moins zélés de l’institution militaire algérienne doivent aujourd’hui se poser cette question: que faire des milices du Polisario maintenant que la communauté internationale a adopté l’option de l’autonomie proposée par la Maroc et que le Sahara n’a de présent et d’avenir que sous souveraineté marocaine?
Même si elle n’est pas posée publiquement en Algérie, la méthode Coué étant la perception générale des autorités algériennes de cette crise, cette interrogation travaille les cénacles algériens alors que se rapproche à grands pas le scénario tant redouté d’un placement du Polisario sur la liste des organisations terroristes.
Dans le cadre de l’application des modalités de l’autonomie, le sort des Sahraouis réfugiés dans les camps de Tindouf est forcément différent de celui des milices armées du Polisario. Aux premiers s’ouvre le chemin du retour à leur patrie marocaine, avec ses provinces sahariennes internationalement reconnues, à travers le processus de l’autonomie. Aux seconds s’imposera fatalement la logique du désarment et du démantèlement. La fin politique de cette crise rend anachronique leur existence même dans cette région.
D’où cette question qui ne manque pas de pertinence: que fera l’armée algérienne de ces milices qu’elle a gavées d’armements et bercées d’illusions pendant des décennies? De nombreux scénarios s’imposent, des plus utopiques aux plus radicaux. Le moins coûteux sur le plan sécuritaire est qu’une fois que le régime algérien arrive au constat qu’il n’y a pas d’autres solutions que l’autonomie marocaine, ce qui finira par arriver malgré toutes les apparences et les coups de menton d’Alger, il se rallie à cette nouvelle position politique avec une nouvelle vision militaire. Celle-ci passera forcément par la dissolution de ces milices armées, l’arrêt de leurs financements et la mise en quarantaine de leurs éléments les plus belliqueux. Deux éléments qui vont signer la fin du Polisario.
À n’en pas douter. Au fur et à mesure que s’approchera la date fatidique de l’application de l’autonomie, les grandes contradictions algériennes sur le Polisario vont apparaître au grand jour. Le risque d’une rébellion interne de ceux qui refuseront de déposer les armes est grand. Le Polisario, avec ses milices armées, deviendra un fardeau sécuritaire pour le régime algérien. La manière de le traiter décidera de la situation politique du pays. Faudrait-il intégrer ses éléments dans l’armée populaire algérienne de façon à ne pas laisser ces milices dans la nature? Ou faudrait-il veiller à organiser leurs déplacements vers les pays voisins pour les cacher aux regards scrutateurs des observateurs internationaux chargés de veiller à la sécurité de la région? Selon de nombreuses sources, cette opération a déjà commencé à destination d’un pays comme la Tunisie, actuellement sous totale influence algérienne.
Fardeau sécuritaire, défi politique? Le Polisario risque d’avoir un effet boomerang sur le régime militaire algérien. De sa bonne gestion dépendra en grande partie la stabilité du pays. Il est à prévoir que, parallèlement à la clôture politique de cette discorde régionale, une séquence de règlements politiques à travers des assassinats et des exécutions peut s’ouvrir en Algérie. Une manière de purger une période lourde de mauvais choix et d’entêtements contre toute logique.
L’Algérie a de fortes chances de vivre une période où la guerre de clans, au sens propre du terme, peut avoir lieu. Une guerre entre ceux qui veulent aller jusqu’au bout dans l’aventure séparatiste, quitte à payer le prix politique et sécuritaire fort, et ceux qui veulent se débarrasser du principal dossier qui empoisonne les relations entre l’Algérie et son environnement régional et international.