L’Autriche crée un « état d’urgence » migratoire sur fond de poussée d’extrême droite

Le parlement autrichien a adopté mercredi une loi qui prévoit la possibilité de décréter un "état d’urgence" migratoire supprimant quasiment le droit d’asile, sur fond de montée de l’extrême droite dans ce petit pays qui a accueilli 90.000 réfugiés en 2015.

Elaboré depuis plusieurs mois et décrié par des ONG et une partie de l’opposition, ce texte, l’un des plus restrictifs d’Europe qui n’a d’équivalent qu’en Hongrie, permettra dans certaines circonstances de bloquer les migrants aux frontières sans même leur accorder la possibilité de formuler une demande d’asile.

Sous ce régime, mis en oeuvre si les services de l’Etat sont jugés "dépassés", tous les demandeurs d’asile, y compris les Syriens et les Irakiens, seront refoulés aux frontières, à moins de prouver qu’ils sont persécutés par le pays d’où ils arrivent, par exemple l’Italie.

La nouvelle loi, adopté par 98 voix contre 67, limite aussi à trois ans l’octroi initial du droit d’asile, une mesure déjà en vigueur dans d’autres pays européens comme l’Allemagne. Elle restreint le regroupement familial pour les bénéficiaires de la protection subsidiaire, un statut moins favorable que l’asile et qui concerne principalement des Afghans.

"Nous ne pouvons pas accueillir toute la misère du monde", a expliqué le nouveau ministre de l’Intérieur Wolfgang Sobotka, assurant que le gouvernement n’agissait "pas par plaisir, mais parce que d’autres pays ne font pas leur travail" en matière de contrôles des migrants.

Située au croisement des deux principales routes migratoires en Europe – via les Balkans et via l’Italie – l’Autriche a vu transiter plusieurs centaines de milliers de réfugiés en 2015. Elle en a accueilli 90.000, soit plus du 1% de sa population, dépassée seulement par la Suède au sein de l’UE.

Pour 2016, Vienne s’est fixé un plafond de 37.500 demandeurs d’asile supplémentaires, assurant que ses capacités d’intégration arrivent à saturation.

Saluée pour sa générosité au plus fort de la crise, à l’automne, la grande coalition gouvernementale du chancelier social-démocrate Werner Faymann et du vice-chancelier conservateur Reinhold Mitterlehner a, depuis, fortement durci sa politique, dans un contexte de montée du parti d’extrême droite FPÖ.

Créant un véritable "séisme" dans le pays, le candidat FPÖ Norbert Hofer a recueilli 35% des voix au premier tour de la présidentielle dimanche. Et les deux partis au pouvoir ont été éliminés du second tour au profit d’un écologiste.

La création d’un "état d’urgence" a été vivement combattue par les Eglises, les défenseurs des droits de l’Homme et l’opposition écologiste et libérale.

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