L’armée américaine cherche à contrer l’apparence d’un affaiblissement
L’armée américaine est touchée par le Covid-19 mais son chef d’état-major a tenu à mettre les choses au clair jeudi: même si un de ses porte-avions est immobilisé dans le Pacifique, elle répondra à toute attaque.
« Nous sommes prêts, quelle que soit la menace », a déclaré le général Mark Milley au cours d’une téléconférence destinée aux forces américaines. « J’espère que personne dans le monde ne croit que les capacités de l’armée américaine sont sérieusement affaiblies. Ce n’est pas le cas ».
Le Pentagone publie chaque jour depuis le début de la pandémie le nombre de cas positifs au Covid-19, d’hospitalisations et de décès en son sein, y compris parmi les employés civils et dans les familles des militaires.
Mais il a cessé très rapidement de préciser où exactement les cas avaient été décelés, invoquant la sécurité de ses soldats.
Jeudi, le magazine Newsweek a publié une carte des bases américaines touchées par le virus: elles étaient 150 à l’être.
L’expert en armement nucléaire Hans Kristensen, de la Federation of American Scientists, a remarqué que toutes les bases nucléaires américaines étaient affectées, sauf une.
Selon les chiffres du Pentagone, 1.898 cas avaient été recensés au total jeudi matin au sein des forces armées américaines, dont 597 dans l’US Navy, la plus touchée. 64 soldats ont été hospitalisés et un est décédé.
Les deux tiers des cas recensés dans la Navy (416) proviennent du porte-avions USS Theodore Roosevelt, immobilisé à Guam, île américaine du Pacifique, où la grande majorité de l’équipage a été évacuée.
Un marin du Theodore Roosevelt a été hospitalisé après avoir été trouvé inanimé par un de ses camarades, a indiqué jeudi à la presse le numéro deux de l’état-major, le général John Hyten.
Le Pentagone est en train de réévaluer la façon de protéger les équipages des porte-avions, qui, avec 5.000 personnes, sont plus difficiles à isoler en quarantaine que ceux d’un navire plus petit, a-t-il ajouté.
« Croire que ça ne va pas se reproduire n’est pas une bonne façon de planifier », a noté le général Hyten.
Désinformation
Les militaires ont mis en place dès début mars un système de « bulles » autour des équipages des sous-marins nucléaires et des bases abritant des silos nucléaires.
Deux équipages sont placés en quarantaine en parallèle pendant deux semaines avant d’embarquer à bord d’un sous-marin ou de prendre son service dans les unités de surveillance de l’arsenal nucléaire.
Si un cas est décelé au sein d’une équipe, elle est isolée et soignée et une autre se met en quarantaine. Seules les équipes saines embarquent.
Des cas de Covid-19 ont été décelés au sein des équipages de trois autres porte-avions américains qui sont à quai et dont le déploiement n’est pas prévu avant plusieurs mois: le Ronald Reagan, en cours de maintenance au Japon, ainsi que le Carl Vinson et le Nimitz, tous deux en maintenance dans l’Etat de Washington (nord-ouest).
Selon la Navy, les malades ont été évacués, soignés et ont depuis récupéré. L’équipage du Nimitz, qui doit être déployé à l’été, reste à bord pour éviter autant que possible toute nouvelle contamination.
Les informations sur la contamination au sein de l’armée américaine sont disponibles, mais les rumeurs et la désinformation continuent, notamment en provenance de la Russie, a indiqué Laura Cooper, chargée de la Russie au sein du ministère américain de la Défense.
« Nous avons vu pas mal de forums d’information s’animer sur le niveau de préparation de l’armée des Etats-Unis et d’autres pays », a-t-elle précisé jeudi à la presse.,
« Ce discours existe », a admis le général Milley. Mais « je ne voudrais pas que nos adversaires pensent qu’ils peuvent profiter de l’opportunité en cette période de crise ».
Un total de 2.000 cas sur une armée de 2,3 millions de militaires, « ce n’est pas énorme », a-t-il souligné.
L’armée américaine base sa stratégie sur le principe selon lequel « démontrer sa puissance » est la meilleure défense, car personne n’oserait s’attaquer à elle.
C’est pourquoi l’incident du Theodore Roosevelt a tellement gêné la hiérarchie militaire, soucieuse de garder les apparences, ce qui a conduit le commandant du porte-avions à rappeler dans une lettre brûlot que les Etats-Unis « ne sont pas en guerre ».
Le commandant a été limogé par le secrétaire à la Navy, Thomas Modly, qui a ensuite dû démissionner en raison de sa gestion très critiquée de la crise.