Ce mouvement exclut toute élection d’un successeur à Abdelaziz Bouteflika, poussé à la démission en avril sous la pression conjuguée de la rue et de l’armée, sans un départ préalable du "système" au pouvoir depuis deux décennies.
Si en début d’après-midi — quand commencent habituellement des manifestations– les rues de la capitale algérienne étaient quasiment vides, elles se sont remplies au fur et à mesure, et des milliers de personnes se trouvaient dans les rues d’Alger en milieu d’après-midi.
"Le peuple veut renverser Gaïd Salah", "Mettez-nous tous en prison", "Le peuple ne s’arrêtera pas", scandaient-ils, en référence à Ahmed Gaïd Salah, chef d’état-major de l’armée et véritable homme fort du pays.
Avant le début de la manifestation, des photographes de l’AFP ont vu des membres des forces de l’ordre arrêter plusieurs manifestants à proximité de la place de la Grande Poste, point de rassemblement phare du mouvement de contestation, dans le centre-ville.
La police a multiplié ces dernières semaines les arrestations à Alger avant le début des manifestations hebdomadaires du vendredi. Trois figures de proue de la contestation ont été arrêtées récemment en l’espace d’une semaine.
La mobilisation était cependant au rendez-vous, et ce également en dépit d’un déploiement des forces de sécurité encore plus important que lors des vendredis précédents.
La police était fortement présente dans le centre de la capitale et sur les axes y menant. Elle a arrêté des véhicules dans les rues principales de la capitale menant notamment à la Grande Poste.
Un journaliste de l’AFP a vu des policiers en civil examiner les papiers d’identité de nombreux passants, et certains d’entre eux ont été interpellés puis mis dans des camions.
Circulation bloquée
À l’entrée sud-ouest de la capitale, des membres des forces de l’ordre ont stoppé des voitures venant de l’extérieur d’Alger.
Sur les médias sociaux, des militants ont fait état d’un embouteillage s’étendant sur "plusieurs kilomètres" aux entrées de la capitale.
Un hélicoptère de la police survole la capitale depuis le matin.
Faisant fi du refus du mouvement de contestation de la tenue d’une élection, le pouvoir a choisi le passage en force en annonçant dimanche une nouvelle date pour la présidentielle, fixée au 12 décembre.
La présidentielle pour élire un successeur à M. Bouteflika, initialement prévue le 4 juillet, avait dû être annulée, aucun candidat ne s’étant déclaré, face à l’ampleur de la contestation.
"Il n’y a pas lieu, pour quiconque, de chercher des faux prétextes pour remettre en cause l’intégrité du processus électoral ou l’entraver", a lancé mercredi lors d’un discours M. Gaïd Salah.
A cette occasion, il a indiqué que l’armée empêcherait désormais les manifestants des autres régions de se joindre aux cortèges à Alger.
Il a motivé cette décision par l’existence de "certaines parties (…) aux intentions malveillantes" qui drainent "chaque semaine des citoyens (…) vers la capitale afin d’amplifier les flux humains dans les places publiques, avec des slogans tendancieux qui n’ont rien d’innocent".
"Leur véritable objectif est d’induire l’opinion publique en erreur (…) pour s’autoproclamer fallacieusement comme les porte-voix du peuple", a-t-il tonné.
Cette mesure a été dénoncée comme "illégale" par Me Saïd Salhi, vice-président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’Homme (LADDH).
Selon lui, il n’existe "aucune réglementation en ce sens, bien au contraire: la Constitution garantit aux Algériens l’égalité citoyenne et la liberté de circulation".