Le haut dirigeant palestinien Saëb Erakat emporté par le coronavirus
Saëb Erakat, l’une des personnalités politiques palestiniennes les plus connues à l’étranger, est décédé mardi à l’âge de 65 ans après avoir contracté le nouveau coronavirus, laissant les Palestiniens orphelins d’un « grand combattant » pour la paix.
Atteint de fibrose pulmonaire et greffé du poumon, le secrétaire général de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) est décédé à l’hôpital Hadassah de Jérusalem, où il avait été admis le 18 octobre.
Sa dépouille a été transférée vers un hôpital de Ramallah, ville de Cisjordanie occupée où une cérémonie militaire doit être organisée mercredi matin. Erakat sera ensuite enterré à Jéricho, dans la vallée du Jourdain.
« Pleurant » la mort de son « ami » et « frère », le président palestinien Mahmoud Abbas a déploré une « perte immense pour la Palestine et pour notre peuple ».
« A la Palestine manque aujourd’hui un chef patriotique, un grand combattant qui a joué un rôle crucial dans l’élévation du pavillon de la Palestine », a-t-il ajouté, décrétant un deuil national de trois jours.
Erakat passait pour l’un des successeurs potentiels du président Abbas âgé de 85 ans.
En tant que négociateur en chef côté palestinien, il avait participé à de nombreux pourparlers de paix avec Israël, actuellement dans l’impasse.
« Attristée », l’ancienne négociatrice israélienne Tzipi Livni a présenté ses condoléances « aux Palestiniens et à la famille » de M. Erakat. « Saëb a consacré sa vie à son peuple. Malade, il m’avait écrit: +Je n’ai pas terminé de faire ce pour quoi j’étais né+ », a-t-elle écrit sur Twitter.
« Docteur Saëb »
Celui qui était communément appelé « Docteur Saëb » avait récemment critiqué la normalisation des relations entre Israël et des pays arabes du Golfe, décidée sans paix préalable entre Palestiniens et Israéliens.
Dans une vidéo-rencontre en août dernier avec des journalistes, il avait fustigé cette normalisation qui « mine la possibilité de la paix » israélo-palestinienne.
Elle « renforce les extrémistes » chez les Israéliens et les Palestiniens, les premiers pensant ne plus avoir besoin de négocier avec les Palestiniens et les seconds ne plus avoir à attendre quoi que ce soit d’Israël, affirmait-il.
« Saëb ne verra pas son peuple libéré de l’occupation (israélienne, NDLR), mais des générations de Palestiniens se souviendront de lui comme l’un des géants qui a consacré sa vie à l’indépendance », a affirmé sur Twitter Ayman Odeh, chef de la « Liste unie » des partis arabes israéliens.
« Vous nous manquerez mon ami », a tweeté l’émissaire de l’ONU pour le Moyen-Orient, Nickolay Mladenov. « Vous êtes resté convaincu qu’Israël et la Palestine pouvaient vivre en paix, n’avez jamais abandonné les négociations et avez défendu fièrement votre peuple. »
Le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres s’est dit « attristé » par la mort de son « ami ». « Il est temps de continuer son travail crucial pour mettre fin au conflit », a-t-il ajouté, réitérant l’engagement de l’ONU à soutenir les « efforts » pour une « solution à deux Etats ».
Le chef du Hamas, Ismaïl Haniyeh, a présenté les « condoléances » du mouvement islamiste palestinien aux « frères » du Fatah, parti laïc de MM. Abbas et Erakat.
« Sa mort représente une grande perte pour le peuple palestinien et pour le processus de paix au Moyen-Orient », a estimé le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell. Sur Twitter, le département d’Etat américain a aussi présenté ses condoléances.
Soigné en Israël
L’hôpital Hadassah Ein Kerem de Jérusalem, qui l’avait admis à la demande de responsables de l’Autorité palestinienne, avait qualifié de « défi » le fait de soigner M. Erakat en raison de ses problèmes pulmonaires.
Son hospitalisation était survenue quelques mois après la décision de l’Autorité palestinienne de stopper la coopération avec Israël, ce qui a notamment eu pour effet de compliquer les transferts médicaux de Palestiniens vers des hôpitaux israéliens.
Après être arrivé « dans un état grave », M. Erakat avait été mis sous respirateur et endormi, puis sous assistance respiratoire extracorporelle (Ecmo), selon l’hôpital.
Son transfert depuis son domicile de Jéricho, en Cisjordanie occupée, vers un hôpital israélien avait suscité des critiques de manifestants en Israël se demandant pourquoi l’Etat hébreu acceptait de soigner, selon eux, un « ennemi » palestinien.