Le territoire semi-autonome est depuis plusieurs semaines le théâtre d’une contestation historique — un million de personnes dans les rues le 9 juin, près de deux millions de protestataires le 16, contre un projet de loi visant à autoriser les extraditions vers la Chine continentale.
Devant la pression de la rue, la cheffe de l’exécutif pro-Pékin Carrie Lam a annoncé la suspension du texte, mais les contestataires réclament sa démission ainsi que le retrait définitif du projet de loi.
Les manifestants, qui ont commencé par se diriger vers le centre-ville tôt vendredi matin, étaient pour beaucoup vêtus de noir, la couleur choisie pour le rassemblement monstre de dimanche dernier.
De nombreux manifestants portant des masques et scandant des slogans contre le pouvoir ont ensuite bloqué temporairement Harcourt Road, une grande artère située devant le parlement local.
Puis ils ont convergé dans la chaleur étouffante vers le siège de la police en exigeant la libération des manifestants arrêtés ces derniers jours et en criant "honte aux policiers voyous".
Multiples revendications
Outre le retrait de la loi, la démission de la cheffe de gouvernement et la libération des personnes détenues à l’occasion d’affrontements avec la police, les manifestants demandent également une enquête sur les violences policières.
Certains protestataires ont déplacé des barrières de sécurité pour ériger des barricades devant le siège de la police.
"La foule importante qui entoure le siège de la police (…) peut mettre en difficulté les services d’urgence", a prévenu Yu Hoi Kwan, l’une des responsable de la police hongkongaise à des journalistes, en appelant les manifestants à se disperser.
Elle a annoncé qu’une équipe de négociateurs allait être envoyée pour parler aux manifestants. Ces derniers étaient nombreux à avoir déplié leurs parapluies pour se protéger du soleil tandis que d’autres s’aspergeaient d’eau pour se rafraîchir.
L’appel à la mobilisation pour vendredi a été lancée par des syndicats d’étudiants ainsi que par des organisateurs informels à travers les réseaux sociaux et des applications de messagerie telles que Telegram.
"Il y a de multiples façons de participer. Imaginez votre propre action pour manifester votre amour pour Hong Kong. Le 21 juin ne sera pas la fin de la lutte, cela continuera ces prochains jours", indiquait un message publié jeudi dans un groupe de la messagerie cryptée.
"Le gouvernement n’a toujours pas répondu à nos demandes, après tant de jours (…) ils disent n’importe quoi et se rejettent la responsabilité de la crise l’un sur l’autre", déplore, Poyee Chan, manifestante de 28 ans à l’AFP.
Un ex-ministre philippin déporté
Parallèlement, un ex-ministre philippin des Affaires étrangères qui s’était opposé à Pékin a été interdit d’entrée sur le territoire et renvoyé aux Philippines vendredi, ont dénoncé ses avocats.
Albert del Rosario, qui avait contré les ambitions de Pékin dans la mer de Chine méridionale avec un recours devant le tribunal arbitral international en 2013, a été retenu par les services de l’immigration à son arrivée à Hong Kong.
L’homme, qui a aussi porté plainte cette année contre le leader chinois Xi Jinping devant la Cour pénale internationale, "a été interdit d’entrée et déporté", a indiqué à l’AFP son avocate Anne Marie Corominas.
Au mois de mai déjà, la juge de la Cour suprême philippine Conchita Carpio Morales, également impliquée dans la plainte contre le leader chinois, avait été détenue détenue brièvement à son arrivée à Hong Kong avant d’être libérée.
Selon ses détracteurs, le projet de loi d’extraditions envisagé placerait la population de Hong Kong à la merci du système judiciaire de Chine continentale, opaque et sous influence du puissant Parti communiste.
Les milieux d’affaires craignent en outre que la réforme nuise à l’image internationale et à l’attractivité de la place financière.
La question de l’extradition a mis le territoire en ébullition depuis des mois. Mais de nombreux Hongkongais dénoncent depuis des années une ingérence grandissante de Pékin, en violation du principe "un pays, deux systèmes" qui garantit à Hong Kong, en théorie jusqu’en 2047, une semi-autonomie et des libertés inexistantes ailleurs en Chine.