Merkel critiquée en Allemagne pour son soutien à Sarkozy

L’opposition comme ses partenaires libéraux au sein de la coalition jugent «embarrassant» ce soutien affiché de la chancelière au chef de l’État français. Angela Merkel n’en a cure.

Merkel critiquée en Allemagne pour son soutien à Sarkozy
Le soutien inoxydable d’Angela Merkel à son allié français, Nicolas Sarkozy, provoque des remous outre-Rhin. Les critiques fusent aussi bien des rangs de l’opposition – sociaux-démocrates/écologistes – que de ses partenaires de coalition, les libéraux du FDP. Cela ne trouble en rien la chancelière. Comme elle l’a réaffirmé, lundi aux côtés du président français, il n’y a rien de plus «normal» que de soutenir ses amis en politique … surtout lorsqu’il s’agit de servir ses propres intérêts.

Le quotidien de centre-gauche, Süddeutsche Zeitung, s’interroge: Merkel se rend-elle en France en tant que chancelière pour négocier avec le président ou pour soutenir Nicolas Sarkozy dans le combat électoral? De son côté, le journal conservateur Die Welt juge que la chancelière en fait trop. L’intervention de Merkel dans la campagne française est «compréhensible, mais dangereuse», écrit le journal .

Le chef du parti social-démocrate, Sigmar Gabriel a jugé «plutôt embarrassante» l’interview commune de Nicolas Sarkozy et Angela Merkel aux chaînes publiques française et allemande. Gabriel estime qu’ensemble le président français et la chancelière allemande ont été incapables de trouver des réponses aux problèmes de l’Europe. Selon lui, Merkel n’a pas forcément rendu service à Sarkozy en s’affichant à ses côtés. Le SPD a annoncé qu’il soutiendra activement la candidature de François Hollande. Jürgen Trittin, patron du groupe Vert au Bundestag, affirme que Merkel «porte atteinte aux relations franco-allemandes» en s’immisçant dans la campagne électorale française.

«Le gouvernement fédéral restera neutre»

Pis, le ministre allemand des Affaires étrangères et ancien vice-chancelier libéral, Guido Westerwelle, a protesté ouvertement contre le soutien de la chancelière au président français: «le gouvernement fédéral ne doit pas prendre part à la campagne électorale française», a-t-il dit dans un entretien au Spiegel. Avant d’enfoncer le clou sur la chaîne publique ARD: «Bien entendu, le gouvernement fédéral restera neutre dans la campagne française. Chaque gouvernement légitimé démocratiquement en France sera un bon partenaire pour l’Allemagne».

La chancelière ne l’entend pas ainsi. Avec 64 % d’opinions favorables et 90 % de soutien à sa gestion de la crise de l’euro, elle juge qu’elle peut se permettre les critiques de quelques détracteurs. Merkel n’a pas apprécié la récente apparition de François Hollande devant le congrès du SPD, au cours de laquelle il s’était prononcé en faveur d’«eurobonds», qu’elle rejette catégoriquement. Ses conseillers auraient remisé au fond d’un tiroir la demande de rendez-vous du candidat socialiste… En attendant de trouver une excuse crédible pour ne pas trop le froisser. Dans l’entourage de la chancelière, on estime que même en cas de victoire de Hollande, Berlin pourra arguer qu’après les sorties anti-allemandes du PS, Merkel et Hollande sont quitte et peuvent repartir sur de nouvelles bases.

Cependant la chancelière compte dur comme fer sur la réélection du président français. Vu de Berlin, Merkel ne s’immisce pas dans la campagne électorale d’un pays voisin en soutenant son ami Sarkozy: elle fait de la politique intérieure. Car avec le candidat socialiste, Merkel redoute l’arrivée au pouvoir en France d’une sorte d’Oskar Lafontaine, le chef de la gauche radicale allemande, qui remettrait en cause le nouveau pacte fiscal européen pour lequel elle s’est tant battue. La chancelière sait qu’elle peut s’appuyer sur le président français pour imposer sa discipline budgétaire à l’Europe. Si Sarkozy perd, c’est toute la stratégie européenne de la chancelière qui risque de s’effondrer.

Les ténors conservateur de la CDU sont rangés en ordre de bataille derrière leur chancelière. Ils estiment qu’avec Hollande la «culture de stabilité» que l’Allemagne cherche à insuffler à l’Union européenne est en danger. Pour eux, Sarkozy, qui vante le modèle allemand, sa règle d’or, ses réformes sociales et sa productivité, est devenu le meilleur porte-drapeau des valeurs germaniques en Europe. À l’inverse, les sociaux-démocrates allemands avaient été embarrassés par le candidat socialiste français si frileux à l’égard de la règle d’or, pièce maîtresse du consensus allemand.

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