Sahraouis brûlés vifs: des rapporteurs spéciaux du HCDH-ONU pointent la responsabilité directe d’Alger dans les exécutions extrajudiciaires

Dans un rapport, les rapporteurs spéciaux du Haut Commissariat des Nations unies aux Droits de l’Homme (HCDH) pointent la responsabilité des forces de sécurité algériennes dans des exécutions extrajudiciaires notamment celle de deux sahraouis, brûlés vifs dans un site minier au sud de la ville algérienne d’Auinet Balakraa.

Selon les informations reçues par les rapporteurs et consignés dans le rapport, un groupe de chercheurs d’or sahraouis résidant dans les camps de Tindouf aurait été surpris, le 19 octobre 2020, par une patrouille de l’armée algérienne dans un site minier à proximité du « camp de Dakhla », au sud de la ville algérienne d’Auinet Balakraa. Les orpailleurs sahraouis cherchaient de l’or dans un site minier non autorisé. Après avoir entendu des coups de feu tirés dans leur direction par les soldats de l’armée algérienne, ils se sont précipités dans la tranchée de six mètres de profondeur pour se cacher.

La patrouille militaire a mis le feu à la fosse minière à l’aide de couvertures imbibées d’essence et quitté le lieu sans se soucier du sort des Sahraouis et sans leur apporter de l’aide, souligne le rapport des rapporteurs spéciaux du HCDH.

« Aucune information n’est disponible indiquant si la patrouille militaire aurait émis un ordre de reddition », précisent-ils.

« Cela a entraîné la mort de Maha Ould Hamdi Oudl Suielem, 42 ans, et Ali Idrissi, de 34 ans, qui ont tenté d’échapper à l’incendie, mais ils sont morts de blessures graves malgré leur transfert à l’hôpital du « camp de Dakhla » dans la ville de Rabouni, en Algérie, dans des circonstances inconnues », alertent les rapporteurs.

« Le 26 octobre, les corps des deux victimes ont été remis à leurs familles au camp de « Dakhla ». Selon les informations reçues, aucune enquête n’aurait été ouverte sur les circonstances de la mort de deux hommes et les coupables n’auraient pas été poursuivis », pointe encore le rapport.

« Ces violations feraient partie d’une tendance plus générale de violations systématiques qui auraient été commises par les forces de sécurité algériennes à l’encontre des réfugiés sahraouis et des mineurs migrants », déplore les rapporteurs spéciaux du Haut Commissariat des Nations unies aux Droits de l’Homme  ().).

HCDH exige des enquêtes

dans le rapport,  les rapporteurs spéciaux se disent « préoccupés par l’absence d’enquêtes, de poursuites et de sanctions » concernant les l’exécution des deux réfugiés sahraouis.

« L’Algérie doit enquêter sur les abus et les violations des droits humains dans les camps de Tindouf y compris l’incident souligné dans cette lettre et les sanctionner, car les abus allégués se sont produits sur le territoire algérien et relèvent donc de la juridiction territoriale de l’Algérie », dénonce le HCDH.

A cet égard, ils rappellent que « tous les décès concernant les migrants et les réfugiés, engageant la responsabilité de l’État, doivent faire l’objet d’investigations rigoureuses ».

« Nous rappelons en outre que l’absence d’investigations entraine des conséquences graves, comprenant la création et la persistance d’un climat d’impunité ainsi que l’absence de toute forme de réparation aux familles des victimes, et allant jusqu’à la violation du droit à la vie », ajoutent-ils.

En effet, selon le rapport, « chaque décès doit faire l’objet d’investigations au cas par cas, afin d’établir l’identité du défunt, les causes du décès et les personnes responsables », estimant que les familles des victimes ont le droit de participer aux enquêtes afin de connaitre la vérité sur la mort de leurs proches, l’emplacement de leurs restes et d’obtenir une réparation adéquate ainsi que des garanties de non- répétition.

Alger sommé de répondre  

Les rapporteurs, en vertu des mandats qui leur ont été confiés par le Conseil des droits de l’homme, exigent du pouvoir algérien d’apporter des réponses claires à l’exécution des deux Sahraouis et ont dressé une liste de requêtes à satisfaire:

  • « Veuillez nous fournir toute information ou tout commentaire complémentaire en relation avec les allégations susmentionnées.
  • Veuillez fournir toute information relative aux enquêtes ouvertes au sujet des allégations susmentionnées ou qui vont éventuellement être diligentées. Dans l’éventualité où les coupables présumés de ces violations auraient été identifiés, veuillez nous faire parvenir les détails complets sur toute procédure judiciaire qui aurait été entreprise à ce sujet.
  • Veuillez fournir toute information relative aux mesures adoptées, ou qui vont être adoptées, pour assurer le plein respect des droits des familles de toute personne qui serait victime des allégations susmentionnées, notamment en ce qui concerne leur droit à une réparation adéquate, y compris sous forme d’indemnisation, ainsi que des garanties de non-répétition.
  • Veuillez indiquer si des mécanismes de plainte indépendants sont à la disposition des réfugiés et autres personnes résidant dans le camp et quelles mesures sont prises pour garantir qu’ils ne feront pas l’objet de représailles et de mesures de rétorsion ou intimidation.
  • Au sujet des préoccupations exprimées à l’égard des violations des droits humains qui auraient été commises à l’encontre des réfugiés sahraouis et des mineurs migrants, veuillez indiquer quelles mesures le Gouvernement de votre Excellence prend pour prévenir et enquêter sur l’usage excessif de la force par les forces de l’ordre contre ces populations vulnérables« .

En attendant une réponse claire et précise d’Alger, les rapporteurs spéciaux, Agnes Callamard, rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, Nils Melzer, rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et Felipe González Morales, rapporteur spécial sur les droits de l’homme des migrants, pressent presse le pouvoir algérien d' »assurer la protection des droits et des libertés des individus mentionnés, de diligenter des enquêtes sur les violations qui auraient été perpétrées et de traduire les responsables en justice ».

 

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