Le Premier ministre, Édouard Philippe, reçoit tour à tour les organisations syndicales et patronales déjà consultées pendant 18 mois par le haut-commissaire aux retraites Jean-Paul Delevoye qui, nommé mardi au gouvernement pour défendre le projet devant le Parlement, est également présent, comme la ministre des Solidarités, Agnès Buzyn.
Force ouvrière, qui avait séché la dernière séance avec M. Delevoye, a ouvert le bal à 10H30. Son secrétaire général, Yves Veyrier, n’a pas fait de déclaration à son arrivée.
La concertation devait se poursuivre avec la CFTC puis la CFDT, le Medef et la FNSEA. Vendredi, ce sera au tour de l’U2P, l’Unsa, la CGT, la CFE-CGC et enfin la CPME.
"Je suis un peu dans le flou sur la méthode", a raillé sur franceinfo le patron du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, en référence à la cacophonie gouvernementale des derniers jours sur le calendrier.
Mais le Premier ministre n’entend pas lever le voile dans l’immédiat. "C’est seulement une fois (…) que j’aurai essayé de synthétiser l’ensemble de ce qui me sera dit que, dans le courant de la semaine prochaine, j’indiquerai les choix que nous retiendrons sur la méthode et le calendrier de la réforme", a-t-il précisé mercredi.
Celle-ci sera "présentée dans le courant de l’année 2020 ( ?) avant ou après les municipales", s’est contentée d’indiquer la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye jeudi sur France Inter. Elle sera préparée "en écoutant les partenaires sociaux, en écoutant les Français", a promis M. Philippe.
Les discussions s’appuieront sur le rapport dévoilé mi-juillet par Jean-Paul Delevoye, qui préconise un "système universel" par points remplaçant les 42 régimes existants et un âge de départ de 64 ans pour bénéficier d’une retraite à taux plein.
Mais, dans un revirement inattendu, Emmanuel Macron a indiqué fin août sa préférence pour une modulation de la durée de cotisation plutôt que de l’âge de départ.
Équilibre financier
Une main tendue à la CFDT, seul syndicat favorable à un "système universel" mais opposé à la mise en place d’une borne d’âge collective.
"Ni confiant, ni défiant" mais "mobilisé", son secrétaire général, Laurent Berger, a redit à l’antenne de Sud Radio que le gouvernement faisait "une erreur" en visant l’équilibre financier du système à l’horizon 2025, date d’entrée en vigueur de la réforme. "Ce n’est pas le sujet", a-t-il expliqué, défendant des comptes "quasiment à l’équilibre" et la nécessité d’un "système plus juste".
"Pour que la réforme soit acceptée, il faudra qu’elle soit équitable", a pour sa part prévenu Laurent Escure (Unsa) dans un entretien aux Echos jeudi. Pour lui, "revenir à la durée de cotisation" serait "une double peine pour notamment de nombreuses femmes".
Afin de réaliser des économies, le gouvernement a envisagé d’accélérer dès 2020, via le budget de la Sécu, l’augmentation de la durée de cotisation, qui atteindra 43 ans en 2035 en vertu de la loi Touraine. Il y a renoncé pour ne pas parasiter la réforme.
Mercredi, Agnès Buzyn a précisé que "s’il devait y avoir la moindre mesure pour le retour à l’équilibre", elle figurerait "dans la loi qui concerne le nouveau système".
Quoi qu’il en soit, le "régime unique par points" sera "un outil de gestion budgétaire" aux mains du gouvernement, a estimé jeudi sur Radio Classique le numéro un de FO, Yves Veyrier, le jugeant "dangereux".
Opposé comme lui au projet, Philippe Martinez (CGT) répète dans Libération qu’il vaudrait mieux faire "évoluer" le système actuel, "le plus juste au monde, basé sur la solidarité".
En attendant, la fronde prend forme: les deux syndicats ont prévu des mobilisations, le 21 septembre pour FO, le 24 pour la CGT. Les agents de la RATP sont par ailleurs appelés à la grève le 13 septembre, tandis que certains avocats, médecins ou encore infirmières libérales défendront leurs régimes spécifiques dans la rue le 16.