Marine dame le pion aux partis traditionnels

Le propre des grandes mauvaises nouvelles, c’est l’impact qu’elles provoquent le jour de leur arrivée qui est proche du coup de massue. C’est ce qui caractérise la scène politique française au lendemain de premier tour des municipales. Sa grande vedette est Marine Le Pen qui a réalisé une performance inédite plongeant le paysage politique français dans une nouvelle séquence ou la bipolarisation classique entre droite et gauche semble avoir fait temps.

Par Mustapha Tossa

Dès l’annonce de ces résultats, gauche et droite ont entamé la sérénade des accusations mutuelles. Un exercice devenu presque comme une musique de chambre des plateaux de télévision. Le droite met sur le dos de la gauche cette insistance à la discréditer auprès de l’opinion française en soufflant sur les braises fumantes des affaires qui la poursuivent et la gauche accuse la droite de courir derrière les idées du Front national au risque, avéré aujourd’hui, de lui donner une redoutable respectabilité.

Fait marquant de ce premier tour des municipales, l’impossibilité presque d’imaginer un front républicain pour barrer la route au FN. La raison, la guerre entre droite et gauche sur fond de mauvaise gouvernance et de scandales politiques à répétition est d’une telle violence qu’il est difficile d’imaginer leurs états majors fumer un calumet de la paix entre les deux tours et donner des consignes de vote pour barrer la porte des municipalités à l’extrême droite.

Il est certes confortable, sur le plans politique, d’attribuer ce succès du FN à une conjoncture politique marquée par la faillite politique de la gouvernance de gauche et la multiplicité des affaires de corruption qui gangrènent la droite. Il serait tout aussi judicieux de mettre ces performances aussi au crédit d’une stratégie de fond de relookage et de reconstruction du Front National par l’héritière Marine Le Pen. Même si le fond idéologique basé sur la xénophobie est resté le même, le discours a été enjolivé, voire expurgé des grandes déflagrations qui faisait la fortune médiatique de son paternel.

Sur l’autre rive, la droite traditionnelle a beau crier à la victoire et à la sanction du gouvernement. Ses résultats n’augurent aucune vague bleue qui terrasserait sur son passage les citadelles de gauche. Sa principale consolation est de constater que malgré le feuilleton mortel des casseroles qui clochent bruyamment à ses pieds, le noyau dur de son électoral ne semble pas lui en avoir tenu rigueur. Ses principaux chefs ont, soit été réélus du premier tout, soit en situation de l’être dimanche prochain. Même à Paris où la socialiste Anne Hidalgo était promise à un exploit dès le premier tour, l’UMP Nathalie Koscisco Morizet semble livrer une belle résistance.

Pour François Hollande enfermé dans un grand silence, le coup est rude. Son principal lot de consolation est de se dire que non seulement tout cela était prévisible mais que la sanction à mi-mandat est un comportement classique de l’électorat. Aucun de ses précédents n’a réellement échappé à cette mauvaise humeur du "Midterm" français qui lui impose une rectification et un nouveau souffle.

Nombreux sont les observateurs qui s’interrogent sur le type de réponse que François Hollande peut apporter à ce message de défi et de frustration venu des urnes municipales. La première école penche pour l’hypothèse qu’il saisisse cette occasion pour revoir l’ensemble de son casting gouvernemental. Les nombreux couacs au sein sa propre majorité ont participé jeter un discrédit sur la parole gouvernemental et à décevoir ce "peuple de gauche" qui s’est abstenu d’aller voter en signe de colère et de dépit. L’autre école serait tentée de convaincre François Holland de ne pas agir sous la pression des urnes, avec cet argument prétendument imparable que ce scrutin renfermé des enjeux locaux sans véritable dimension nationale.

Quelque soit le choix en cours de fabrication à l’Elysée, François Hollande ne peut ignorer que non seulement sa popularité peine à décoller depuis de longs mois, mais que les Français lui en veulent lourdement de les avoir déçu au point d’ouvrir un boulevard à l’extrême droite et de conserver du crédit à une droite malgré l’état de guerre fratricide et de scandales qui la tenaille depuis la chute de Nicolas Sarkozy.

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