Quelque 9000 Maghrébins reconduits à la frontière en 2009
Avec l’ancien ministre de l’immigration et de l’Identité nationale, Brice Hortefeux, qui n’ a cessé de vanter de ses chiffres records en matière d’expulsions, ou avec son successeur, l’ex-socialiste, Eric Besson, le quotidien des clandestins est le même. Il est fait de rafles, tracas, gardes à vue, séparation de famille et humiliations…
Une politique du chiffre qui n’épargne ni adultes ni collégiens, ni même les enfants. La ‘’chasse’’ prend son sens à l’instant où la police est sommée de ‘’faire du chiffre’’. On ne se contente plus d’expulser par avion les sans-papiers condamnés ou pris au hasard, mais on va les chercher où ils sont, à domicile, dans les quartiers où ils vivent, à l’entrée des bouches de métro qu’ils fréquentent. Avec l’objectif d’atteindre les quotas.
Ainsi, on assiste depuis deux années à une mobilisation sans pareille en France du dispositif d’éloignement des étrangers en situation irrégulière, largement encouragée au niveau européen par l’adoption de la très controversée ‘’directive du retour’’, surnommé ‘’directive de la honte’’, qui vise à harmoniser les règles d’expulsions dans les vingt-sept Etats membres de l’Union européenne et dont la principale mesure concerne la durée de rétention des immigrés sans-papiers, fixée désormais à dix-huit mois, si le retour est compliqué par manque de coopération de l’intéressé ou de son pays d’origine. En outre, la loi valide purement et simplement l’expulsion des mineurs.
Les faits divers déferlent ainsi dans la presse. Ils font état d’un jeune marocain qui se suicide en octobre 2009 à Bordeaux, trois chinoises à Paris, des lycéens et collégiens arrêtés dans leurs classes, des enfants en âge de fréquenter l’école primaire sortis du centre de loisirs, des jeunes enfants scolarisés en maternelle placés en rétention avec leur famille, un bébé d’un mois lui aussi placé en rétention avec sa maman.
La droite cherche des prétextes pour justifier sa politique de chasse aux étrangers jusqu’à affirmer que c’est le peuple français qui se refuse les régularisations globales. Cette majorité gouvernante, qui se défausse sur le peuple, est ainsi confrontée aux résultats sans appel du dernier sondage publié par ‘’Le Parisien’’ : 73% des Français sont pour une régularisation de tous les sans papiers qui ont des enfants scolarisés, 12% sont pour la régularisation de tous les sans papiers, 10% ne sont pour aucune régularisation, 5% ne se prononcent pas.
Les sondés condamnent aussi catégoriquement à 64% la restriction du regroupement familial par la loi de Hortefeux, et soutiennent majoritairement les actions d’intégration des immigrés avec ou sans-papiers. Intégration qui s’avère, à juste titre, difficile à concrétiser tant que les forces politiques de gauche comme de droite, continuent de désigner la communauté étrangère et plus particulièrement maghrébine comme source principale de tous les maux de la France.
Après le départ de Brice Hortefeux avec un grand Ouf de soulagement et avec la satisfaction d’avoir réalisé bien plus que l’objectif que lui avait assigné le Président Sarkozy, son successeur, Eric Besson, s’est dit ‘’très déterminé’’ à poursuivre l’action de lutte contre l’immigration clandestine.
Cette action, ‘’c’est d’abord lutter contre l’exploitation de la misère humaine et les filières mafieuses. La France ne lutte pas contre l’immigration tout court, elle lutte contre l’immigration clandestine dont les filières sont de véritables entreprises du crime, il n’y a pas d’état d’âme à avoir’’, a avancé le ministre.
Le président Sarkozy lui a adressé, à juste titre, une feuille de route l’appelant à
s’inscrire dans la continuité de l’action de son prédécesseur en consolidant ‘’les succès’’ enregistrés depuis la mise en place d’une ‘’politique française de l’immigration et de l’intégration équilibrée, juste et ferme’’.
‘’Dans le contexte actuel de l’emploi, et compte tenu d’un taux de chômage de 22,2 % des étrangers non communautaire d’après l’Insee, toute perspective d’une relance globale, massive et indifférenciée de l’immigration de travail doit être fermement écartée », écrivait Sarkozy à son ministre en indiquant que le recours à l’immigration de travail doit intervenir uniquement dans deux objectifs précis : lorsque les entreprises se heurtent à une pénurie structurelle, durable et certaine de main-d’œuvre et quand il s’agit de faire venir des personnes dont il est avéré que la venue sera favorable au dynamisme et à la création d’emplois dans notre pays.
Il faut dire enfin que l’indignation légitime que suscite cette politique du chiffre et tout l’intérêt médiatique autour d’elle, n’est pas sans poser certaines questions sur le contexte sociopolitique qui rend possible de tels actes. Qu’elle soit l’expression du gouvernement ou de certains groupes de presse, cette politique s’inscrit dans le contexte d’une idéologie d’exclusion favorisée par des stigmatisations, des amalgames et autres diabolisations, dont certains hommes politiques, intellectuels et professionnels de médias se sont fait les adeptes ces dernières années. Contexte aussi d’une xénophobie d’Etat marquée par les différentes lois sur l’immigration qui se succèdent depuis plusieurs années (lois Pasqua, Debré, Chevènement, Sarkozy, Hortefeux et Besson).
Anas Bachir