Véritable "séisme" politique, l’opposition de gauche a remporté dimanche la majorité absolue au Sénat à l’occasion du renouvellement de la moitié de sièges de la chambre haute du Parlement, contrô lée par la droite depuis 1958.
Passé le choc des résultats, chaque camp s’est projeté en 2012. Le Parti socialiste (PS) voit dans le basculement à gauche du Sénat les prémices d’une victoire au printemps prochain tandis que le parti présidentiel UMP relativise la portée du vote et affiche toujours sa confiance en son probable candidat à la présidentielle, Nicolas Sarkozy.
Seul le ministre Bruno Le Maire reconnaissait lundi "un sérieux avertissement" pour la majorité, ajoutant que les Français "sont inquiets".
Si une possible victoire de la gauche aux sénatoriales était évoquée, le choc est rude pour Nicolas Sarkozy: l’opposition détient désormais 177 sièges de sénateurs, soit 2 de plus que la majorité absolue au Sénat (348 sièges).
Elle contrô le une institution chargée avec l’Assemblée nationale d’examiner et de voter projets de lois, traités et conventions internationales. Même si la Constitution accorde un rô le prééminent à l’Assemblée, la gauche aura maintenant la possibilité de faire retarder l’adoption de textes au Parlement.
Le Sénat était pourtant considéré comme un place forte imprenable grâce à un mode de scrutin indirect complexe, qui assure une sur-représentation aux régions rurales considérées comme favorables à la droite. Mais les succès de la gauche aux derniers scrutins locaux et régionaux ont modifié la composition des grands électeurs appelés à voter.
Pour Nicolas Sarkozy, le résultat du scrutin ponctuait une semaine cauchemardesque avec de nouveaux rebondissements dans l’affaire dite de Karachi, un dossier de corruption et de financements politiques illégaux liés à une vente de sous-marins au Pakistan.
Deux de ses proches ont ainsi été mis en examen (inculpés) par le juge qui enquête sur de supposées valises de billets ayant circulé entre le Pakistan et la France pour financer la campagne de l’ancien Premier ministre, Edouard Balladur, à la présidentielle de 1995.
Puis ce fut au tour de l’ex-ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, pressenti pour être son directeur de campagne en 2012, d’être pris dans la tourmente. Il est soupçonné d’avoir eu accès au dossier du juge d’instruction et d’avoir averti l’un des mis en examen.
Cette affaire, pour laquelle l’Elysée a démenti toute implication du chef de l’Etat, n’a certainement pas joué en faveur de la droite aux sénatoriales.
Les socialistes, en campagne pour la primaire chargée de désigner leur candidat à la présidentielle, y voient un mouvement plus profond et espèrent retrouver la présidence de la République, perdue depuis le départ de François Mitterrand, au pouvoir de 1981 à 1995.
Il y a "un désir d’alternance", expliquait lundi Pierre Moscovici, un proche de François Hollande, favori des sondages pour la primaire.
Nicolas Dupont-Aignan, un ancien du parti présidentiel passé dans la droite souverainiste, a même appelé le chef de l’Etat à ne pas se représenter en 2012, expliquant une défaite éventuelle de son camp par "l’allergie de notre peuple à la présidence Sarkozy".
Le président du Sénat sera élu le 1er octobre. Une élection à forte valeur symbolique car il est le deuxième personnage de l’Etat dans l’ordre protocolaire, assurant l’intérim du président en cas d’incapacité ou de décès.
La ministre des Sports Chantal Jouanno participera au vote. Elue dimanche soir, elle a annoncé lundi sa démission du gouvernement.